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The Good Culture // Gastronomie

Bao Family : « En Chine, on ne dit pas je t’aime, on te prépare à manger »

Gastronomie

The Good Culture

The Good Life tire le portrait de celles et ceux qui font la restauration d’aujourd’hui à Paris et ailleurs. Pour ce premier épisode, rencontre avec Céline Chung et Billy Pham, fondatrice et fondateur de la Bao Family, un groupe de restaurants qui a donné un nouveau ton à la cuisine chinoise dans la capitale.

Un plat de nouilles sautées et des aubergines grillées sont éclairés par la lumière bleu d’un ordinateur portable. Céline Chung et Billy Pham, attablés, relèvent la tête, baguettes en main : « On vous attendait, on était en train de tester les assiettes pour l’ouverture du prochain restaurant à Marseille. » Après avoir conquis Paris avec quatre adresses florissantes, le couple d’entrepreneurs à la tête de la Bao Family n’a pas fini de répandre la bonne parole de la cuisine chinoise rassembleuse.

Céline Chung et Billy Pham chez Bao Express.
Céline Chung et Billy Pham chez Bao Express.

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Du CAC 40 au burger

Pourtant, au tout départ, il était question de burger. Céline Chung, la vingtaine d’années, est alors conseillère en management pour des boîtes du CAC 40, haut perchée dans une tour de La Défense. Plus les années passent, plus elle a du mal à comprendre pourquoi et pour qui elle prend l’ascenseur chaque jour. Consultante en manque de sens, elle plaque tout, redescend sur la terre ferme guidée par l’idée d’un restaurant où elle « fera plaisir aux gens ».

Et pour comprendre le métier, il faut s’y frotter. Elle passe un an à empiler les buns et servir des frites dans les restaurants de l’enseigne Paris New York (PNY). L’équipe lui propose de prendre du galon et de développer la filiale mais Céline veut son endroit à elle où la cuisine chinoise, la bonne, la vraie, sera portée aux nues. Toute seule ? Elle finit par l’envisager quand elle se sépare d’un associé après une troisième tentative de collaboration. Mais, un mois avant de quitter le groupe, elle rencontre Billy Pham, un jeune entrepreneur passé par la gestion de la franchise Subway, lui aussi en quête de sens après des années à débiter des sandwichs standardisés. Jamais trois sans quatre ? Le courant passe et il est prometteur. Leur collaboration devra passer l’ultime épreuve d’un voyage qui décidera de leur avenir.

Petit Bao, le premier enfant de la famille.
Petit Bao, le premier enfant de la famille.

Coup de food à Shanghai

S’envoler avec un quasi inconnu pour une destination lointaine, et ce pendant trois semaines, c’est leur projet. Céline et Billy prennent un billet pour Shanghai avec un agenda bien rempli sur place : cours de cuisine tous les matins et découverte des restaurants la deuxième partie de la journée. Le duo professionnel a le temps et l’espace d’une ville aux 25 millions d’habitants pour retailler chaque jour l’image du restaurant de leur rêve. Quelles spécialités de la cuisine chinoise on mettra à la carte ? Quelle ambiance ? Le mobilier ? Les lumières ? Le compte à rebours est lancé pour y répondre.

Les mains dans la pâte à bao aux aurores, ça forge aussi des liens : « À l’issue du séjour, on ne s’est même pas dit qu’on allait travailler ensemble pour de bon, se souvient Billy. Il a suffi qu’on se regarde pour qu’on sache que c’était un restaurant qu’on ouvrirait à deux. » Poulet sauté à la sauce aigre-douce, bao farci au porc aux cebettes et au gingembre, poitrine de cochon lentement braisée… Ils ont conçu environ le trois quart de leur carte actuelle lors de ce voyage en Chine, chacun d’entre eux ayant retrouvé dans l’autre quelque chose de précieux : des souvenirs de famille.

Les veggie charsiu bao.
Les veggie charsiu bao.

« Est-ce que tu as bien mangé aujourd’hui ? »

Si Céline avait déjà en tête une cuisine chinoise de qualité, inspirée par différentes spécialités régionales de la Chine, c’est qu’elle a grandi avec cette double culture sino-parigote. Ses parents d’origine chinoise tiennent une boutique de maroquinerie dans le quartier du Marais. Petite, son père allait chercher des baos pour le petit-déjeuner : « En Chine, on n’exprime pas son amour par des discours mais en faisant la cuisine. Nourrir ses proches, c’est une très grande marque d’affection. »

Billy la rejoint. D’origine vietnamienne, il raconte comment sa mère se préoccupe de ses petits-enfants en leur demandant sans cesse s’ils ont bien mangé et en leur préparant des repas à longueur de journée. Lorsqu’ils ont ouvert leur premier restaurant Petit Bao à Paris en 2018, ils ont invité leurs familles respectives pour avoir leur avis précieux. Le résultat était honorable mais pas parfait. « C’est bon, mais pas assez » jugent les proches quand vient l’addition. Le verdict familial ne les a pas découragé pour autant : « On a peaufiné les recettes chez moi avec Céline. On cuisinait tous les jours, on ajustait pour atteindre la recette parfaite. »

La cuisine de la Bao Family s’affinant de plus en plus, le succès ne tardera pas longtemps à arriver. En trois mois, la file d’attente s’étend sur le trottoir, les badauds attirés par une communication rondement menée.

L’ouverture de Gros Bao fut retentissante à Paris, cumulant des files d’attente record.
L’ouverture de Gros Bao fut retentissante à Paris, cumulant des files d’attente record.

« No dogs, no cats, no rats, just chinese food »

Les idées reçues sur la cuisine chinoise ont la peau dure : mauvaise hygiène dans les cuisines et plats douteux à base de chien planent dans l’imaginaire. Une campagne d’affichage un peu provoc mais à la hauteur des clichés finira de dissiper les illusions : « Pas de chiens, pas de chats, pas de rats mais juste de la cuisine chinoise. »

À l’époque, l’offre d’une restauration chinoise authentique est cantonnée à certains quartiers parisiens où les communautés se retrouvent. Céline et Billy ont pour objectif de décloisonner le secteur, s’installant près du canal Saint-Martin avec Gros Bao ou près de Bastille avec Bao Express. Au total, quatre restaurant pour la Bao Family qui séduisent les Parisiens par leur lumières pop, une part belle faite à l’architecture des lieux, une carte courte et plutôt abordable (des plats autour de 15 euros). Mais surtout une régularité dans la qualité de la cuisine qui a permis à certaines recettes de devenir des signatures de la maison, notamment les aubergines Hong Shao, tube de la Bao Family qu’on peut commander dans tous les établissements du groupe.

Prochaine étape de 2024, la cité phocéenne : « Il s’agira de dupliquer une de nos adresses parisiennes à Marseille, résume Céline Chung, mais avec des recettes qu’on pourra uniquement retrouver là-bas, comme les supions sautés au sel et au poivre. » Le restaurant s’installera dans le quartier Noailles déjà reconnu pour ses bonnes adresses mais le défi ne désespère ni Céline ni Billy, ni toute la Bao Family qui ne cesse de s’agrandir.

La Bao Family voit aussi la vie en bleu chez Bleu Bao.
La Bao Family voit aussi la vie en bleu chez Bleu Bao.

Site internet de la Bao Family


Petit Bao
116 Rue St Denis, 75002 Paris

Gros Bao
72 Quai de Jemmapes, 75010 Paris

Bleu Bao
8 Rue Saint-Lazare, 75009 Paris

Bao Express
10 Rue Bréguet, 75011 Paris

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