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« Prada Marfa », Valentine
« Prada Marfa », une fausse boutique posée en rase campagne, à la sortie de Valentine. Cette installation artistique est signée des artistes scandinaves Elmgree et Dragset et a été inaugurée en 2005.
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Voyage

Marfa : quand l’art occupe… le désert texan

Voyage

Entre Mexique et derricks, au cœur d’un désert balayé par le vent et les trucks, la petite ville de Marfa apparaît comme une curieuse parenthèse arty chez les cow‐boys. Mythique, et presque mystique.

A la rencontre de Judd

Judd. Judd ? Judd ! Pour Donald Clarence Judd, artiste plasticien né en 1928 dans le Missouri et mort à New York en 1994. Ses quatre studios, sa maison, une fondation et un cabinet d’architecture à son nom, la Marfa International Bank qu’il a dessinée, les stickers « I Love Judd » collés sur les pare‐brise : Marfa aurait tout aussi bien pu être baptisée Judd City…

Puis quelques galeries, ouvertes du vendredi au dimanche uniquement. L’exposition The Last Supper d’Andy Warhol, dans Highland Street, à la fondation Ayn. La galerie Ballroom, qui présente sa sixième saison du film international artistique, Marfa Pizza Contemporary. Au‐delà des galeries, ce ne sont que des venelles de terre et de poussière, un enchevêtrement de câbles tirés sur des poteaux de bois, une voie ferrée. Au bout de la ville, qui se traverse en moins d’un quart d’heure, j’aperçois quelques tipis, une yourte, de nombreux trailers, caravanes oblongues et métalliques, El Cosmico Camp, un campement surréaliste, branché, posé dans le désert de Chihuahua, qui fait face à un ciel si limpide qu’il en devient étrange, presque flippant. Ici, chaque année, se tient le Trans‐Pecos Festival.

Le soleil a chu. La température aussi. Drastiquement. Quelques lourds camions passent et repassent, charrient chevaux et maisons surdimensionnées, préfabriquées. Je croise la station de patrouille des frontières, une quinzaine de 4×4, quelques gyrophares, deux cowboys, une infirmière. Le ciel est pourpre.

Je me réfugie au Paisano. Il est 18 heures. Le restaurant‐bar est ouvert et, décalage horaire aidant, je m’y rends, HS. Je croyais la ville fantôme, le lieu est bourré à craquer. Des artistes, peintres, écrivains, des touristes branchés, quelques cow‐boys sur leur trente‐et‐un. Je crois reconnaître un père de famille accompagné de trois enfants et d’une jolie femme que je jurerais brésilienne.

« C’est Matthew McConaughey, susurre la serveuse. Il passe régulièrement par ici. A Marfa, beaucoup de célébrités viennent nous voir, vous savez. C’est l’effet Judd. Mick Jagger y a ses habitudes, Johnny Depp aussi. Les frères Coen ont tourné No Country for Old Men. Ils ont employé une bonne partie de la population locale. Daniel Day-Lewis a joué There Will Be Blood dans le désert. Ici, on les laisse tranquilles. Sauf Beyoncé, à qui tous les mômes de l’école sont venus réclamer un selfie parce qu’elle avait twitté “I am in Marfa”. »

Les tacos sont goûteux, et le gin est tonique. Pas assez, cependant, pour résister à la somnolence. Foutu jet‐lag ! 4 heures du matin. La nuit est un trou noir. La Voie superlactée. Le sifflement des trains, qui traversent la ville avant même le lever du jour, m’extrait du sommeil. Sept convois de wagons se succèdent, sifflent à tout‐va. S’ensuivent des aboiements de chiens. Des coyotes ? Je me replie sur mes notes, prises à la ville, l’avant‐veille.

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