Voyage
S’il fallait une preuve de plus que King’s Cross est le nouveau quartier hype de Londres, voici la plus édifiante : The Standard Hotels y ont ouvert, il y a quelques mois, le premier établissement de leur enseigne surbranchée hors des Etats-Unis.
Un hôtel est-il un accessoire de mode ? Un vêtement de créateur qu’on enfile pour avoir du style ? Que l’on choisirait justement pour ce qu’il dit de nous quand on le porte. Pas forcément, mais le Standard est de ceux-là. Le choisir n’est pas opter pour le somptueux cachemire d’un classique palace, ni se laisser tenter pas la coupe épurée et stricte d’un hôtel d’architecte. Le choisir, c’est assumer qu’on fait partie d’un shooting mode – quand bien même on ne ressemble que de très loin à un top-modèle –, qu’on peut se retrouver sur l’Instagram de Kendall Jenner (vue à l’hôtel en combinaison vert fluo) et qu’on ignore superbement que l’hôtesse du bar est mieux habillée que nous.
Plus que des hôtels à la mode, les Standard sont les hôtels de la mode. Ils accueillent les after des fashion-weeks et des Awards, avec le bon mix de it-girls, de musiciens et de personnages lookés. Celui de Londres ne fait pas exception, déjà vu dans de nombreux articles de presse, sur les réseaux des meilleurs influenceurs, mais aussi, et à juste titre, dans les magazines de décoration.
L’écrin qui héberge ces vrais – ou faux – people est assez réussi pour faire oublier tout le reste et donner envie de rester dans sa chambre. Sauf… sauf si, par économie, on a opté pour l’une de celles qui n’ont pas de fenêtres, car oui, résider ici demande certains sacrifices. Pour les plus « démunis », l’hôtel a prévu 16 chambres certes aveugles, mais assez bien aménagées pour le faire oublier.
Ambiance seventies au Standard Londres
La version londonienne du Standard s’inscrit dans la veine de ses prédécesseurs américains : un penchant pour le style rétromoderne, en particulier celui des années 60 et 70. A commencer par le bâtiment, exemple d’architecture brutaliste, que certains Londoniens auraient préféré voir disparaître, mais qui, avec ses courbes futuristes en béton, attire aujourd’hui l’attention. Construit dans les années 70 comme annexe du Camden Town Hall, il a d’abord été détaché de l’édifice principal, puis coiffé de trois étages supplémentaires. A l’intérieur, l’agence Shawn Hausman Design, en collaboration avec les designers maison, a imaginé un décor digne d’un film.
Quelque chose entre un James Bond vintage, Austin Powers et Fahrenheit 451… La référence au cinéma n’est pas innocente. Shawn Hausman a commencé sa carrière sur les plateaux d’Hollywood, a ouvert le night-club culte new-yorkais Area, avant de collaborer avec The Standard Hotels depuis la création de l’enseigne. Il a apporté à Londres un peu du glamour californien, comme les baignoires saugrenues sur les terrasses des suites, des couleurs pop appliquées en aplats graphiques, des fresques murales en céramique…
Au rez-de-chaussée, l’agence de design a réinterprété la bibliothèque, y posant du mobilier Memphis, de larges fauteuils en cuir, des livres empilés sur des chariots dans l’attente – improbable – d’être rangés sur les étagères. Dans un coin, le Sounds Studio n’est pas qu’un décor, des podcasts y sont enregistrés, des DJ y font tourner leurs platines.
La Library accueille une programmation musicale live, des débats et des lectures. Dans les chambres, plusieurs approches déclinent ce même esprit rétromoderne, parfois calme (bois, cuir fauve et touches de noir), parfois fun et coloré (moquette bleue, armoire rouge et carrelage noir et rose). Avec, pour toutes, une multitude de détails pratiques qui prouvent que l’hôtelier connaît très bien son métier.
Tout est pensé. Hyperpensé.
Comme les uniformes du personnel – qui n’en sont pas vraiment, car ils sont tous différents –, conçus par le créateur de mode britannique Craig Green. Et que dire de cet étonnant ascenseur capsule, rouge comme un bus londonien, qui grimpe sur la façade et mène directement au 10e étage ? Car c’est là, tout en haut, que se situe l’épicentre de l’hôtel, son point magnétique : le bar- restaurant Decimo. Avec une vue à quasi 360° sur la ville et un décor seventies exotique – rideaux en macramé, rotin au plafond, plantes grasses à profusion –, il est le théâtre où se met en scène le lifestyle du Standard.
Encore faut-il pouvoir y accéder, grâce à une réservation en bonne et due forme et/ou un look servant de laissez-passer. Et surtout ne pas se laisser impressionner par la créature en manteau de peluche et minijupe qui vous regarde de haut (dans tous les sens du terme) : « Do you have a reservation? » Acquiescer sans sourciller, exiger une meilleure place au bar et déguster un cocktail au mezcal (la spécialité de la maison), peut-être même commander une tortilla au caviar et se régaler du spectacle.
The Standard
Camden, King’s Cross
10 Argyle Street.
Tél. +44 (0)20 3981 8888.
www.standardhotels.com
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