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Le dernier opus du groupe anglais de Nick Jones a ouvert cet automne à Paris, près de Pigalle. Jean Cocteau, dont la famille occupait jadis les lieux, aurait adoré ce club festif et stylé pour créatifs connectés.
Comme toutes les bonnes surprises, celle-ci est inattendue. Longeant l’enfilade d’immeubles gris et cossus de la rue La Bruyère, personne ne devinerait qu’elle abrite l’un des lieux les plus chic et vibrants de la capitale. Seul un discret interphone, surmonté d’un logo minuscule, signale la Soho House Paris.
Et la porte cochère s’ouvre sur un hall où un sosie de Pharrell Williams vous accueille en anglais, dans un bruissement de musique lounge. Après avoir décliné vos sésames – réservation, membership number – vous ôtez votre masque, car personne n’en porte à l’intérieur de la House, et la parenthèse enchantée commence.
Dernière adresse du groupe créé il y a vingt-cinq ans à Londres par Nick Jones, Soho House Paris a ouvert ses portes pour la fashion-week de septembre 2021. Un timing symbolique pour ce lieu stylé et inédit à Paris, mi club privé, mi hôtel de charme. Il aura fallu deux ans de travaux pour rénover la bâtisse, ancienne demeure de la famille de Jean Cocteau, dont l’esprit flotte un peu partout.
Au troisième et dernier étage, l’artiste Roberto Ruspoli a orné les chambres de silhouettes stylisées à l’antique, inspirées des murs de la villa Santo Sospir. Comme dans cette maison de Saint-Jean-Cap-Ferrat où l’artiste passait ses étés, les dieux grecs veillent, des mosaïques de l’entrée à la cage d’escalier. L’œil attentif discernera des toiles disséminées dans les parties communes et les chambres.
Commissionnées à des artistes contemporains, elles viennent rejoindre les quelque 5 000 œuvres collectionnées dans les autres adresses du groupe. Toujours en lien avec Cocteau, c’est toute une époque que la déco célèbre en jouant sur les codes des années 30. Candy Murray, la styliste en chef de Soho Home, a reproduit avec brio des dessertes en rotin et des chevets en demi- lune.
On retrouve l’esprit boudoir, signature du groupe, dans les textiles estampillés Pierre Frey, qui réédite pour l’occasion des tentures et rideaux de soie anciens, des courtepointes gaufrées délicieusement rétro. Dans les chambres plus grandes, on trouve même un trompe-l’œil réalisé à la feuille d’or, des cheminées ou de vastes baignoires.
Et partout, l’essentiel cultive les détails, qu’on s’amuse à découvrir : la bouteille de Grand Marnier à servir dans des verres Baccarat, le citron vert pour le gin tonic et l’huile de CBD parfumée à l’orange pour se détendre, ou encore les trois types de sèche-cheveux Dyson, sans oublier la triple rangée d’oreillers et de gels douche Cowshed.
Le vaste frigo est très fourni en alcools, mais on ne trouve ni bouilloire ni commode pour ranger ses vêtements : la House ne favorise ni les buveurs de tisanes ni les longs séjours. Avec seulement 36 chambres, on comprend rapidement que l’essentiel se trouve ailleurs.
Le cœur bat au rez-de-chaussée de la Soho House Paris
À l’heure du tea time, c’est l’espace sportif qui buzze – salles de cardio et de muscu font le plein, avec des équipements dignes des meilleures enseignes spécialisées. Un studio de yoga et une salle de Hiit proposent des cours quotidiens. Sauna et hammam jouxtent les douches très cosy, un service « wash and fold » de lavage express prend soin de votre tenue de sport pour presque rien (5 euros).
Un bassin de nage, petit mais joliment habillé de marbre vert, complète l’offre bien-être. Situé sur une terrasse végétalisée et flanqué de daybeds, il aura son heure de gloire dès le retour des beaux jours. Le parcours conduit ensuite au cœur battant des lieux, qui occupe tout le rez-de-chaussée sous la verrière : les espaces où prendre un verre et se restaurer.
Plusieurs coins salon fourmillent d’écrans allumés, dans une ambiance studieuse et connectée, qui s’estompe au crépuscule. Les bougies s’allument alors sur les tables, tandis que les shakers commencent à crépiter au bar, l’un des trois que compte la maison. Il y a là, pêlemêle, des catogans en combinaison imprimé jungle et des longues filles blondes en jean, dans un mélange ethnique étudié très londonien.
Paul Samb, directeur de la communication et Head of Membership, incarne à la perfection cet idéal. « Les gens qui me rencontrent sont souvent surpris, ne s’attendant pas à trouver quelqu’un comme moi à ce poste », reconnaît ingénument l’ancien styliste naviguant entre Dakar, Paris et Londres, recruté pour son look autant que pour son carnet d’adresses, son habileté à mettre en relation les créatifs de tout poil, et son style joyeusement décontracté.
« Au fond, cela ressemble à mon ancien métier. Mon job est de faire en sorte que les membres se sentent bien, de favoriser les liens et les projets créatifs des gens de la mode ou de la tech qui viennent ici. » Tous ont acquitté les 2 200 euros de cotisation annuelle (1 100 euros pour les moins de 27 ans), et peuvent amener deux ou trois invités. Devant le bar, on salue Assia Heinold, la directrice de l’hôtel, qui annonce le programme de la soirée au cabaret.
« Ne manquez pas Yasiin Bey, un rappeur américain génial. Des événements, il y en a plusieurs fois par semaine – des performances artistiques et sportives, des talks ou des séances de méditation. Nous avons récemment reçu la visite du premier homme cyborg, capable de traduire les sons en couleurs. Ces événements inspirants constituent la plus grande promesse pour nos membres », assure-t-elle.
Direction le cabaret donc, la salle de spectacle située au sous-sol. Les beautiful people sont déjà là, un verre à la main, en grappes rieuses près du bar ou en tête-à-tête autour des petites tables. Sous le grand dais plissé qui drape le plafond, les sièges en velours cramoisi s’étagent face à la scène où deux DJ malaxent leur platine.
Le son monte, et au coude-à-coude chacun savoure le plaisir d’être réunis simplement pour écouter de la musique à Paris. Qu’importe si la soirée se prolonge : en quelques marches, chacun aura rejoint sa chambre-cocon. House, sweet house. Cette adresse est dingue. Welcome in Paris !
Soho House Paris. 45, rue La Bruyère, Paris 9e. sohohouse.com
A table
« Terroir français oblige, la carte met à l’honneur les classiques dignes des cuisines de nos grands-mères », résume William Pradeleix, le chef français qui dirige les fourneaux de Soho House Paris, après un parcours sans faute qui l’a mené du Connaught à La Mamounia.
On commence les agapes par des œufs mimosa ou des poireaux vinaigrette, suivis d’un poulet rôti truffé et sa purée au beurre (le « plat signature ) ou d’un faux-filet béarnaise, avant de succomber au baba au rhum.
La belle carte des vins balaie les vignobles français, et un bon nombre d’entre eux sont servis au verre. Les plats sont généreux, le service est efficace et chaleureux. Cerise sur le gâteau, les prix sont aussi raisonnables que dans un bistrot de quartier, l’ambiance en prime…
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