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Vins et spiritueux
Abrégé en « BSA » par les professionnels, ce vin non millésimé est le champagne le plus vendu à travers le monde, ainsi que le plus complexe à réaliser pour le chef de cave. Son élaboration nécessite à la fois de la patience et une maîtrise de l’art de l’assemblage poussé à son plus haut niveau.
La définition donnée par le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) sur la notion de « brut sans année » est la suivante : « Le brut sans année (BSA), aussi appelé brut non millésimé, est le champagne le plus courant. C’est une cuvée qui peut assembler plusieurs années grâce à la constitution des vins de réserve [des vins de différentes années stockés dans des cuves en Inox, NDLR]. C’est généralement un vin dont le style est perpétué d’année en année par la marque, un vin signature. »
Traduction ? C’est le véritable porte drapeau gustatif d’une maison. En effet, si les cuvées de prestige sont souvent mises à l’honneur par les marques, ainsi que les millésimés, « n’oublions pas que le brut sans année représente environ 90 % des ventes de toute la Champagne », rappelle Nicolas Dubois, propriétaire de la maison de champagne Jeeper.
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Cuvée test
La cuvée brut est aussi un bon révélateur du savoir-faire d’une marque, un indice imparable comme l’est le CAC 40 à la Bourse. Si un brut sans année est bon, alors il est fort probable que les autres champagnes de la gamme le soient. L’inverse est également vrai, malheureusement !
« Notre véritable challenge repose sur la création de cette cuvée. Il est relativement facile pour un chef de cave d’élaborer une cuvée de prestige ou un millésime. Le travail est presque entièrement fait à la vendange. Pour notre brut réserve, je dois non seulement faire avec la dernière vendange, mais aussi avec les nombreux vins de réserve qui vont me permettre de m’approcher le plus possible du goût souhaité par nos amateurs, indépendamment de l’année », décrit Alexandre Cattier, chef de cave du champagne Cattier.
Pour l’élaborer, le vigneron possède plusieurs variables à sa disposition, car cette cuvée est avant tout un vin d’assemblage : il associe différentes années, plusieurs cépages et, enfin, différents terroirs.
Il a la possibilité d’aller chercher, en fonction de son vignoble et de ses accords avec d’autres producteurs de raisin, des grappes de chardonnay, pinot noir et pinot meunier sur toute l’appellation champagne, soit 34 000 hectares au total.
Cette palette très large s’avère fort utile quand il faut reproduire une cuvée dite maison. Ce travail s’apparente à celui d’un chef d’orchestre avec, face à lui, une multitude de musiciens.
La révolution Roederer
L’un des exemples les plus significatifs de cette philosophie se trouve au sein de la maison Krug, établie à Reims depuis 1843. Olivier Krug, sixième génération de la famille, directeur, mais également ambassadeur infatigable du champagne Krug à travers le monde, répète à l’envi cette sagesse édictée par son aïeul Joseph Krug, le fondateur : « La Grande Cuvée est notre cuvée numéro un. Sa composition devrait être recréée chaque année. Si les vins sont corsés, il faut alors utiliser des vins plus légers des années précédentes. Et vice versa si les vins sont trop légers. »
Pour le dernier opus de la Grande Cuvée actuellement proposée aux amateurs, la 171e édition, Julie Cavil, la cheffe de cave, a assemblé 131 vins de 12 années différentes. « Nous avons utilisé 42 % de vins de réserve pour cette cuvée afin de lui donner amplitude et rondeur, les marqueurs essentiels de Krug Grande Cuvée », précise-t-elle.
La maison Louis Roederer, quant à elle, a entamé une autre démarche. Son Brut Premier, le BSA de la marque, a changé de nom. Il s’appelle désormais « Collection ». Sur la nouvelle étiquette lui est accolé un numéro qui indique le nombre de fois que ce brut a été réalisé depuis sa création.
Qu’est-ce que le « brut sans année » ?
Pour cette année, ce sera donc « Collection 244 ». Il s’agit bien d’une petite révolution, comme le souligne Jean-Baptiste Lecaillon, le chef de cave de cette institution : « C’est une orientation nouvelle. Il s’agit de nous réapproprier la singularité de la Champagne. Nous racontons désormais cette diversité avec plus de conviction, en mettant en avant les particularités organoleptiques de chaque vendange. »
Exit alors la fameuse notion de goût unique qui pousse les maisons de champagne à tenter de reproduire annuellement le goût maison. Il s’agit d’offrir désormais une interprétation originale à chaque édition. Ce nouveau paradigme n’est certes pas encore majoritaire, mais une autre vision de la Champagne se dessine peu à peu.
Le changement climatique bouge les curseurs. Il nécessite une adaptation de la part des différents acteurs. Devant cette évolution, les principes d’hier se trouvent bousculés et ne seront peut être plus ceux de demain.
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