Lifestyle
Entre les griffes de prêt-à-porter de luxe et les enseignes internationales de fast fashion, des jeunes labels gagnent la confiance des consommateurs avec des collections bien sous toutes les coutures. Leurs vêtements sont modernes, durables et pas forcément hors de prix.
Publiée début juillet, la dernière étude de la chaire IFM – Première Vision sur la mode écoresponsable rapporte que 64,2 % des Français interrogés ont déclaré avoir ravaudé au moins un de leurs vêtements en 2022. Cette étude s’attache à souligner les comportements durables et, comme tout sondage, on peut interpréter ses chiffres de différentes façons. De jeunes et nouvelles marques de mode font leur place sur le marché pour bousculer les codes.
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Quelles sont les nouvelles marques de mode qui comptent ?
A-t-on tendance à plus repriser nos habits car il faut consommer moins et que la planète croule déjà sous les déchets textiles ? Ou bien, parce que leur qualité n’est plus la même et qu’il est aujourd’hui fréquent qu’une couture craque ou qu’un bouton file dès le premier jour ? Il n’existe pas de données sur l’évolution qualitative de la mode.
Ni de comparatifs sur le poids actuel des tissus ou le nombre de points au centimètre des coutures, par rapport à une époque où il était davantage question d’habillement que de mode. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de remonter trop le temps pour noter une dégradation, aussi bien liée au développement de la fast fashion que du luxe.
« Dans les années 2000, de grandes marques ont commencé à augmenter leurs prix de vente en boutiques, sans pour autant dépenser plus en matières premières. Aujourd’hui, certaines vendent leurs pantalons trois ou quatre fois plus cher que ceux d’Officine Générale, tout en utilisant des tissus nettement moins onéreux et qualitatifs », observe Pierre Mahéo qui connaît le succès, depuis 2012, avec un dressing de beaux classiques au rapport qualité-prix très étudié.
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Du bel ouvrage avant tout
À l’instar de cet entrepreneur germanopratin, d’autres stylistes parisiens passés par des maisons, petites ou grandes, ont fini par lancer leur propre collection en se focalisant sur le produit. Souvent, ces labels ne portent pas leur nom. Les appellations font plutôt référence à la qualité ou au bel ouvrage.
En 2013, Déborah Sitbon Neuberg a ainsi lancé la jeune marque de mode De Bonne Facture, dressing d’essentiels masculins fabriqués par des artisans français dépositaires de savoir-faire précis. On peut également citer Uniforme, marque de Hugues Fauchard et Rémi Bats inspirée par les vêtements de travail, et Outland, un vestiaire de pièces fonctionnelles et durables, imaginé par Olivier Coimbra et Jean-François Daveu.
« On n’a pas de concept, on ne fait pas de marketing ni de publicité, expliquent les deux associés. Notre credo, ce sont les vêtements qualitatifs. Des personnes l’ont rapidement noté et, depuis, elles reviennent d’une saison sur l’autre. Pour nous, il s’agit de continuer de grandir de façon raisonnée, sans brûler d’étape, de décrocher de nouveaux points de vente tout en conservant les anciens [une cinquantaine à travers le monde, NDLR], de produire dans des quantités que nous sommes capables de vendre. »
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Le parti pris de la qualité fait rarement bon ménage avec des objectifs de croissance à deux chiffres. « L’industrie de la mode repose sur une économie du désir, du renouvellement, de la consommation perpétuelle. Il faut sans cesse se battre pour faire entendre une démarche différente, à contre-courant », déplore Déborah Sitbon Neuberg, après dix ans de De Bonne Facture.
« La forte croissance des grands noms de la mode est aujourd’hui portée par la vente d’accessoires, et non plus de prêt-à-porter. En parallèle, toute leur communication passe par les réseaux sociaux où la qualité n’est vraiment pas un sujet », abonde Hirofumi Kurino, cofondateur et directeur de la création du grand magasin United Arrows, à Tokyo.
Depuis deux saisons, en parallèle de ses fonctions officielles, cet expert de la mode masculine fait la promotion de fabricants méticuleux de son pays, à travers un projet nommé JQ (sigle de Japan Quality) qui met leur expertise à la disposition de nouveaux designers souhaitant créer différemment. Notamment Aldo Maria Camillo, qui développe une collection concise à ses initiales – AMC –, après avoir oeuvré pour de grandes maisons – Valentino, Cerruti, Berluti…
« Le prêt-à-porter masculin s’est emballé, multipliant les collections sur le modèle de la mode féminine, et perdant toute notion de qualité dans cette frénésie, dit cet Italien qui se cale de moins en moins sur le rythme saisonnier du secteur. À l’inverse, je prends le temps de parfaire chacun de mes modèles afin qu’il dure de nombreuses années. »
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