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Rafael Costa e Silva
Rafael Costa e Silva.
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Voyage

Rencontre avec Rafael Costa e Silva, cuisinier engagé

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En deux ans à peine, Lasai est devenu le restaurant dont tout Rio parle. Il est entré à la 16e position dans le classement 2015 des Latin America’s 50 Best Restaurants, et a gagné sa première étoile au guide Michelin Brésil neuf mois seulement après son ouverture. Le nom de son chef circule d’ailleurs dans la sphère mondiale des amateurs éclairés. Cela méritait bien une rencontre.

Le restaurant, il y pensait déjà tout jeune. Mais s’imaginait plutôt du côté du management. Ce sera donc une école de commerce. C’est en voulant enrichir sa connaissance du métier de restaurateur que Rafael Costa e Silva intègre une école de cuisine. Un coup de foudre suivi d’une insatiable envie d’apprendre. Changement de cap. Direction New York, où il passe deux ans chez Jean-Georges Vongerichten, puis l’Espagne, au légendaire restaurant Mugaritz. Il y entre en stage pour quelques mois et y restera cinq ans, rapidement rejoint par sa femme, qui y trouve une place en salle. Le chef Andoni Luis Aduriz, auprès duquel il a travaillé, reste sa plus grande influence. « J’adorerais cuisiner comme là-bas, mais il y avait 35 personnes dans une cuisine de la taille de tout mon restaurant. Et même si je pense que ce style de restaurant pourrait exister ici, nous ne disposons pas de l’immense variété de produits dont eux disposent. Leur océan est parfait pour la qualité des poissons, il est froid ; le nôtre est chaud. La culture culinaire y est ancienne ; ici, elle débute à peine. Je suis brésilien et carioca, mais ici tout est difficile à accomplir correctement, avec des produits de qualité et le bon service. C’est une bataille permanente. C’est la raison pour laquelle j’ai mes propres potagers. Nous en avons deux grands à deux heures de Rio, d’où proviennent la plupart de nos légumes, et un plus petit en ville, où nous cultivons les fleurs et les herbes. Côté fruits de mer et poissons, ça commence à s’améliorer, mais pour la viande, c’est encore difficile, et c’est pour ça que nous en utilisons assez peu. » Le retour au Brésil était, selon ses mots, une question de survie pour son couple. Sa femme, américaine, voulait quitter l’Espagne et retourner aux États-Unis. Il fallait donc choisir entre les États-Unis et le Brésil. Il a trouvé à Rio les partenaires lui permettant d’ouvrir son restaurant dans une ancienne pharmacie de Botafogo. Banco !

Le restaurant du chef Rafael Costa e Silva offre aux clients un premier espace sous une belle charpente, avec mur de pierres et mobilier en bois.
Le restaurant du chef Rafael Costa e Silva offre aux clients un premier espace sous une belle charpente, avec mur de pierres et mobilier en bois. Stevens Frémont
Un second espace, plus petit, se trouve sous une verrière avec un mur végétal et conduit vers la cuisine.
Un second espace, plus petit, se trouve sous une verrière avec un mur végétal et conduit vers la cuisine. Stevens Frémont

Un lieu décontracté et ouvert à tous
L’endroit, très beau, caché derrière une façade qui ressemble à celle d’une maison privée compte un premier espace, sous une belle charpente, avec mur de pierres et mobilier en bois, et une salle plus petite, sous une verrière avec un mur végétal qui conduit vers la cuisine, où une poignée de clients peut s’asseoir à un comptoir. C’est avec calme que la petite brigade s’affaire dans une cuisine ouverte et étroite. « “Quel genre de cuisine faites-vous ?” Tout le monde me pose la question, mais je ne veux pas définir ma cuisine. Tous les jours, nous cuisinons quelque chose de différent. Nous n’avons pas de menu, ou plutôt nous proposons un menu fixe qui change tous les jours. Nous faisons ce que nous voulons en fonction du temps, des produits et de ce que la cuisine nous permet de faire, car elle est très petite. Non, ça n’est pas brésilien. C’est simplement frais. » Il est vrai que les assiettes sont simples, claires, avec peu d’ingrédients : un accord courgette et mérou autour du cru ; une désormais classique interprétation de l’œuf au bacon – toujours au menu – constituée d’un jaune posé sur une crème d’igname et saupoudré de viande séchée ; un risotto aux encornets et à l’aïoli d’herbes fraîches. Le caractère brésilien s’y exprime subtilement, sauf peut-être au moment des desserts, avec un accord kaki coco et un surpuissant sorbet passion. Pas de chichis, aucun maniérisme, même si l’on sent l’expérience acquise dans un grand restaurant gastronomique. Rafael Costa e Silva déclare vouloir faire de son restaurant un lieu décontracté et ouvert à tous. C’était l’intention. Mais il connaît un tel succès qu’il est quasiment impossible d’y décrocher une table. « Depuis que nous avons ouvert, en mars 2014, le restaurant a été complet tous les soirs, sauf neuf jours. Quand, au milieu d’une crise majeure telle que nous la ­vivons en ce moment, votre restaurant reste plein soir après soir, avec une liste d’attente, que demander de mieux ? En revanche, tout est compliqué au Brésil et l’a toujours été, l’électricité, l’eau, nous sommes surtaxés… on attend toujours la dernière minute pour finir ce qu’on a à faire. C’est difficile d’expliquer à un Européen ce qu’est Rio. Pour moi, revenir ici, c’est aussi améliorer ma ville, prendre soin de mes employés. Montrer aux clients et aux autres qu’on peut faire quelque chose de bien. »

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