The Good Look
Watches
Au rayon des tocantes, les mouvements complexes et gros cadrans ont la cote. Pourtant, la montre bijou fait son grand retour, la preuve par trois.
Si les horlogers suisses les aiment imposantes, statutaires, parfois indéchiffrables, toujours complexes, les maisons de mode rééditent leurs modèles un temps oubliés. Une aubaine à une époque où les montres se muent en accessoires fashion devant l’omniprésence des écrans sur lesquels défilent les heures, et regagnent par la même occasion leur statut de bijoux.
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La Baignoire de Cartier
L’histoire de la montre Baignoire s’inscrit au cœur de celle de l’horlogerie de formes emblématique de Cartier. Après le carré de la montre Santos en 1904 et le dessin de la Tortue née en 1906, la Maison crée en 1912 une montre dotée d’un boîtier rectangulaire arrondi à ses extrémités. La réflexion se poursuit jusqu’en 1958, avec une montre dite « ovale cintré » dont le boîtier, légèrement courbé, épouse les lignes du poignet.
C’est la première apparition de celle qui prendra, en 1973, le nom de Baignoire et qui affiche déjà le volume qu’on lui connaît et les détails qui font sa signature : glace bombée, cadran frappé de chiffres romains et bordé d’un ruban d’or lisse. Si les modèles de montres bijoux Cartier s’actent à prix d’or en salle des ventes, le joaillier parisien a introduit en 2023 une nouvelle échelle à sa Baignoire.
Par un nouveau rapport de proportions, l’équilibre s’inverse. La nouvelle Baignoire est à la fois miniaturisée et amplifiée. Sur un boîtier miniature, la lunette, comme un godron devenu plus généreux, cerne d’or le cadran délicat. Pureté des lignes,précision de la forme, justesse des proportions : on la porte comme un bijou et pour elle-même – simplement, parce qu’elle est essentielle.
La montre Première, le bijou de Chanel
Première création horlogère de Chanel, la montre Première est conçue en 1987 par Jacques Helleu. Directeur Artistique de la Maison, cet homme atypique qui se consacrait à la marque depuis ses 18 ans se demandait encore avec humour « de quoi il s’agissait » alors que le succès de la montre Première confirmait son talentueux entêtement. « Je me suis battu pour faire un modèle fort, un modèle unique, qui puisse rester une référence, et non pour lancer une simple collection » déclarait celui au bras duquel Chanel entrait dans le monde de l’horlogerie.
Choisissant l’octogone du bouchon du parfum N°5 de Chanel pour cadran et le laquant de noir, empruntant au légendaire sac matelassé sa chaîne entrelacée de cuir pour en faire son bracelet, la Montre Première a créé la surprise dans un univers régi jusqu’alors par les codes de l’horlogerie masculine.
Trente-cinq ans après sa création, cette leçon de style réapparaît dans sa version originale habillée de ce qui lui est le plus cher : son allure intemporelle. Un boîtier octogonal revêtu d’or jaune enserrant un cadran laqué de noir : la surface lisse s’étire sans se soucier de l’heure. Sur l’une des plus belles montres bijoux, point de chiffres ou d’index, de trotteuse ou de guichet indiquant la date. Sous la glace biseautée, seules deux aiguilles aux finitions dorées et aux lignes épurées évoluent sur ce mini infini. Tandis qu’une couronne sertie d’un cabochon d’onyx vient parfaire cette géométrie bicolore.
Pour Arnaud Chastaingt, directeur du Studio de Création Horlogerie, Première incarne l’esprit de l’horlogerie de Chanel. « Première, c’est la première page de notre histoire horlogère. Elle est née d’une l’absolue liberté de création et a initié une vision, celle de l’Allure du temps selon Chanel. En 2022, J’ai souhaité qu’elle retrouve sa place au cœur de notre collection. Cette création, c’est notre ADN et un code Chanel à part entière. Bien plus qu’une montre, Première est une leçon de style. »
Serpenti de Bulgari, l’une des montres bijoux les plus iconiques
Bulgari fêtait son 125e anniversaire en 2009 en réinventant sa fameuse Serpenti dans une mouture plus géométrique. La tête du serpent adopte une silhouette triangulaire, dotée de cadrans en nacre ou en onyx noir, et d’index sertis. Les écailles du bracelet quant à elles prennent une forme carrée avec un profil plus épais.
Fondée par l’orfèvre grec Sotirios Voulgaris — dont le nom deviendra plus tard l’italianisé « Bulgari » — à Rome en 1884, la maison Bulgari a puisé dans son héritage gréco-romain son ADN. Depuis l’introduction des serpents chez Bulgari à la fin des années 1940, ceux-là ont pris une multitude de formes, les plus célèbres étant les bracelets, parfois accompagnés de montres.
Cette forme de serpent, premièrement abstraite, a évolué au fil des décennies, prenant progressivement les traits d’un animal dans les années 1960 et au début des années 1970, avant de récemment muer, adoptant une stylisation géométrique plus contemporaines.
Les mouvements horlogers (calibres mécaniques à remontage manuel) étaient fournis par les grandes maisons de l’époque : Jaeger-LeCoultre, Vacheron Constantin et Piaget. Les cadrans étaient souvent co-signés. En 1978, Bulgari ouvre une première manufacture pour produire ses propres mouvements horlogers, toujours en fonction aujourd’hui alors que le serpent continue de s’enrouler autour du poignet de ses victimes dans la version la plus moderne de la Serpenti.
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