The Good Business
Si le rapport entre les grandes fortunes et la presse n’est pas nouveau, il s’est diablement renforcé ces derniers temps. Retour sur un phénomène qui inquiète ou rassure...
Jeff Bezos, Warren Buffett ou Rupert Murdoch, outre-Atlantique ; François Pinault, Xavier Niel ou Arnaud Lagardère, ici… On se demande si tous ces milliardaires ne seraient pas un peu masochistes, pour continuer d’investir autant dans des journaux ou des magazines en ces temps de crise de mutation de la presse !
Le géant du luxe… et de la presse !
Les Echos et…
Fondé en 1908 par Robert et Emile Servan-Schreiber, Les Echos, quotidien d’information économique et financière, demeure aujourd’hui « la » référence journalistique des milieux d’affaires en France. Il fut racheté en 1963 par Pierre et Jacqueline Beytout en raison d’un différend survenu chez les Servan‑Schreiber (en 1962, la publication d’un éditorial appelant à voter « oui » au référendum du général de Gaulle). Jacqueline Beytout développe le titre – elle crée des suppléments ; les ventes doublent entre 1963 et 1988. Il est alors cédé au géant anglais de l’édition Pearson. Les Echos tombent en 2007 dans le giron du groupe LVMH. La diffusion était de 129 089 exemplaires en 2018.
… Bernard Arnault
Considéré comme l’homme d’affaires le plus riche de France, avec une quarantaine de milliards de patrimoine selon le magazine Forbes, le patron du groupe de luxe LVMH (Louis Vuitton, Moët & Chandon, Hennessy, Christian Dior, Chaumet, Givenchy, Bulgari, le château d’Yquem…) est aussi un patron de presse depuis qu’il a racheté, en 2007, le quotidien économique Les Echos, puis, en 2015, pour quelque 50 M €, le quotidien généraliste Le Parisien‑Aujourd’hui en France. En 2019, Bernard Arnault versera 83 M € pour renflouer et relancer ce dernier.
Un manager qui se désengage
Paris Match et…
« Le poids des mots, le choc des photos », telle fut la célèbre devise (remplacée en 2008 par « La vie est une histoire vraie ») de ce magazine hebdomadaire très illustré, fondé en 1949. Son essor doit beaucoup au patron de presse Jean Prouvost et aux journalistes qui y ont travaillé, comme Pierre Lazareff, Paul Gordeaux, Roger Thérond et Daniel Filipacchi, ancien photographe devenu patron de presse, et qui l’ouvriront sur l’actualité internationale, le photojournalisme, les grands reportages et les « scoops ». A présent, Paris Match mise davantage sur les unes « people ». Sa diffusion payante était de 519 082 exemplaires en 2018.
… Arnaud Lagardère
A 58 ans, Arnaud Lagardère règne, par le biais de Hachette Filipacchi Médias (HFM), filiale de Lagardère Active (pôle audiovisuel et presse), sur un groupe qui a marqué de son empreinte le monde des médias pendant de nombreuses années (Paris Match, Le Journal du dimanche et les radios Europe 1, Virgin Radio, RFM…). Il est le fils de Jean‑Luc Lagardère, ancien président de Matra et de Hachette. Son management est souvent raillé – à juste titre. Sa fortune personnelle est estimée à 250 M €, mais, depuis 2014, il se désengage à tour de bras des médias. En 2018, il a vendu de nombreux titres – dont Elle – au Tchèque Kretinsky, et le pôle télé au groupe M6.
Un entrepreneur ambitieux sur le marché de la presse
Le Monde et…
Quotidien français de référence paraissant le soir, Le Monde a été fondé en 1944 par Hubert Beuve‑Méry. Il est édité par le groupe Le Monde, détenu à 72,5 % par la société Le Monde libre, elle-même contrôlée à parité par les hommes d’affaires Xavier Niel et Matthieu Pigasse. Il a connu, au cours de son histoire, de nombreuses crises successives au sein de sa rédaction ou de son capital, mais il se maintient par sa qualité journalistique et par le développement de ses éditions numériques. Sa diffusion papier payée était de 288 435 exemplaires en 2018.
… Xavier Niel
Né en 1967 à Maisons‑Alfort, Xavier Niel est le fondateur et l’actionnaire principal de l’opérateur de téléphonie Free. L’homme d’affaires s’est associé, en 2010, avec Pierre Bergé (décédé en 2017) et le banquier Matthieu Pigasse, pour devenir propriétaire du groupe Le Monde (L’Obs, Télérama, La Vie…). La Société des rédacteurs du Monde a obtenu récemment des garanties d’indépendance après que Matthieu Pigasse a vendu une partie de sa participation à l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky, et que les deux alliés ont entrepris des négociations avec le groupe de presse espagnol Prisa pour racheter ses parts dans le groupe Le Monde.
