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Nantes : au restaurant-jardin Freia, Sarah Mainguy fait dans le durable

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De la cuisine à dominante végétale au mobilier chiné, en passant par les serviettes de table upcyclées, la cheffe Sarah Mainguy a tout fait pour inscrire son nouveau restaurant-jardin Freia dans une démarche durable et responsable. Pour goûter à la cuisine de demain, rendez-vous sur le toit d’un parking face à la gare de Nantes…

« Je préférerai toujours une carotte à une pièce de bœuf ». Sarah Mainguy, bientôt trente ans et déjà cheffe de deux restaurants, aborde sans détour son appétit pour le végétal. Un goût qui a marqué son parcours dans Top Chef (vous l’avez vue aller jusqu’en finale lors de la douzième édition) et qui l’a conduite à inaugurer tout récemment Freia, une table urbano-rustique installée sous une serre, elle-même posée sur le toit d’un parking face à la gare de Nantes.


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Sarah Mainguy : du bistrot au gastro

Depuis 2019 à la tête de Vacarme – une cave à manger nantaise que la cheffe mit au monde avec son compagnon Damien Crémois –, Sarah Mainguy a longtemps cru qu’elle n’avait pas sa place dans l’univers de la grande cuisine. « Je suis issue du monde du bistrot et du coffee-shop », souligne l’intéressée, passée notamment par Hollybelly, démente adresse parisienne spécialisée dans le petit-déjeuner, où elle a rencontré son amoureux et associé. « Familial, funky et pour tous les budgets », Vacarme est la première ouverture rêvée pour la jeune femme d’alors.

Mais quatre ans après, la désormais trentenaire veut s’autoriser à servir « une cuisine plus perchée », dans tous les sens du terme. Elle monte alors Freia (du nom de la déesse de l’amour et de la fertilité), un restaurant gastronomique sous serre, bordé d’un jardin urbain et posé au sixième étage d’un parking. Bref, un terrain de jeu à la mesure de son ambition. Depuis le mois de mars et avec l’aide de quatorze autres mains expertes, elle envoie depuis sa cuisine ouverte un menu en huit temps axé sur le végétal. Du genre à retourner le plus borné des viandards.

Sarah Mainguy aux commandes de Freia.
Sarah Mainguy aux commandes de Freia. Fabien Voileau

Produits courants, grande cuisine

Qu’il se rassure cependant car Sarah Mainguy ne veut rien s’interdire : sur les huit séquences que compte le menu de Freia, l’une est autour du pigeon et trois autour des coquillages. Malgré ce, elle assure préférer aux protéines animales les légumes et les herbes, « encore inexplorés pour certains ». Ainsi de cette bluffante endive braisée au cognac alanguie sur une sauce xo végétale, ou encore de ce chou à peine cuit, escorté d’ail des ours et d’un beurre blanc au foin toasté.

Difficile de ne pas voir dans cette approche un pied de nez à la grande cuisine, celle-là même qui ne jure souvent que par les produits luxueux. « Ça me paraît plus intéressant de mettre en valeur des produits que l’on consomme tout le temps plutôt que de servir du caviar ». Comme le pain, auquel la cheffe dédie trois temps de son menu : tornbread grillé, émulsion de fanes de carottes et romarin ; pain minute au fenouil, champignon d’automne fermenté et oseille ; et fouée. Trois grands plats servis tout chauds, qui se déchirent et se dégustent avec les doigts.

Préparation des coquillages.
Préparation des coquillages. Fabien Voileau

Promenade en huit temps

Aussi louable soit-il, ce travail sur les pains ne saurait faire de l’ombre au reste du repas. Que dis-je, de la promenade : « comme tout est axé autour des produits, j’ai voulu retranscrire l’environnement dans lequel ils évoluent en imaginant le repas comme une balade », explique la cheffe avant de poursuivre : « on commence dans le jardin avec le chou et l’endive par exemple, puis on passe par le marais salant, notamment via un panier de crustacés cuits à la vapeur sur des galets et des plantes marines ».

Le repas se termine par un hommage au pré dont on retient surtout l’onctueuse et acidulée tarte au vinaigre de fenouil recouverte d’une neige de gwell (un gros-lait traditionnel breton). Un plat sans chiqué aux allures de tarte au citron meringuée, valant à lui seul le déplacement en terre nantaise.

Pour arroser cette balade en huit temps, trois options s’offrent au client. « En plus des accords mets-vins et sans alcool, notre sommelier Jérôme Boullier a eu l’idée géniale d’un accord hybride. C’est totalement en phase avec notre génération : on veut pouvoir boire un ou deux coups sans enchaîner huit verres de vin et se sentir gavés », s’enthousiasme Sarah Mainguy. Animée par la quête du zéro déchet – Graal des cuisiniers conscients de leur empreinte écologique –, celle-ci a le gaspillage en horreur. D’où la réutilisation des déchets dans de sapides boissons sans alcool, tantôt fermentées, tantôt infusées, et souvent rehaussées d’herbes aromatiques issues du potager.

Au restaurant Freia.
Au restaurant Freia. Fabien Voileau

Restaurant Freia : une serre épurée et boisée

Ce sens du détail, Sarah Mainguy le cultive jusque dans le look de son établissement qu’elle a voulu « boisé et d’inspiration scandinave ». Si elle a collaboré avec l’agence déco affiliée au site de brocante en ligne Selency (laquelle a notamment meublé les restaurants Dalia et Gros Bao à Paris), la cheffe a toujours eu une idée de la direction artistique qu’elle souhaitait lui donner. « Je voulais quelque chose de très épuré, dans un style un peu années 50, avec pour pièce maîtresse une grande table de drapier », se souvient celle qui ne cache pas son goût pour les métiers artistiques – « j’ai failli faire une école d’archi mais j’ai été prise à Ferrandi… ».

Pourtant, elle a confié le projet à l’atelier nantais Raum, déjà à l’origine du bâtiment de 17 étages en briques rouges accueillant le parking silo et les bureaux situés sous le restaurant. « J’ai eu un coup de cœur immédiat pour ce lieu qui m’a rappelé l’Allemagne où ma mère vit depuis 25 ans. On se croirait à Berlin ! À Londres à la rigueur, mais certainement pas à Nantes », s’amuse la cuisinière.

« Lieu de tous les possibles », Freia prend la forme d’une serre sobrement meublée de tables rondes et d’assises assorties. À droite, la cuisine ouverte, toute de bois clair revêtue, habille la pièce à elle toute seule. Partout, les parois vitrées offrent une vue imprenable sur la ville en plus de laisser pleinement entrer la lumière du jour, dont les clients pourront bientôt profiter à raison d’un à deux midis par semaine (à ce jour, le restaurant n’est ouvert qu’au dîner). L’occasion aussi de découvrir le jardin créé et entretenu par la maraîchère Alice Ménard, partenaire de longue date de la cheffe, installée aux abords de la ville. « C’est simple, je ne me fournis que chez elle, autant pour Vacarme que pour Freia ».

Sommes-nous sûrs d’avoir atterri à Nantes ?
Sommes-nous sûrs d’avoir atterri à Nantes ? Krysto

De l’art de soigner les détails

Pour sa vaisselle comme pour ses légumes, Sarah Mainguy a pensé « local ». C’est à la céramiste nantaise Yulie Echavídre, qu’est revenue la mission de confectionner les 500 pièces ornant les tables de l’établissement. « Je l’ai repérée sur Instagram et quand j’ai vu qu’elle faisait beaucoup d’assiettes avec un sein modelé dans le fond, j’ai directement pensé à elle pour Freia (ndlr : pour rappel, ce nom a été choisi en hommage à la déesse de la fécondité) ».

Les serviettes de table, quant à elles, sont l’œuvre d’une amie d’enfance de la cheffe, spécialisée dans l’upcycling de tissus anciens. Robustes par leur toucher et chaleureuses par leur couleur, elles se fondent dans le décor du restaurant autant qu’elles le parfont. « C’était aussi une façon d’insuffler un peu plus de durabilité dans le projet », conclut Sarah Mainguy, trahissant encore une fois son engagement pour une restauration plus responsable.

Rien n’est laissé au hasard chez Freia.
Rien n’est laissé au hasard chez Freia. Fabien Voileau

Restaurant Freia
22 Bd de Berlin, 44000 Nantes
Site internet


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