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Dallas, renaissance d’une ville
Bien desservie, dynamique et accueillante, la ville de Dallas a su se diversifier et n’a pas vu passer la crise.
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The Good Business

Huit acteurs majeurs de l’économie dallasienne

The Good Business

La Maximale City de notre numéro spécial « 5 ans » de The Good Life est consacrée à Dallas ! Symbole de richesse et porteuse de nombreux clichés, Dallas est en train d’opérer une mutation rapide qui lui garantit un avenir égal à celui de New York ou de San Francisco. Une ville qui offre d’incroyables opportunités de business et d’emplois, la qualité de vie en prime. The Good Life a tiré le portrait de huit acteurs de son économie.

Mike Wilson (@mwilstory), Directeur de la rédaction du Dallas Morning News

Mike Wilson.
Mike Wilson. Vasantha Yogananthan

Du haut de son bureau, au dernier étage du bâtiment du Dallas Morning News, situé au 508 Young Street, à quelques encablures du lieu où John Fitzgerald Kennedy a été assassiné, Mike Wilson surveille son écran. Dans quelques minutes, Donald Trump doit faire une déclaration, et il ne veut pas la louper. « Il y a dix jours, dans un éditorial, nous avons recommandé de voter pour Hillary Clinton. Nos lecteurs républicains n’ont pas apprécié du tout. » Dans une ville certes démocrate, mais dans un État carrément marqué républicain, le fait qu’une une affirme en gros caractères « Trump n’est pas compétent pour être président » a échauffé les esprits. Quelques centaines de lecteurs ont sûrement été perdus, et certains ont même manifesté devant les locaux du journal. Depuis 1940, jamais le principal quotidien du Texas, fondé en 1885 et récompensé, entre autres, par neuf prix Pulitzer, n’avait publiquement pris parti pour un démocrate.

Né dans le Connecticut et diplômé de la Tufts University (Massachusetts), Mike Wilson ne cache donc pas ses penchants. Après douze années passées au Miami Herald, puis douze autres au Tampa Bay Times et douze mois à la chaîne de télévision new-yorkaise ESPN, il est, depuis février 2015, directeur d’une rédaction qui compte aujourd’hui 270 journalistes. Le Dallas Morning News est vendu à 230 000 lecteurs, et 13 millions de personnes visitent le site web chaque mois. « Nous assumons le rôle de ­“watchdog”. Il est important, pour nous, de dénoncer ce qui ne va pas dans la vie de tous les jours, dans le monde certes, mais aussi au Texas. Par exemple : ce que fait l’État avec l’argent des citoyens. » Chien de garde, certes, mais à la mode libérale : Mike Wilson aime souligner le rôle bienveillant des milliardaires philanthropes de la ville. Il est persuadé que, sans eux, les musées de Dallas ne seraient pas aussi attractifs. « Ils savent rendre à la communauté en apportant une vraie contribution à la ville. » Et de conclure cet entretien, donné une après-midi de septembre : « Je me plais à Dallas, et je suis devenu un supporter de son énergie. Ici, rien n’est impossible. » Y. de K.

Mike Rawlings (@mike_rawlings), Maire de Dallas

Mike Rawlings.
Mike Rawlings. Stewart F. House - Getty Images

Élu maire en 2011, avec 55 % des voix, le démocrate Mike Rawlings obtenait 73 % quatre ans plus tard, lorsqu’il se présentait pour un second mandat. C’est dire à quel point, malgré le penchant conservateur de l’État du Texas, Dallas est une ville démocrate, et ce, depuis vingt ans. Mike Rawlings est né à Borger, au Texas, a étudié à Boston, et réside à Dallas depuis 1976. Il y a fait son chemin jusqu’à devenir CEO de Tracy-Locke, une grande agence de publicité, puis en prenant la direction du géant Pizza Hut. Enfin, c’est avec la firme d’investissement CIC Partners qu’il se familiarise avec la petite et moyenne entreprise locale, une expérience qui s’ajoutait à celle de son implication dans le bénévolat social. Des expériences qui le mèneront finalement à l’hôtel de ville, devenant l’un des maires les plus appréciés de l’histoire de Dallas. Dès le début de son mandat, Mike Rawlings a déclaré s’attaquer aux inégalités sociales, à l’éducation, aux problèmes raciaux, et à cette fracture importante entre le nord et le sud de la ville, où est reléguée la population la plus pauvre.

Fin 2015, opposé à la volonté du gouverneur Greg Abbott de bloquer l’immigration, Mike Rawlings s’est prononcé en faveur de l’accueil de réfugiés syriens. Il déclare alors que, ce qui l’inquiète davantage, ce sont « les hommes blancs qui se procurent des armes militaires et tirent dans les espaces publics ». C’est à peu près ce qui surviendra, le 7 juillet 2016, lorsqu’un tireur embusqué – un ancien militaire noir – tue cinq policiers pendant une manifestation contre la violence policière envers les Noirs. L’occasion de relancer le débat sur les armes à feu, un droit avec lequel on ne transige pas au Texas, l’État ayant adopté, en janvier 2016, la loi Open Carry, qui autorise, sous certaines conditions, le port visible d’armes à feu. Ce qui explique certaines affiches vues aux portes de commerces ou de restaurants qui peuvent, eux, l’interdire. Décidément, Dallas cultive les paradoxes. Mike Rawlings connaît les limites de sa juridiction. Il a déclaré ne pas vouloir faire perdre de temps au conseil municipal avec les causes « perdues », car soumises aux lois de l’État, comme le port d’armes, le mariage gay – banni du Texas en 2005 – ou l’avortement. Il concentre donc ses efforts sur le renforcement de la police – la criminalité a toutefois augmenté à Dallas en 2016 –, la résolution du problème des sans-abri et l’amélioration du système d’éducation – un frein, selon lui, à l’installation de grandes entreprises.

Son plus grand projet reste le plan Grow South, lancé en 2012, destiné à développer la partie de Dallas située au sud du fleuve Trinity et de l’autoroute 30, là où se situe le plus grand nombre de terrains disponibles de l’agglomération. En attirant ici investisseurs et nouveaux résidents, cette zone pourrait mieux contribuer aux revenus de la ville et, donc, au financement de ses services. Actuellement, 55 % des citoyens de Dallas vivent au nord de la Trinity, mais leur contribution en impôts locaux est de 85 %, alors qu’au sud les 45 % restants ne contribuent qu’à 15 %. C’est dire l’enjeu de ce plan ambitieux qui requiert la participation de tous, et dans tous les domaines. AT&T a, par exemple, accru l’installation du haut débit dans cette zone, Uber a augmenté son nombre de chauffeurs, et un vaste programme immobilier de maisons familiales est en cours. En 2019, Mike Rawlings atteindra le terme de son second mandat, le maximum autorisé. Ce sera la première fois dans l’histoire de la ville, depuis l’instauration de l’élection directe, qu’un maire aura connu une telle longévité. S. B.

Doug Parker, CEO d’American Airlines

Doug Parker.
Doug Parker. Bloomberg / Getty Images

Cela fera trois ans, à la fin de l’année 2016, que Doug Parker, 55 ans, préside aux destinées d’American Airlines (AA), la plus grosse compagnie aérienne du monde, basée à l’aéroport de Dallas-Fort Worth. Arrivé à la tête du groupe dans les valises de la fusion avec US Airways, une compagnie aérienne plus petite mais en meilleure santé et dont il était le numéro un, Doug Parker a passé toute sa carrière dans l’industrie aérienne. Une expérience qui fait de ce diplômé de la prestigieuse université privée Vanderbilt un homme des situations difficiles. La fusion entre US Airways et American Airlines ne s’est pas faite sans douleur. Il a fallu intégrer toutes les procédures opérationnelles des deux compagnies : vols, maintenance, régulations. Une immense satisfaction pour Doug Parker, qui a dû batailler ferme pour mener le projet à son terme. Ce n’était pas gagné.

Car American Airlines, c’est du lourd. C’est l’un des plus gros employeurs locaux avec 27 000 employés (100 000 dans le monde). Une flotte historique, née en 1934, au temps de Charles Lindbergh. Son QG est situé, depuis 1979, à proximité de l’aéroport Dallas-Fort Worth. Forte de 1 500 appareils, la compagnie est devenue l’une des plus rentables des États-Unis. Avec son partenaire régional, American Eagle, elle propose 6 700 vols par jour vers 350 destinations et dans plus de 50 pays. L’enjeu pour l’avenir est de regagner la confiance des clients et de reconquérir une réputation de qualité sur un marché instable. Pour Doug Parker, c’est une mutation culturelle qu’il faut entreprendre. Lui-même donne l’exemple. Sa rémunération est exclusivement indexée sur les résultats consolidés de l’entreprise. Y. de K.

Trey Bowles (@treybowles), fondateur du Dallas Entrepreneur Center

Trey Bowles.
Trey Bowles. Vasantha Yogananthan

« Je suis né à Dallas et je suis un entrepreneur depuis l’université. A 40 ans, j’ai déjà créé plusieurs entreprises et associations. J’ai ainsi contribué à la création de milliers d’emplois dans les médias et la technologie. » Cela manque peut-être de modestie, mais le « can do spirit », Trey Bowles connaît. Aujourd’hui coprésident du Startup America Partnership, il a suivi des études de marketing et se définit lui-même comme un social capitalist. En 2001, il a contribué à la création de Morpheus, l’une des applications les plus téléchargées de l’histoire d’Internet. Après avoir roulé sa bosse dans d’autres États, il est finalement revenu à Dallas, « pour le restant de ses jours, souligne-t-il. C’est un superendroit pour vivre et c’est le meilleur environnement pour trouver des opportunités d’emplois. Avec l’explosion de la création d’entreprises, la ville et sa banlieue sont en train de devenir l’écosystème d’innovation qui a la croissance la plus rapide des États-Unis. » Comparable à celui de San Francisco !

Et le serial-entrepreneur de faire l’inventaire des atouts de « Big D » (surnom donné à Dallas) : deux aéroports, trois équipes de sport, le plus grand Arts District du pays, des restaurants par centaines. « Et un esprit d’innovation comme nulle part ailleurs. C’est dans l’ADN local », précise-t-il. Le Dallas Entrepreneur Center (DEC), qu’il a fondé en 2013, est un incubateur de start-up. Dans les locaux que le centre occupe sur Market Street, les coworkers et les entrepreneurs se retrouvent pour partager leurs expériences. « L’expérience ne s’acquiert pas lors d’un stage ou dans une salle de classe, mais dans un bain organique de coopération pratique où on échange ses savoirs. » Le DEC, dont le but est aussi de lever des fonds auprès de donateurs, fait venir des experts, des médias, des institutions locales. « Les entrepreneurs veulent devenir riches, mais ils réalisent que ce n’est pas facile. Les vrais entrepreneurs sont avant tout ceux qui veulent être libres de faire ce qu’ils veulent, qui visent l’accomplissement personnel. »

Trey Bowles a également lancé un département sur l’entrepreneuriat à l’Université méthodiste du Sud (SMU) et a fondé, en partenariat avec la ville de Dallas, le Mayor’s Star Council, un groupe composé de jeunes leaders âgés de 25 à 40 ans, venant de différents horizons et réfléchissant sur l’éducation, le tourisme, les médias, le business… La faiblesse de Big D selon le quadra entrepreneur ? « C’est une image floutée. Quand les gens pensent à Dallas, aussitôt viennent les images de J.R. et de Sue Ellen. Un cliché vieux de 40 ans. Rien de nouveau ne se connecte dans leur esprit. Il faut trouver le produit d’appel qui va faire tilt. Impératif : faire de Dallas une destination. Et chacun doit faire le job. » Y. de K.

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