The Good Life : D’où vous vient cet attrait pour l’espace ?
Vincent Fournier : J’ai le souvenir d’une nuit étoilée avec le sentiment très fort de faire partie d’un ensemble. Je crois qu’on appelle cela le sentiment d’océanéité. Dans mon livre Space Utopia, je fais le lien entre cette impression diffuse de faire partie du ciel et l’étymologie du mot « désir », qui vient du latin « desiderare » et qui signifie le manque ou la nostalgie de l’étoile. Le fait de contempler le ciel ferait donc resurgir ce souvenir d’un moment immémorial où nous étions poussières d’étoiles.
TGL : Au travers de cette série, qu’avez-vous souhaité montrer de la conquête spatiale ?
V. F. : Mon objectif n’est pas de montrer ou de démontrer quelque chose en particulier. J’exprime plutôt un sentiment diffus lié à l’enfance, aux fictions qui ont nourri mon imaginaire et à l’esthétique futuriste liée à ce rêve universel d’aller dans l’espace. J’ai grandi dans les années 1970-1980, à une époque où l’idée du futur et des utopies était encore très présente, et tous mes travaux explorent avec une certaine nostalgie ces différentes mythologies.
TGL : Une colonie dans l’espace : une utopie ou bien une réalité inéluctable ?
V. F. : L’imaginaire nourrit mon travail et je me garderai bien d’exprimer un point de vue de spécialiste sur la question ! Mon regard est guidé par la curiosité, l’esthétisme et le frisson philosophique des mystères de l’univers. Néanmoins, je suis un partisan des utopies qui ouvrent, selon moi, des perspectives sur le champ des possibles.
TGL : Avoir eu accès à ces lieux confidentiels vous a-t-il permis de changer de regard quant au secteur de l’aérospatiale, si secret et méconnu de tous ?
V. F. : Oui, car ces lieux sont différents de ce qu’on voit dans les films, mais on y trouve autant de rêves et de rêveurs. De plus, le secteur de l’aérospatiale était à l’origine lié au domaine militaire. Or, depuis le début de ce projet, en 2007, les enjeux ont changé avec le développement de pays comme la Chine ou l’Inde et les entreprises privées qui ont rejoint la course aux étoiles.
TGL : Cette aventure spatiale se poursuit-elle avec de nouveaux projets ?
V. F. : Le livre Space Utopia, édité par les éditions Rizzoli et Noeve Paris, est sorti en septembre 2018. Les photographies du projet Space Utopia seront également montrées à la fondation Bullukian (26, place Bellecour, Lyon 2e), du 14 mars au 18 mai, et au Bon Marché Rive Gauche (24, rue de Sèvres, Paris 7e), en mai-juin.