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Gibraltar seule au monde après le Brexit ?
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Brexit : Gibraltar, l’enclave britannique europhile bientôt seule au monde ?

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Hier, les habitants du rocher ont voté massivement pour le maintien dans l’Union Européenne (95,91 %). Rien d’étonnant pour un morceau de terre profondément britannique mais viscéralement européen.

Ils étaient donc plus de 95% à voter pour le remain (maintien), hier sur le rocher de Gibraltar. Dans un référendum très serré en métropole, où le Brexit l’a emporté avec presque 52 % des voix, cela ressemble à une bizarrerie. Pas pour Philippe Boulanger, géographe et politologue consultant pour l’Ecole Normale Supérieure : « Ce résultat est lié à des raisons historiques et à l’esprit traditionnel ouvert de ses habitants vers le continent européen. Gibraltar n’est pas une île mais bien un territoire britannique avec des frontières terrestres avec l’Espagne et l’Union européenne. » Logique finalement de vouloir rester dans l’UE… Tout en restant très britanniques comme le montre cette déclaration du ministre en chef du rocher :

Brexit 2016, un remake de Franco 1968 ?

Après le Brexit, Gibraltar est plus que jamais un enjeu majeur pour Royaume-Uni, car malgré ses 7 km², c’est un territoire de grande valeur. Comme l’explique Philippe Boulanger, « depuis le XIXe siècle, la position de Gibraltar a toujours été stratégique pour la Grande-Bretagne. Situé sur la route maritime vers son empire colonial, Gibraltar continue de constituer un point névralgique dans une économie mondialisée. Le rocher est situé entre la zone Asie-Pacifique et le continent européen. » Le géographe reste optimiste concernant la situation de l’enclave après le référendum : « Aujourd’hui, le Brexit ne transforme pas fondamentalement l’importance géopolitique de Gibraltar mais il continue de la valoriser. »

Concernant les « Llanitos » (le surnom des habitants de Gibraltar), ce n’est pas la même chose. Le vote massif en faveur du maintien n’a pas que des raisons historiques. La frontière entre l’Espagne et le rocher pourrait se fermer et la peur de l’isolement est forte parmi les locaux. Les nombreuses tensions entre Madrid et l’enclave britannique, jusque-là arbitrées par l’UE, vont se trouver aggravées. Une situation dont a profité Jose Manuel Garcia Margallo, chef de la diplomatie espagnole, en déclarant à la radio Onda Cero : « Il faudra trouver quel type de relation Gibraltar veut avec le marché intérieur de l’Union européenne. » Une question rhétorique, qui ressemble un peu à une menace… et une proposition qui ressemble à du chantage (et à du Franco, voir encadré) : « Notre formule (…) est celle d’une co-souveraineté britannico-espagnole pendant une période limitée, qui débouche sur la restitution de Gibraltar. »

Cette co-souveraineté, Philippe Boulanger n’y croit pas, mais reste prudent car « les enjeux sont complexes ». Surtout, il demeure encore trop de questions autour du Brexit. Des accords seront-ils signés comme le demande Angela Merkel ? Quand celui-ci sera-t-il effectif ? Gibraltar sera-t-elle soumise (encore un peu plus) à un régime particulier ? Malgré le flou et la peur de l’isolement, le ministre en chef de l’enclave, Fabian Picardo, appelle au calme et à la réflexion, en terminant sur une note optimiste :

Gibraltar, une histoire tourmentée…

  • 1374 : les Mérinides (peuple nord-africain) cèdent Gibraltar au royaume de Grenade.
  • 1492 : Le Roi Ferdinand II de Castille reprend le Rocher.
  • 1704 : Les Anglais font main basse sur Gibraltar grâce à l’amiral George Rooke.
  • 1713 : Les Espagnols reconnaissent que Gibraltar appartient à l’Angleterre avec les traités d’Utrecht… sans pour autant reconnaître la souveraineté anglaise !
  • 1779 : Dans le cadre de l’alliance avec la France contre le Royaume-Uni pour l’indépendance américaine, les Espagnols assiègent Gibraltar pendant trois ans. Sans succès.
  • 1967 : Lors d’un référendum, les Gibraltariens votent massivement pour le maintien de la souveraineté britannique. Vexé, Franco fait fermer les frontières en représailles. Avec les récentes déclarations du ministre des Affaires Etrangères espagnol, le spectre d’une situation similaire fait à nouveau trembler les Llanitos…

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