The Good Look
Watches
Directeur de la création chez Hermès Horloger, ce passionné de dessin tombé dans l’horlogerie quand il était tout petit a toujours imaginé des montres, par goût du style, des formes et de la précision. Sa dernière-née, l’Hermès Cut, signe sa vision de l’épure et d’un temps qu’il rêve fluide et poétique.
C’était à Tinos, dans les Cyclades, à la toute fin du printemps dernier. Pour accompagner le lancement de la nouvelle montre Cut, aux lignes si dessinées, les équipes d’Hermès Horloger avaient convié une poignée de journalistes et organisé un voyage comme on n’en fait plus. L’idée ? Simple comme bonjour : découvrir les mines isolées de marbre vert de cette belle île grecque, apprendre à tailler cette précieuse roche sous la houlette d’un artisan du cru et comprendre les principes ayant présidé à la création de la montre Cut.
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Philippe Delhotal met l’heure en boîte
Pas seulement des exercices de style, mais des gestes mûrement réfléchis qui s’inscrivent dans le temps, comme le burin cisèle le marbre. Joueur, Philippe Delhotal, directeur de la création chez Hermès Horloger depuis 2008, était là pour arrondir les angles. Depuis plus de quinze ans, ce designer au profil protéiforme a toujours su rester discret.
Pourtant, il a signé de nombreux succès, dont la célébrissime montre Arceau Le Temps Suspendu, qui permet, d’une simple pression sur un poussoir, de ramener et immobiliser les aiguilles des heures et minutes à 12 heures et, ainsi, de suspendre le cours du temps.
Cette vision à la fois poétique et ludique de l’horlogerie est la marque de fabrique d’Hermès, où l’on aime parler de temps qualitatif, à soi, plutôt que de précision et de chronométrie… même si l’un n’empêche évidemment pas l’autre. Économe en mots, Philippe Delhotal aime néanmoins utiliser un terme pour définir la quintessence de ses missions : le sillon. Car il le creuse sans discontinuer, avec l’abnégation de ceux qui savent.
« Chez Hermès, la technique est systématiquement mise au service de la création, commence-t-il. Un cadran se dessine en écho à une boîte, un détail d’un mouvement se façonne en fonction de l’histoire de la montre, comme sur la dernière montre Arceau Duc Attelé, pourvue d’un tourbillon central à trois axes et d’une répétition minutes à timbre diapason où l’un des râteaux du mouvement prend la forme d’une tête de cheval à crinière avec ses mobiles dentés. »
Une âme créative
Ce sont justement ces petits riens qui font tout. Philippe Delhotal le sait. Son parcours, d’ailleurs, parle pour lui et explique ses choix. « Enfant, j’ai toujours dessiné, se souvient ce natif de Besançon. Ma mère avait travaillé chez Yema, à l’époque. Un jour, je suis tombé sur les outils d’horlogerie qu’elle avait conservés au grenier. » Et tout est parti de là.
Il passe son diplôme d’horloger, puis celui des Beaux-Arts privés, à Paris. Cette formation bicéphale sera essentielle. Un jour, son grand-père lui offre une montre. Elle n’est pas totalement à son goût. Il la transforme et comprend qu’il a de l’or dans les mains. Il commence sa carrière chez France Ébauches, puis pousse la porte de Vacheron Constantin, avant de travailler pour un sous-traitant horloger fabriquant les boîtiers des plus grandes marques de luxe, puis pour Jaeger-LeCoultre et un autre fournituriste technique.
De cette expérience variée, il garde une grande malléabilité dans la pratique et une compréhension commerciale de ce qui fonctionne ou pas. En 2002, révolution : il accepte de diriger le bureau de création de Patek Philippe. Il y restera jusqu’à ce que la division horlogère d’Hermès le débauche. « Dans l’horlogerie, il y a le travail sur les formes d’un boîtier, d’une aiguille, d’un poussoir, explique-t-il, mais il y a aussi un moteur, le mouvement mécanique. C’est le mariage des esthétiques de ces deux mondes qui crée la beauté. »
Taillée au cordeau, la nouvelle montre Cut en est probablement le meilleur exemple. Il semblerait qu’elle ait été pensée comme le pendant féminin de la célèbre et masculine Hermès H08. Mais pas que. Cette montre de 36mm de diamètre est totalement non genrée. Jeu de matières et de textures, lignes géométriques et couleurs : on retrouve le même ADN que sur la H08.
Tout aussi contemporaine, sportive et urbaine, la petite dernière se décline en acier ou dans une combinaison bicolore acier et or rose soulignée, ou non, d’une lunette sertie de 56 diamants. Elle creuse ce fameux sillon qui crée un style et suscite le désir. Philippe Delhotal ne dit plus rien. Il sourit, car il sait, oui, il sait.
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