Art
The Good Culture
La guerre produit-elle de bons artistes ? Cette question embarrassante se pose en filigrane dans l'exposition consacrées à Nicolas de Staël, au musée d'Art moderne de Paris.
L’histoire commence dans les années 40, alors que Nicolas de Staël a déjà 36 ans, et se termine quinze ans plus tard, lorsque l’artiste met tragiquement fin à ses jours. Entre les deux, ce Russe issu d’une lignée de militaires, lui-même un temps engagé dans la Légion étrangère, aura mené une exploration artistique qui n’aura eu de cesse d’assouvir un « inévitable besoin de tout casser quand la machine semble tourner trop rond ».
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De la tragédie au mythe
Organisée de manière chronologique, la rétrospective monographique met en lumière une esthétique en roue libre, insensible aux préoccupations formelles de ses contemporains. On suit l’artiste de salle en salle, depuis son arrivée à Paris, en passant par son installation dans le Vaucluse, suivie d’un voyage en Sicile, jusqu’à ses derniers mois à Antibes, en bordure de mer.
Sur la toile, les couleurs sourdes du début, comme dans la Grande composition bleue (1950-1951) ou encore Fugue (1951-1952), laissent peu à peu place à une explosion de couleurs, qui culmine avec Agrigente (1954) et Sicile (1954).
Comment tenter de déchiffrer ce corpus unique sans se pencher sur la biographie de son auteur ? D’un match de football à un simple saladier posé sur la table, de Staël semble porté par une curiosité hyperactive – il met souvent en chantier plusieurs œuvres en parallèle –, qui cache peut-être les questions existentielles de quelqu’un qui en a trop vu, trop jeune.
L’exil de sa famille après la révolution russe, la mort de ses parents en Pologne alors qu’il n’a que 5 ans, son placement dans une famille en Belgique, pays dans lequel il découvre la littérature française et les maîtres flamands… Tout devient sujet à interprétation.
Le musée d’Art moderne de Paris (MAM) navigue entre ces suppositions mythiques avec beaucoup de précautions, préférant se pencher sur les recherches graphiques et picturales qui ont fait de Nicolas de Staël un des précurseurs du néoformalisme new-yorkais prôné par Joan Mitchell. À ne pas rater.
Exposition Nicolas de Staël
Musée d’Art Moderne, jusqu’au 21 janvier
Mam.paris.fr
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