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Eriro fait partie de cette nouvelle catégorie d’hôtels pour lesquels on avale des kilomètres de péripéties sans broncher, 2024 - TGL
Eriro fait partie de cette nouvelle catégorie d’hôtels pour lesquels on avale des kilomètres de péripéties sans broncher, 2024 - TGL
Marine Mimouni

The Good Guide // Hotels

Cet hôtel ultra exclusif est le plus beau du Tyrol

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The Good Guide

« Dans un voyage, ce n’est pas la destination qui compte, mais toujours le chemin parcouru… » Cet extrait de La Fabrique de souvenirs, de Philippe Pollet-Villard, ne peut pas sonner plus faux quand, après une demi-journée de transports, nous nous jetons de tout notre être sur le lit de la suite numéro  7 d’eriro, petit bijou sculpté dans le bois, à 1 500 mètres d’altitude dans le Tyrol autrichien. Heures d’avion, de train et de voiture sont déjà loin derrière nous…

Autant être clair d’emblée : eriro fait partie de cette nouvelle catégorie d’hôtels pour lesquels on avale des kilomètres de péripéties sans broncher. Qu’importe la route pourvu que la destination soit exceptionnelle. Et elle l’est. Inauguré cet été, ce microhôtel a poussé sur les fondations d’une ancienne auberge des années 30 dans le Tyrol autrichien.


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eriro : Ceci n’est pas un hôtel

Dans le Tyrol, on ne délivre plus de permis de construire pour ériger de nouvelles structures. La vente de cette institution de la petite station d’Ehrwalder Alm, au pied de la Zugspitze, sommet le plus haut d’Allemagne, fut donc une aubaine pour Andreas Mader, Dominik Posch et Martin Spielmann, trois enfants du pays devenus associés.

Eriro est un havre chaleureux composé de bois brut et non traité, face au massif du Wetterstein, dans le Tyrol autrichien.
Eriro est un havre chaleureux composé de bois brut et non traité, face au massif du Wetterstein, dans le Tyrol autrichien. Alex Moling

On nous incite à dormir les rideaux ouverts pour que notre rythme circadien s’adapte à celui du soleil, l’accès au wi-fi n’est donné que sur demande expresse, pour favoriser la déconnexion, et un balancier home made remplace la sempiternelle étiquette « ne pas déranger/faire ma chambre ».

Dans le goût des meilleurs 5‑étoiles, un cadeau nous attend en chambre : une paire de chaussettes tricotées en laine de moutons élevés au pied de l’établissement, dont la toison a été travaillée dans une manufacture de Garmisch, à trente minutes de route. Mais à la différence de cette bouteille de Veuve Clicquot que l’on s’empresse de cacher dans sa valise, « these socks were made for walking ».

Inauguré cet été, ce microhôtel a poussé sur les fondations d’une ancienne auberge des années 30.
Inauguré cet été, ce microhôtel a poussé sur les fondations d’une ancienne auberge des années 30. Alex Moling

Et ce cadeau n’est pas innocent : les chaussettes aux pieds, on redécouvre le plaisir de sentir les aspérités des pierres qui pavent le foyer de l’hôtel comme le relief de la laine des moutons (encore eux !), cette fois nouée à la main à la façon de petits champignons de Paris rassemblés dans leur barquette, qui tapissent les murs et les sols des couloirs qui mènent aux chambres. Eriro est un hôtel sensible. Attention aux échardes !

« L’hôtel est composé à 90 % de bois non traité. Il n’était pas question de le vernir ou de le laquer. Amelie, l’épouse de Dominik Posch, en charge de la décoration du lieu, souhaitait lui donner autant de caractère que possible, en n’utilisant que des matériaux bruts », explique Henning Schaub, le manager du lieu. 95 % de ce bois est issu du recyclage, en majeure partie de l’ancienne structure de l’hôtel et de vieilles étables de la région.

Le trajet pour accéder à l’hôtel Eriro est complexe.
Le trajet pour accéder à l’hôtel Eriro est complexe. Alex Moling

Pour le reste, le pin utilisé provient des forêts voisines dont sont propriétaires les trois fondateurs. Le mobilier et les rares pièces d’art qui décorent l’hôtel – « Amelie voulait avant tout mettre les pleins phares sur les paysages extérieurs » – ne font pas exception, comme ces luminaires cachés dans des roches récupérées aux abords de l’hôtel, lumières d’appoint qui tombent en cascade près du lit et qu’on admire aussi, en version XXL, dans l’escalier. « Tout a été pensé par Amelie et réalisé par des artisans de la région », souligne le directeur. Précisons que madame n’est pas architecte d’intérieur. Chapeau bas !

Se déconnecter du reste du monde depuis le Tyrol

L’hôtel a hérité de sa mouture originelle la clé de sa singularité. Il n’est pourvu que de neuf suites : deux sont dotées de petits jardins, une double singeant l’idée du penthouse et toutes faisant face au massif du Wetterstein.

Neuf suites composent l’hôtel Eriro.
Neuf suites composent l’hôtel Eriro. Alex Moling

Une approche aussi intime de l’hospitalité combinée à l’aventure qu’est le chemin pour s’y rendre (précisons ici que, dès que le domaine skiable qui l’entoure ouvre ses portes, on ne peut plus atteindre notre destination qu’en téléphérique, depuis le centre d’Ehrwald) a donné naissance à un concept où le mot luxe trouve sa définition la plus juste.

Tout le monde ne pourra pas s’offrir de séjourner à Eriro – qu’importe le compte en banque (le prix d’appel pour une nuit en pension complète est de 1 500 euros) –, car le temps est la clé qui ouvre ce précieux sésame. Un minimum de trois nuits est requis pour une réservation.

L’hôtel a hérité de sa mouture originelle la clé de sa singularité.
L’hôtel a hérité de sa mouture originelle la clé de sa singularité. Alex Moling

Le trajet pour y accéder est complexe. Les prises électriques sont bannies des têtes de lit pour inciter les smartphones à dormir loin de leurs propriétaires – et ceux-là même à se réveiller quand bon leur semble. Un dîner peut s’étaler sur une ou trois heures selon l’humeur du chef – d’un menu surprise en sept temps à un entrée-plat-dessert efficace.

Il en va de même pour les sorties en montagne, selon le goût de chacun… Car c’est aussi la singularité de ses parties prenantes qui fait d’Eriro un hôtel-destination. Si Henning Schaub, souriant et rassurant avec son allure de bûcheron des villes, donne son ton au séjour en accueillant ses hôtes sur le seuil de l’hôtel, comme s’il vous accueillait chez lui, le chef David Franken assoit assurément le goût de cette expérience, unique.

95 % de ce bois est issu du recyclage, en majeure partie de l’ancienne structure de l’hôtel et de vieilles étables de la région.
95 % de ce bois est issu du recyclage, en majeure partie de l’ancienne structure de l’hôtel et de vieilles étables de la région. Alex Moling

Formé à la rigueur d’un restaurant gastronomique français – « j’en retiens mon sens de l’organisation quasi militaire, mais j’en rejette tout le reste » –, il a trouvé un sens à sa cuisine à travers ses expériences à Londres, Berlin et Copenhague. « Le gaspillage me rend littéralement malade », explique-t-il, ses yeux bleu azur perçants d’honnêteté. Il a sans doute tatoué sa gueule d’ange comme il parachève un plat de betteraves fermentées d’une pincée de (faux) sel : à l’instinct.

Quelque peu avant-gardiste pour un public non averti, David Franken est sans doute un futur grand de la gastronomie germanique. Son sellier se visite, au sous-sol de l’hôtel, pour comprendre sa démarche, radicalement sans déchets (il va jusqu’à broyer les os des carcasses pour en tirer ce fameux ersatz de sel), locale au point d’aller frapper chez les grands-mères du village pour se ravitailler en prunes ou en pommes et d’anticiper l’hiver avec des milliers de conserves de fruits et de légumes fermentés.

Quelque peu avant-gardiste pour un public non averti, David Franken est sans doute un futur grand de la gastronomie germanique.
Quelque peu avant-gardiste pour un public non averti, David Franken est sans doute un futur grand de la gastronomie germanique. Alex Moling

Les déjeuners, plus conventionnels, donnent à voir une autre facette de son talent : une approche ultracontemporaine des mets traditionnels du Tyrol, idéale avant une longue balade en montagne ou quelques heures de ski – l’hôtel est doté d’un skishop qui permet de partir tout équipé directement sur les pistes.

The joy of missing out…

Le spa, point final de cette destination tournée vers le bien-être, offre un panorama sans fard sur la nature. On perd la notion du temps dans cet antre minéral, sombre, doté de deux saunas (l’un, vitré, semble ne pas avoir de frontière avec l’extérieur), de trois bassins (dont l’un est inspiré de l’expérience des onsens japonais) et d’une pièce où se cache le seul écran de l’hôtel, diffusant des images de paysages du Tyrol couplées à une bande son digne de Hans Zimmer dont les fréquences sont censées réguler le système nerveux.

La salle bien-être de l’hôtel Eriro.
La salle bien-être de l’hôtel Eriro. Alex Moling

Des massages, des cours de yoga, de méditation ou encore de poterie sont organisés chaque semaine pour occuper ceux pour qui l’art du JOMO (pour joy of missing out, la « joie de manquer quelque chose », la nouvelle grande tendance voyage de 2025, selon les experts) ne serait encore qu’une chimère… mais plus pour longtemps.


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