Voyage
Elle était empêtrée dans une identité hybride, garrottée entre mer et montagne, coincée entre Nice et Marseille, partagée entre la Marine et les civils. Toulon ose enfin assumer ces contrastes, se révèle et se réveille. Longtemps tellement discrète qu’elle était difficile à dessiner, cette fausse moche fait son coming out.
Balade architecturale. Par où commencer ? Par le quai du port, c’est évident, et par cette Frontale moderniste plantée sur pilotis par Jean de Mailly. Baies vitrées et persiennes colorées : un clin d’œil à Le Corbusier. En profiter pour faire un crochet par la piscine du port Marchand. Angles vifs, porte à faux et mosaïques, elle est l’œuvre d’un élève de Mies Van der Rohe, Alfred Henry. Il signa aussi cette incroyable Caisse d’épargne à l’angle de la place de la Liberté, au cœur de la ville, en passe de devenir un hôtel Okko.
Remonter ensuite par le marché du cours Lafayette et s’arrêter à l’Évêché, magnifique hôtel provençal du XVIIIe siècle, pour visiter sa bucolique cour intérieure. Avec un peu de chance, les expositions de la dernière Design Parade seront encore installées.
Juste derrière, les halles municipales Esther-Poggio, somptuosité en pur style Art déco, en attente de réhabilitation. Vous voici dans le centre ancien, préservé des assauts du béton, partagé entre placettes, fontaines, passages et ruelles provençales. Plus haut, les grandeurs haussmanniennes – qui se souvient que le baron Haussmann fut préfet du Var, et qu’avant d’éventrer Paris il se fit la main sur Toulon ? Vous passez devant l’opéra, minipalais Garnier, où la programmation est par ailleurs excellente – à l’instar des Marseillais, les Toulonnais sont férus d’opéra –, et vous glissez vers la fameuse place de la Liberté, le théâtre, les musées.
En dessous, quelques rues typiquement années 30, autour de la poste et du Cercle naval ; au-dessus, le fameux nouveau quartier de la créativité et de la connaissance, 100 % contemporain. Maintenant, il faut choisir : grimper sur le Faron et voir ses villas modernistes, dignes des collines de Los Angeles, ou bien s’offrir une virée sur les plages, dans les quartiers huppés du Mourillon et du cap Brun. On y trouve l’élégante villa de la famille de Jules Verne, devenue un joli petit musée des Arts asiatiques, des rues bordées de maisons de capitaines, de maisons de pêcheurs, de propriétés du XIXe siècle les pieds dans l’eau, des forts et des villages de cabanons. Encore un joyeux cocktail, comme Toulon les aime, brassage social autant que patchwork esthétique. Une balade architecturale 100 % euphorique.
Restos, cafés, cocktails… dix choses à faire à Toulon :
• Flâner sur le marché avec un cornet de cade.
• Après le marché, boire un café au Chantilly, pour y croiser le tout-Toulon. www.le-chantilly-toulon.eatbu.com
• Emprunter l’un des bateaux qui font le tour de la rade le dimanche. Pour voir la ville avec du recul, les forts construits par Vauban et les navires de guerre.
• Sauter dans le téléphérique pour prendre de la hauteur et découvrir les sentiers de randonnée qui partent du sommet du Faron.
• Aller piquer une tête à l’anse Méjean. Se croire au bout du monde.
• Pour une soirée antidéprime, boire un cocktail au Telegraphe, l’ancienne poste datant de 1850 transformée en laboratoire d’émergence par François Veillon, puis dîner au restaurant Beam. www.letelegraphe.org
• Réserver au Local, petite perle gastronomique. www.restaurant-lelocal.fr
• Acheter le short de bain parfait chez Seagale, créateur local d’habits techniques et glamour. www.seagale.fr
• Faire son shopping cadeaux chez Inter Faces, le nouvel antre de Frédéric Weeger, gourou toulonnais du design. www.inter-faces.eu
• Feuilleter le joli ouvrage Toulon dans la collection Portraits de Villes des éditions Be-pôles. Le photographe Daragh Soden a promené son regard rêveur et aigu sur la ville pour en saisir la beauté brute.
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