Nature, beaux hôtels et bonnes tables : 36 heures pour visiter Genève

Par Sylvie Berkowicz, le 24 juin 2022

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Voyage

Tout le monde connaît Genève, mais peu de gens s’y rendent pour visiter. Tout le monde est au fait de sa légendaire horlogerie, de ses banquiers, de son lac et de son jet d’eau, mais peu savent qu’elle est une ville moins lisse qu’il n’y paraît, avec ses quartiers vivants et variés.

Le plaisir de visiter Genève tient justement au fait qu’elle n’est pas touristique et qu’on y côtoie aisément, dans la plupart des lieux, des locaux. Une population cosmopolite qui y vient pour affaires, qui y vit ou y travaille (dont de très nombreux Français frontaliers). Une configuration particulière, mix d’industries traditionnelles et innovantes, d’organisations internationales et de forces locales, tout cela au cœur des montagnes et de l’Europe.

Prendre le tramway pour Carouge. À dix minutes du centre, Carouge nous transporte en Italie. Un héritage du royaume de Sardaigne à qui Genève céda ce territoire en 1754 et qui rejoint, en 1814, la Confédération suisse. À Carouge, rendez-vous avec des restaurants, bar à vins, commerces de bouche de qualité, à commencer par Yeast qui cache de jolies surprises. Des vins vivants (yeast signifie « levure » en anglais) sélectionnés avec soin par Bérengère et Bertrand Lutaud, qui ont fait leurs classes au gastronomique Restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier. Ça commence en douceur avec des petits plats à partager, comme les anchois fumés de chez Bardin (vendus dans l’épicerie attenante), ça monte en puissance avec un brocoli détonnant et ça culmine avec un vol-au-vent au homard, le tout signé par le chef Freddy Garanjoud. Enfin, on ne repart pas de Carouge sans avoir fait le plein de chocolats chez Mr et Mrs Renou et le plein de fromages chez DE BLEU !

Dormir à l’hôtel Woodward. Le dernier-né des 5-étoiles qui bordent la rive droite du lac Léman. Le plus intime, le plus luxueux aussi. Une entrée discrète, 26 suites, un spa Guerlain et une déco signée par l’incontournable Pierre-Yves Rochon, qui repousse ici les limites du genre avec la collaboration d’artisans d’exception. Ébène de Macassar, marqueterie de paille, papier peint artisanal, salles de bains immenses ouvertes sur le lac, appliques Lalique… Et pour tous ou presque, la possibilité d’expérimenter L’Atelier de Joël Robuchon, histoire de voir ou revoir ses classiques : la langoustine en raviole, royale de foie gras, l’iconique purée de pommes de terre ou d’opter pour les créations du chef exécutif Olivier Jean, et de constater que le concept tient encore très bien la route.

Se baigner dans le Lac Léman. On se baigne à Genève, toute l’année ou presque… Rive droite, aux Bains des Pâquis, où se retrouvent les habitués de cet établissement historique qui, eux, préfèrent la baignade hivernale. Ou rive gauche, dans une version plus estivale, sur la plage des Eaux-Vives, qui a été totalement réaménagée et rouverte au public en 2020. Avec une plage, une vraie (une partie galet, une partie sable), un centre nautique, une jetée et Le Restaurant de la plage, très couru, qui mérite à lui seul de visiter Genève.

S’offrir un cocktail. À première vue, un look de café étudiant. Vieux meubles, lampes et fauteuils vintage, clientèle jeune. Au second regard, l’assurance d’y trouver de sérieux cocktails. Une collection impressionnante de bouteilles derrière le grand bar, une carte bien ficelée, un accueil d’une gentillesse confondante et, dans les verres, des préparations très bien mixées, grands classiques parfaitement exécutés ou variations inspirées. L’endroit n’est pas nouveau, mais demeure une valeur sûre en matière de mixologie. Le Verre à Monique. Rue des Savoises 19. verreamonique.ch

Créer sa propre montre. Une montre qui ne ressemble à aucune autre, dont on aurait choisi chaque élément et que, de surcroît, on aurait assemblée soi-même ; on peut difficilement trouver mieux, à Genève, pour qui s’intéresse à l’horlogerie et cherche une expérience unique. Initium propose aux apprentis horlogers (c’est-à-dire à quasiment tout le monde) de repartir avec sa montre sur mesure, à l’issue d’un atelier d’une demi‑journée. Et si tu ne vas pas visiter Genève, Genève vient à toi, car Initium a eu l’idée, durant le confinement, de lancer un kit de montre à monter chez soi. Élégamment présenté dans une pochette de cuir, avec tous les éléments et outils nécessaires au montage de la montre, et à exécuter sous la supervision d’un tuto à suivre en ligne.

(Re)découvrir une institution. Direction le quartier de la gare des Eaux-Vives. L’occasion de visiter un coin en pleine mutation mais aussi la version 2021 de La Comédie, fondée en 1913. Construit dans le prolongement de la station du Réseau express régional, créé par Jean Nouvel, ce géant de verre et d’acier abrite artistes et artisans dans de vastes espaces. Une dynamique qui permet à La Comédie d’enrichir son contenu, de s’adapter à une création plus diverse. « Beaucoup de gens nous disent qu’ils n’ont pas l’impression d’être à Genève ici, s’étonne Natacha Koutchoumov, codirectrice de La Comédie. Je ne sais pas ce que cela dit de leur idée de Genève, mais ce lieu de vie permet de rêver. Contrairement à ce qu’on pense, les Genevois sont très ouverts au changement. » La Comédie. Esplanade Alice-Bailly 1. comedie.ch

Déguster local. On connaissait leur existence, pas leur vitalité et leur qualité. Un détail, cependant, met la puce à l’oreille : le nombre de cavistes et bars à vins qui mettent en avant des bouteilles locales et nature. « Quand on est vaudois, on boit vaudois ; quand on est genevois, on boit genevois », explique Vincent de Ferluc, cofondateur de la cave Nino qui, au sein d’une sélection courte, propose des productions rares, suisses, mais pas que. Quelques noms : Domaine Piccard, Domaine du Chambet, Château Rochefort… Nino. Boulevard Saint-Georges 65. ninocave.com

Dîner avec naturel. Natürlich, comme « évidemment ». Comme « naturellement » aussi. Un petit pied de nez également à la rivalité entre Suisse allemande et Suisse romane. Natürlich, un joli resto du quartier Plainpalais, mené en cuisine par le jeune chef Jonas Bolle (photo), qui signe ici une cuisine vivante accompagnée de vins qui le sont tout autant. Natürlich s’est construit autour d’une charte qui, tout en privilégiant le local, n’exclut pas des produits bien élevés et bien sourcés, tels des couteaux ou de la sériole, un poisson méconnu. Un privilège qu’autorise un point central comme Genève, si près de la France et de l’Italie, si près des montagnes aussi où se trouvent des élevages de saumons, de truites et même de crevettes, respectueux et responsables. Bref, on ne trouve que des qualités à cet établissement qui s’est adjoint, en 2020, une petite épicerie voisine, sœur cadette de l’institution marseillaise, qu’est l’épicerie L’Idéal de Julia Sammut.

Se balader entre Plainpalais et Jonction. Plainpalais est un quartier situé à l’ouest du centre-ville, séparé de ce dernier par la Plaine, vaste esplanade en forme de losange. Il se termine par La Jonction, la pointe située entre le Rhône et l’Arve, là où se rencontrent deux eaux aux couleurs bien distinctes : l’une verte et claire, venue du lac Léman, l’autre grisâtre, chargée de l’argile des barrages alpins. Une curiosité. Entre les deux, un quartier animé, vivant (haut lieu du milieu underground dans les années 90), avec un vaste patrimoine de bâtiments industriels, aujourd’hui investi par le monde de la culture. Dans Coulouvrenière, la partie qui longe le Rhône, l’emblème, c’est L’Usine, centre culturel autogéré, fondé en 1989. Rue des Bains trône le musée d’Art moderne et contemporain (MAMCO) ouvert en 1994, qui a entraîné l’ouverture de galeries d’art, de bistrots, de bars et de commerces branchés.

Découvrir Plan-les-Ouates, l’institution horlogère. Plan-les-Ouates, le « back-office » des grandes maisons d’horlogerie. Une commune à deux pas de Genève et une zone industrielle où, depuis vingt ans, sont réunies la plupart des grandes maisons de l’horlogerie suisse. Rolex, Patek Philippe, Vacheron Constantin, Piaget ou Frederique Constant y ont installé leurs manufactures. À tel point qu’on la surnomme « Plan‑les‑Watches ». 4 500 personnes travaillent dans cette industrie (environ 2 000 chez Rolex, 1 700 chez Patek Philippe) dont plus de la moitié sont frontaliers.

Savourer des petits pains. Ce bakeshop, comme il se nomme, a tout bon. Situé à deux pas de la gare Cornavin, il propose du pain au levain de haute volée, mais aussi des viennoiseries, des pancakes, du grilled cheese à tomber. Et une déco, avec sa table centrale majestueuse en marbre, particulièrement réussie, signée Le Bureau. Idéal aussi pour le lunch sur la grande terrasse.

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