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10 ans d’Alexandre Mazzia à Marseille — et la flamme brûle toujours

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Alexandre Mazzia a été choisi, aux côtés d'Akrame Benallal et d'Amandine Chaignot, pour imaginer le « plus grand restaurant du monde », la cantine où se restaureront les 15 000 athlètes des prochains JO de Paris 2024. Un défi de plus pour l'ancien basketteur professionnel qui fête cette année les 10 ans de son restaurant marseillais, AM.

Il réalisera un poisson brûlé au satay pour les athlètes des prochains Jeux Olympiques. Invité à concevoir les menus des athlètes du village olympique pour Paris 2024, il a porté la flamme le 9 mai dernier après son arrivée à Marseille. Un peu plus d’un mois plus tard, le 17 juin, il soufflera la dixième bougie de son restaurant, AM, installé à quelques kilomètres du Vieux Port. Malgré les étoiles et les apparitions cathodiques, le feu dans les yeux du chef Alexandra Mazzia est le même qu’à ses débuts. « On n’a pas changé », assure-t-il, assis à l’une des tables les plus proches de la baie vitrée de son restaurant marseillais AM, après le service. Il est 16h15 — « on a fini tôt, pour une fois ! »


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Esprit d’équipe et rap en bande son

Il faut de la patience pour espérer pouvoir se frotter à ce grand gaillard d’1m95 et à sa cuisine — pour prendre une réservation, d’abord, mais aussi pour apprécier son menu. Ses « voyages », ainsi qu’il les nomme, font de multiples escales. Chacune d’entre elles sont composées de quatre à huit bouchées en moyenne. Faites le calcul… « Tout vient à point à qui sait attendre », dit l’adage. Il ne pourrait pas avoir plus raison.

Le chef Alexandre Mazzia dresse ses assiettes sur le comptoir de la cuisine, face à ses clients.
Le chef Alexandre Mazzia dresse ses assiettes sur le comptoir de la cuisine, face à ses clients. David Girard

Un repas chez Alexandre Mazzia n’en est pas un. Prendre place à sa table (mieux, à son comptoir), est une expérience. On ne « mange » pas chez AM, on vit quelque chose d’unique. Il est vrai que déguster une farandole de plus de 35 bouchées est un exercice hautement périlleux, de ceux qui mobilisent les cellules grises — se rappeler de chaque met dégusté est une épreuve — autant que le palais et le système digestif — ne pas manger la veille et prévoir un jeûne le soir. L’adresse jouit d’un décor sobre, la brigade s’active dans cuisine ouverte : la performance est à nu.

S’attabler chez AM est une expérience qui se renouvelle peu dans une vie, une fête qui doit se vivre comme telle avec le cœur, sans trop l’intellectualiser. C’est ainsi que le chef fait évoluer ses menus. Les tubes de Kendrick Lamar sont diffusés à fond dans les toilettes, nos hôtes ne retiennent par leurs blagues pour alléger le cérémonial… AM est médaille d’or de sa catégorie, celle des restaurants gastronomiques qui ne se prennent pas au sérieux, et ce depuis 10 ans.

A côté du comptoir où quatre convives peuvent s’attabler à chaque service, des souvenirs d’enfance décorent quelques étagères.
A côté du comptoir où quatre convives peuvent s’attabler à chaque service, des souvenirs d’enfance décorent quelques étagères. David Girard

Les vraies couleurs d’Alexandre Mazzia

« On me propose souvent d’ouvrir un nouveau restaurant ici ou là, dans un hôtel ou dans un lieu à moi, en France, en Asie ou ailleurs. Je n’ai encore jamais été séduit par aucun — tous manque de véracité », explique le chef, interrogé sur l’effet enfant unique d’AM.

Né un 30 avril, le chef appartient à la secte des taureaux selon le calendrier astral, un signe connu autant pour sa persévérance que son incapacité à déroger de ses valeurs. « J’ai besoin de trouver un sens profond dans les projets auquel je prends part, poursuit-il, au delà de leur aspect pécuniaire. »

Chaque bouchée qui compose le menu est une œuvre totale.
Chaque bouchée qui compose le menu est une œuvre totale. David Girard

Quand vient donc sur la table le sujet des Jeux Olympiques, la flamme s’allume dans ses yeux. « Lorsque j’ai eu les organisateurs pour la première fois au téléphone, j’ai cru que mes amis me faisaient un canular », s’amuse-t-il, et d’expliquer que ses proches singent sa célébrité en lui tendant parfois des pièges téléphoniques lui proposant des projets loufoques.

C’était il y a plus de deux ans, il s’en souvient comme si c’était hier.

Certaines sont servies sur un podium.
Certaines sont servies sur un podium. AM

Mission : JO de Paris 2024

Pour rentrer dans la profondeur des choses, Alexandre Mazzia s’est entouré de tous les professionnels nécessaires pour cerner le périmètre de sa mission : « Nourrir un athlète et différent de la composition d’un menu gastronomique. » D’autant plus en contexte olympique. « Les sportifs professionnels ne mangent pas des pâtes avant leur compétition comme vous et moi, sourit-il. Chaque discipline n’a pas les mêmes besoins énergétiques et les athlètes auront besoin de manger rapidement car le village olympique est gigantesque. »

Le chef s’est donc entouré de préparateurs physiques, de médecins du sport et de nutritionnistes pour élaborer ses recettes, plus de 1 000 au total — seulement huit seront servies lors des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Toutes retournent de son amour pour le végétal et la céréale « sans laisser de côté la gourmandise », à partir de produits sourcés dans un rayon de 250 kilomètres autour de Paris. Sollicités afin d’accroître leur production et ainsi soutenir les 10 000 repas quotidiens du village, les producteurs et agriculteurs partenaires seront accompagnés après les Jeux afin de trouver de nouveaux canaux de distribution et, ainsi, de ne pas connaitre de baisse de revenus abrupte.

Jean-Philippe Rock, directeur de salle, est une pièce maitresse de l’équipe Mazzia.
Jean-Philippe Rock, directeur de salle, est une pièce maitresse de l’équipe Mazzia. David Girard

Et après ?

Quel impact les Jeux auront-ils sur AM ? « Aucun. Je serai à Paris sur les jours de fermeture du restaurant », assure le chef a depuis longtemps choisi de n’opérer que du mercredi au samedi, laissant ainsi à ses équipes des temps de repos rares dans le métier. La brigade est également invitée à participer à l’aventure du village olympique selon un système de roulement qui permettra à chacun profite de l’expérience. « La cuisine est un sport collectif. Je veux que chaque membre de l’équipe joue sur le terrain. »

Si les Marseille-Paris seront aussi l’occasion pour une brigade rompue aux codes du restaurant gastronomique de s’ouvrir à un nouveau mode de fonctionnement, le menu de AM s’enrichira aussi de nouveaux accords. « J’ai déjà à la carte certaine des recettes auxquelles j’avais pensé pour les athlètes », explique le chef, mentionnant un poisson brûlé au satay servi avec un jus de canard au poivre de verveine avec un tapioca en sauce Worcestershire. Un plat très « mazzien », qui respecte la trilogie caractéristique de la cuisine du chef sauce-torréfaction-épice.

Depuis 10 ans, en dehors de quelques remodelages de salle et coups de peinture, AM est resté le même. Le chef comme le restaurant n’ont rien fait de leur trois étoiles au guide Michelin, si ce n’est fièrement les afficher sur la devanture du 9 rue François Rocca. « Je suis ce que je suis, je ne pourrais jamais faire ce que font les autres. »

Le restaurant AM.
Le restaurant AM.

AM par Alexandre Mazzia
9 Rue François Rocca, 13008 Marseille
Site internet


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