Transport
L’aviation voit son avenir en vert et adapté aux différents besoins en un continuum intégré : loisirs, transports de passagers ou de marchandises, liaisons intercontinentales, locales ou urbaines. The Good Life s'est intéressé à l'aviation écologique.
Prononcés ensemble, les mots « futur » et « aviation » évoquent immanquablement des véhicules volants aux formes inédites, consommant des carburants propres et nous transportant autour de la planète – voire au-delà – à une vitesse fulgurante. On imagine des ailes volantes, des fusées décollant et atterrissant à la verticale qui nous feront traverser l’Atlantique en moins d’une heure, des taxis volants autonomes, décollant de « vertiports », qui nous amèneront au centre-ville depuis l’aéroport en évitant les embouteillages. Découverte de l’aviation écologique, ce nouveau moyen de transport qui permet de voyager dans le monde entier sans polluer.
L’aviation écologique au service du monde
On se voit embarquer dans un jet-taxi pour aller d’une métropole à une autre sans attendre et sans passer par Paris ou Bruxelles… Avions supersoniques, à hydrogène ou électriques, ballons dirigeables pour le transport de marchandises lourdes, petits avions électriques pour liaisons locales… cette aviation écologique est bien dans les cartons ; elle verra très certainement le jour, mais dans un futur pas toujours aussi proche que nous l’imaginons. Car le temps de l’aviation est un temps long.
« L’exploitation d’un appareil dure entre vingt-cinq et trente ans. Les constructeurs apportent de nombreuses améliorations à leurs avions pendant leur durée de vie, et nous n’aurons pas une aile volante dans deux ans ! La transition prendra des années », affirme Alexandre Savin, directeur du bureau de Toulouse du cabinet de conseil en innovation Alcimed et spécialiste des secteurs aéronautique, spatial et défense. Les innovations qui donneront naissance à l’aviation écologique n’ont qu’un maître mot : le zéro-émission. Une chose est certaine, quelle que soit sa forme, l’avion du futur sera vert « et il s’inscrira dans un continuum de mobilité décarbonée et efficace », poursuit Alexandre Savin.
« On pense remplacer progressivement les carburants fossiles »
Les constructeurs d’avions et les exploitants travaillent depuis des années, voire des décennies, pour réduire la consommation de carburant et les émissions de gaz à effet de serre (GES), en remplaçant progressivement les carburants fossiles par des carburants alternatifs. D’importants progrès ont déjà été accomplis dans ce domaine. Selon le rapport du Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac) sur la décarbonation du transport aérien, publié en décembre 2021, « la consommation unitaire, c’est-à-dire par passager/km, a été divisée par cinq depuis 1960 (par deux sur les trois dernières décennies), principalement grâce aux technologies motrices, à l’allègement des aéronefs, et à l’optimisation de l’aérodynamique et des systèmes embarqués ».
Des vols toujours plus longs et sans escale
Tout à la fois pour profiter de ce qu’un avion est plus efficace lorsqu’il vole en régime de croisière que lorsqu’il roule au sol et pour ouvrir de nouvelles routes commerciales, mais aussi, depuis février 2022, pour modifier leurs itinéraires afin d’éviter l’espace aérien russe, les compagnies aériennes cherchent à réaliser des vols de plus en plus longs sans escale. Si les très longs vols commerciaux ne sont pas encore monnaie courante, plusieurs vols ont déjà rallié New York à Singapour en 18 h et 40 min avec un Airbus A350‑900ULR, soit 16 130 km, ou Doha à Auckland (14 535 km) en 18 h et 20 min avec un Boeing 777‑200LR.
Certes, on est encore loin des vols en fusée Starship envisagés par SpaceX qui relieront, peut‑être un jour, New York à Paris ou Tokyo en 30 minutes. Cependant, voyager de Londres à Sydney en 17 heures réduit le temps de voyage actuel d’une dizaine d’heures, appréciable pour beaucoup de voyageurs ! Et pour rendre le voyage plus agréable, Air New Zealand proposera, dès 2024, des cabines couchettes en classe économique dans ses futurs Boeing 787‑9 Dreamliners, qui assureront des vols ultra‑long‑courriers d’une durée supérieure à 17 heures.
Elixir mise sur le carbone
Si les avions de ligne ont depuis longtemps adopté les matériaux composites, notamment le carbone, pour leurs qualités de résistance et de légèreté, les avions légers (loisirs, sports, tourisme) sont encore nombreux à être fabriqués en métal, surtout en aluminium. Composés de nombreuses pièces assemblées, rivetées ou collées, ces appareils sont lourds et leur complexité rend leur maintenance coûteuse. Lorsqu’il a créé la société Elixir Aircraft, en 2015, à La Rochelle, Arthur Léopold‑Léger a voulu rajeunir cette famille d’appareils.
Passionné d’aviation, mais aussi de voile, et diplômé en ingénierie aéronautique, il s’est lancé dans la conception et la fabrication d’un avion de nouvelle génération, qui soit « plus sûr, plus économe et plus polyvalent ». Pari gagné ! L’avion Elixir exploite la technologie OneShot, utilisée dans la voile de compétition, qui permet de fabriquer une structure complexe sans assemblage. L’aile entière, le fuselage et la plupart des pièces de l’avion sont fabriqués en carbone OneShot.
de l’américain Boom Supersonic. 2022 Boom Supersonic
« On dit qu’une pièce qui n’existe pas est une pièce qui ne casse pas ! Il y a 30 fois moins de pièces dans un Elixir que dans un avion léger classique. Autrement dit, moins de risque, moins de poids et moins de consommation. De plus, le carbone ne vieillit pas, se répare et se recycle », détaille Emmanuel Gil, responsable commercial pour l’Europe et pilote démonstrateur.
Pourquoi ne pas avoir choisi un moteur électrique ? « C’est une solution de transition. Les batteries sont encore trop lourdes et n’offrent pas assez d’autonomie. Nous commençons à étudier l’hydrogène, mais cela deviendra concret à un horizon de dix ans seulement ! » Certifié en 2020 par l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA), l’Elixir est désormais produit en série à La Rochelle. Les premiers exemplaires ont été livrés en février dernier et l’entreprise a enregistré une cinquantaine de commandes.
La course au progrès continue
De nombreux projets d’aviation écologique, électrique ou hybride, voient le jour un peu partout dans le monde. Ils visent à mettre au point des appareils de loisirs ou de transport régional pour des liaisons transverses, allant du biplace, pour la formation des pilotes, à l’avion de quelques dizaines de places tout au plus pour desservir des liaisons transverses.
« L’aviation écologique teste déjà l’avion de tourisme électrique »
En France, plusieurs entreprises, créées par des transfuges d’Airbus ou des grands industriels de l’aéronautique, testent ou produisent de tels avions de tourisme électriques ou hybrides. C’est le cas de VoltAero (hybride), Aura Aero (transport régional électrique), Ascendance Flight Technologies (hybride, à décollage vertical) ou Elixir Aircraft (moteur thermique, avion tout–carbone).De nombreuses start-up s’activent, pour leur part, autour du pôle de compétitivité Aerospace Valley, basé à Toulouse, notamment dans le cadre de l’initiative Mobilité aérienne légère et environnementalement responsable (MAELE).
Tous ces projets serviront à valider les technologies avant qu’elles passent à l’échelle du transport aérien commercial. Mais pour la plupart, ce sont encore des prototypes dont les versions pleinement opérationnelles et certifiées ne seront disponibles qu’à partir de 2030. Car il reste de nombreux défis à relever : encombrement et poids des batteries, temps de recharge, stockage de l’hydrogène à bord, etc.
Les grands avionneurs et leurs motoristes ne sont pas en reste, qui testent les carburants d’aviation durables (CAD) – ou sustainable aviation fuels (SAF) – issus de biomasses ou de déchets agricoles, l’hydrogène, les piles à combustible, etc. Le futur verra aussi le retour de l’avion supersonique. Le constructeur américain Boom -Supersonic a présenté, en juillet, une nouvelle version de son appareil, baptisé Overture, dont la production devrait démarrer en 2024. Équipé de quatre moteurs, l’avion devrait emporter entre 65 et 85 passagers. Il pourrait traverser le Pacifique pour relier Seattle et Tokyo en moins de cinq heures, soit la moitié de la durée actuelle du vol, et il ferait le trajet New York – Londres en trois heures et demie.
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