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La Georgie serait-elle la patrie de naissance du divin nectar ? The Good Life est allé sur le terrain pour mener l'enquête, 2024 - TGL
La Georgie serait-elle la patrie de naissance du divin nectar ? The Good Life est allé sur le terrain pour mener l'enquête, 2024 - TGL
Marine Mimouni

Vins et spiritueux // The Good Culture

La Géorgie, nouvel eldorado du vin ?

The Good Culture

Vins et spiritueux

Tout amateur de vin a entendu parler, un jour ou l’autre, de la Géorgie. Peut-être pas encore pour ses flacons – quoique certains émergent avec les vins orange ou rouges –, mais parce qu’elle serait la patrie de naissance du divin nectar. The Good Life a mené l’enquête.

C’est un petit pays du Caucase, aux confins de l’Europe et de l’Asie, qui partage ses frontières avec la Russie, au nord, la Turquie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, au sud. Une histoire viticole vieille de presque 8000 ans fait de la Géorgie, nation d’à peine 4 millions d’habitants et de moins de 70 000 km2 (soit une superficie environ 9,5 fois inférieure à celle de la France), le berceau du vin.


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Géorgie : l’autre pays du vin

À Gadachrili Gora, un site archéologique situé à une trentaine de kilomètres au sud de Tbilissi, la capitale, des chercheurs ont découvert en 2017 des amphores, des jarres et des poteries enfouies dans les sols de maisons datant de 5800 à 6000 ans av. J.-C. Certaines étaient maculées d’acide tartrique, principal marqueur de la présence de vin, d’autres avaient contenu des pépins de plusieurs variétés de raisins, la preuve d’une vigne domestiquée dès le néolithique et les débuts de l’agriculture.

Vue du château Zegaani.
Vue du château Zegaani. DR

C’est donc ici que serait née la boisson préférée de Bacchus, favorisée par des conditions climatiques propices, comme l’explique David Tatulashvili, le propriétaire du château Zegaani : « Les hivers ne sont pas extrêmes et les étés, pas trop chauds. Dans notre région, en Kakhétie, par exemple, les moyennes sur 24 heures sont de 3 degrés en hiver et de 24 en été. Ce climat favorable offre des récoltes en quantité et en qualité, et permet de privilégier une culture biologique. »

Par sa situation géographique et son accès à la mer Noire, la Géorgie fut tout au long de son histoire – et reste – un terrain propice aux invasions. Ses habitants auraient pu ainsi perdre toute attache véritable avec leur passé devant tant de péripéties. Mais, comme souvent, pour garder le cap, il faut avoir une petite boussole interne pour indiquer le chemin et ne pas se perdre.

David Tatulashvili, propriétaire du château Zegaani, produit ses vins en biodynamie.
David Tatulashvili, propriétaire du château Zegaani, produit ses vins en biodynamie. DR

Pour les Géorgiens, cette boussole, c’est le vin. Le nectar des dieux est ainsi devenu le ciment patrimonial de ce pays, couvert à 70% de vignobles, soit plus de 50000 hectares. Il constitue également une manne économique importante.

En 2020, les autorités locales ont recensé plus de 25000 agriculteurs fermiers ayant apporté leurs récoltes aux différents sites de vinification. En 2021, le vin géorgien s’est exporté vers 62 pays, atteignant le record de 107 millions de bouteilles. Parmi les pays importateurs, on trouve la Russie, qui absorbait alors près de 56 millions de flacons, venaient ensuite l’Ukraine, la Chine, la Pologne et le Kazakhstan

Plus de 550 cépages

Le raisin ne serait qu’un fruit sans la main experte de l’homme, certainement pas une boisson culturelle, voire divine et cultuelle. Plus de 550 cépages ont été répertoriés : 450 cépages autochtones et une centaine d’européens.

Les vignes du château Zegaani.
Les vignes du château Zegaani. DR

« Pour obtenir du vin, les viticulteurs géorgiens ont une méthode bien à eux, explique Gocha Javakhishvili, ambassadeur de Géorgie en France. Ils utilisent un procédé ancestral, développé au fil des siècles, pour réaliser la fermentation. Il consiste à placer le jus de raisin pressé avec pépins et peaux pendant environ six mois dans de grandes jarres en argile appelées qvevris. »

La forme du qvevri est conçue pour permettre au jus de mûrir lentement dans ces récipients en terre cuite, à une température uniforme, puisque ces immenses jarres sont littéralement scellées puis enterrées. Ce procédé est tellement spécifique qu’il a été inscrit par l’Unesco sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité le 5décembre 2013.

David Tatulashvili, propriétaire du château Zegaani.
David Tatulashvili, propriétaire du château Zegaani. DR

Aujourd’hui, cette technologie est adoptée par les meilleurs producteurs, comme David Tatulashvili, mais aussi par la société Askaneli, fondée en 1998 par les frères Chkhaidze, ou encore par le château Mukhrani, berceau de la famille royale Bagration, qui régna sur la Géorgie pendant neuf siècles.

Les amphores prennent place dans un chai géorgien, que l’on appelle marani. Cette manière de faire est aussi à l’origine du vin orange. Si nous découvrons ce vin depuis le milieu des années 2000 en France, avec un fort engouement ces dernières années, il existait déjà en Géorgie depuis l’Antiquité.

À l’intérieur des caves du château Zegaani, en Georgie.
À l’intérieur des caves du château Zegaani, en Georgie. DR

Ce serait un importateur anglais, David Harvey, qui lui aurait trouvé son nom en raison de sa robe orange – on dit aussi «ambrée». Il est obtenu en laissant la peau des raisins blancs au contact du jus pendant une période plus ou moins longue en fonction de la vendange et de la philosophie du vigneron.

Gérard Bertrand, le metteur en marché le plus important du Languedoc, en a même fait l’emblème de sa communication en 2024. L’Histoire semble être un éternel recommencement. La Géorgie, berceau du nectar, deviendra-t-elle alors un nouvel acteur du vin pour les consommateurs, en dépit d’une histoire viticole vieille de 8000 ans ?


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