Horlogerie
Le succès du vermouth ne s’est jamais démenti en Europe, et principalement en Italie et en Espagne, où il fait l’unanimité au moment de l’apéritif. La nouveauté ? Il revient en force en France à travers la scène mixologiste. L'occasion pour The Good Life de revenir sur ce spiritueux d'excellence.
Obtenir le « Royal Warrant of Appointment to Her Majesty Queen Elizabeth II » est un gage de qualité. À ce jour, de nombreuses maisons de champagne se sont servies de cette distinction pour s’imposer sur le marché britannique. Les bulles résonnent à Buckingham Palace lors des cérémonies, mais, en dehors de ses événements, la défunte reine élisabeth avait quelques habitudes lorsqu’elle était plus tranquille. Elle était amatrice de vermouth, et notamment des marques françaises Noilly Prat et Dubonnet. Basé à Marseillan, une commune en bord de mer, à quelques dizaines de kilomètres de Sète, Noilly Prat affiche fièrement cette reconnaissance.
« Tout s’est joué durant la Seconde Guerre mondiale, raconte Tony Salvador, chargé des visites du site. Les Anglais avaient la volonté de sauvegarder quelques savoir-faire bien français. La marque a donc reçu l’autorisation de délocaliser la production à Londres. La Reine est même venue ici. Et nous avons ensuite obtenu le fameux mandat. » Aujourd’hui encore, le marché britannique et, plus généralement, le Commonwealth constituent l’essentiel des exportations de cette boisson à l’amertume présente. Dubonnet est même en rupture de stock actuellement. Selon le distributeur australien, Endeavour Group, les ventes en Australie auraient progressé de 465 % dans les trois jours qui ont suivi l’annonce du décès d’Élisabeth II.
Plus qu’un vin aromatisé
Le vermouth est né dans le Piémont, dans le nord de l’Italie. À Turin exactement. En 1786, deux distillateurs italiens, Antonio et Benedetto Carpano, inventent un apéritif à base d’un simple vin blanc de moscatel (légèrement sucré) et de wermut, une herbe (l’armoise) utilisée dans la distillation de l’absinthe. Ils le dénommeront alors sobrement wermuth wein.
« Le vermouth n’est pas un spiritueux, explique François Monti, auteur du livre Cent un cocktails, aux éditions Dunod. C’est un vin aromatisé. Pour élaborer un vermouth, on utilise un vin, généralement blanc, pas trop fort en alcool et avec de l’acidité. Puis on lui additionne un alcool pour atteindre un degré alcoolique compris entre 15 et 18 degrés. Enfin, on ajoute un extrait aromatique, fruit d’une macération de nombreuses herbes, épices et racines. Il peut en avoir une quarantaine : gentiane, coriandre, hysope, origan, marjolaine, girofle, orange amère… »
Toutes les recettes, comme pour le gin, sont ainsi permises pour se différencier et être originales. Elles font sa personnalité et sa couleur : blanc, jaune vif, ambré ou rouge. Tout dépend des ingrédients utilisés. En Italie, Cinzano est la marque la plus connue de la péninsule. Carpano Antica Formula est sans doute le plus ancien, puisqu’il a été élaboré en 1837. « Il a la faveur de tous les mixologistes », insiste Adrien Dominé, le fondateur du site Thecocktailist.fr, qui propose de fournir aux amateurs tous les éléments nécessaires à l’élaboration d’un cocktail à son domicile. On pourrait également citer les vermouths Cocchi (1891), Carlo Alberto (1837), Gancia (1850), Contratto (1867).
¡ Quedar para el vermú !
L’Italie est son lieu de naissance, mais chaque pays a la capacité de produire du vermouth aujourd’hui. Il en existe des espagnols, des grecs, des français évidemment. Si cet alcool est une institution chez nos voisins transalpins, en France, il l’était au moment de l’apéritif au début des années 80. Puis il est tombé en désuétude. Il revient peu à peu à la mode « car il complète parfaitement les autres alcools utilisés dans un cocktail. Il apporte rondeur, équilibre et surtout de la texture », détaille Adrien Dominé.
Vermouth cassis, Negroni, Manhattan ou encore, le plus célèbre d’entre eux, le Dry Martini de James Bond (au shaker, pas à la cuillère) élaboré à partir du vermouth français Noilly Prat, en sont les plus belles preuves. En Espagne, le vermouth fait l’unanimité auprès de la population. La ville catalane de Reus, dans la province de Tarragone, demeure son berceau. La marque Yzaguirre fut la première à être commercialisée, en 1884. Désormais, toutes les régions espagnoles en consomment et en produisent. Plébiscité, il est entré dans le langage courant. L’expression « quedar para el vermú » désigne l’heure de l’apéro, souvent au déjeuner, et se traduit par : « rester pour le vermouth » !
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1. La Quintinye Vermouth Royal Rouge
Produit en France, dans la région de Cognac, ce vermouth a été créé par la maison Villevert. La couleur de base, un rouge profond, est obtenue à partir d’une sélection de vins rouges et de pineau des Charentes, un vin de liqueur obtenu par mutage de moûts de raisin et d’eau de vie de cognac. Vingt-huit plantes et épices viennent compléter les secrets de fabrication.
La robe d’un rouge intense surprend. On apprécie, dès la première gorgée, l’aromatique riche et délicatement amère de ce vermouth si particulier. Les parfums complexes de réglisse, de prunes et de vanille, et les notes chocolatées envahissent le palais. La finale est longue et puissante, sur des notes caramélisées. à boire frais avec un zeste d’orange.
2. Noilly Prat Original Dry
C’est le vermouth français par excellence, puisqu’il fut créé en 1813 par Joseph Noilly. La visite et l’atelier cocktail permettent de mieux connaître ce produit tant apprécié par James Bond. Il faut se rendre à Marseillan, pour bien s’imprégner des secrets de fabrication ; un vieillissement en 2 étapes à l’air libre dans des fûts contenant 2 cépages blancs du Languedoc.
S’ensuit un mélange de camomille, de coriandre, d’orange amère, de muscade… le goût est subtil, délicatement floral. Il se prête bien à toutes les recettes de cocktail en apportant structure et amertume altière. Mais il peut également accompagner des mets délicats, comme la noix de Saint-Jacques.
3. Yzaguirre Rojo Reserva
Véritable star en Espagne, il y est sans doute le plus consommé et le plus réputé de tous les vermouths. Il faut dire que cette cave existe depuis 1884. Elle a eu le temps de se faire apprécier par toute la population espagnole. Ce vermouth est un grand charmeur. Nez vif sur les fruits rouges confits, épices, notes légèrement boisées.
Il est une véritable invitation à franchir la frontière. D’autant qu’en bouche il se révèle velouté avec une persistance épicée. Il a de la matière. Ses douze mois de vieillissement en fûts de chêne lui confèrent consistance et caractère. Des glaçons, un peu d’eau gazeuse, une rondelle d’orange, et le voyage en Tarragone commence.
4. Del Professore Vermouth Rosso
Voici encore un produit venant de nos voisins italiens, de la distillerie Quaglia, dans le Piémont. Un produit artisanal inspiré d’une ancienne recette locale. Le nom en impose déjà. Dans le verre, l’impression se confirme, car ce vermouth révèle un nez opulent. C’est un tourbillon de notes d’oranges sanguines, de citrons confits, et de fruits rouges confiturés.
Le tout est saupoudré d’une sélection pointue de plantes aromatiques puissantes et d’épices, parmi lesquelles : la menthe alpine, l’absinthe, la gentiane, le clou de girofle et le macis. Le vermouth Del Professore serait un hommage à Jerry Thomas, barman américain du xixe siècle, considéré comme le parrain de la mixologie moderne et surnommé « The Professor ».
5. Carpano Punt e Mes
Originaire du Nebraska, Chris Brockway s’installe en Californie et produit sa première cuvée au début des années 2000, avec la volonté de se distinguer des vins qu’il juge alors « trop tout . Installé à Berkeley, il source ses raisins dans tout l’État, privilégiant les vignerons en bio et en biodynamie, et en limitant les interventions au chai sans renier parfois quelques erreurs.
Cette cuvée en est la preuve : produit à partir du cépage valdiguié, proche du malbec, mais oublié, il est le résultat d’une erreur commise en 2017. Les raisins ont été ramassés plus tôt que prévu, mais Chris Brockway, content du résultat, a décidé de le faire chaque année. Le résultat ? Un vrai léger, fruité et faussement simple, qui s’apprécie dans la fougue de la jeunesse, bien frais.
6. Winestillery Tuscan Red Vermouth
La Toscane nous enchante avec ses paysages parsemés de vignobles, de villages médiévaux, de cyprès au bord des routes. Les vins y sont excellents, mais il convient aussi de découvrir ce vermouth original élaboré par les deux frères Chioccioli, à base de plantes aromatiques provenant en grande partie de la propriété, mais aussi du cépage typique de la région : le sangiovese.
La robe est profonde avec des reflets violets. Le nez est opulent et complexe. Les arômes sont envoûtants, avec la violette dominante, le romarin et les épices. En bouche, il est d’une longueur incroyable. Il est à consommer frais avec des glaçons. Il serait dommage de le mélanger.
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