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Anvers multiplie les initiatives pour rapprocher start-up et entreprises afin de s'assurer de la pérennité de ses principales activités, 2024 - TGL
Anvers multiplie les initiatives pour rapprocher start-up et entreprises afin de s'assurer de la pérennité de ses principales activités, 2024 - TGL
Marine Mimouni

The Good City // Business-city

Anvers : ville à facettes, métropole de poche

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De taille humaine, la ville d’Anvers multiplie les initiatives pour rapprocher start-up et entreprises et assurer, ainsi, la pérennité de ses principales activités liées à son port et à son pôle chimique. La forte intégration des acteurs économiques accélère la mise au point d’innovations et leur déploiement.

Ce qui surprend le visiteur qui découvre Anvers, ce sont ses contrastes. La ville se définit elle-même comme une « métropole de poche ». Réputée pour son port, son pôle chimique, ses créateurs de mode ou ses diamants, Anvers est en réalité une « petite ville ». On pourrait même dire une ville en circuit court. Rien n’est jamais très loin, beaucoup de déplacements se font à pied ou à vélo, tandis que métros et tramways quadrillent la ville de façon régulière et précise.


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Une métropole de poche

Le visiteur qui arrive par le train dans la monumentale gare Anvers-Central peut entrer immédiatement dans le quartier des diamantaires ou rejoindre l’opéra à pied en dix minutes. S’il préfère se rendre au zoo, il n’a qu’à se retourner pour se retrouver dans le deuxième plus grand espace vert d’Anvers, après le parc de la ville qui, lui, se trouve à moins de 500 mètres de là.

Notre‑Dame d’Anvers, vue depuis l’hôtel Julien, est la plus grande église gothique de Belgique.
Notre‑Dame d’Anvers, vue depuis l’hôtel Julien, est la plus grande église gothique de Belgique. Martin Bruno

Autre illustration de cette proximité permanente, moins de 3 kilomètres à vol d’oiseau séparent la cathédrale, dans le centre historique, de la Maison du port. Cette ancienne caserne transformée héberge, depuis 2016, les bureaux de l’autorité portuaire. Le bâtiment, surplombé d’un édifice en forme de diamant selon certains ou de navire pour d’autres, conçu par Zaha Hadid Architects, est devenu l’emblème de la ville.

Bien qu’elle ne compte que 540 000 habitants, la cité flamande parade souvent en tête dans différents classements mondiaux et pas des moindres. En premier lieu pour son activité portuaire, véritable moteur économique de la ville, mais aussi de la région. Depuis sa fusion avec le port voisin de Zeebruges, en 2022, le port d’AnversBruges revendique le titre de deuxième port européen après celui de Rotterdam et se place au 5e rang mondial.

La galerie de mobilier design Michael Marcy, à Anvers.
La galerie de mobilier design Michael Marcy, à Anvers. Martin Bruno

Contraste là encore, puisqu’il faut remonter le fleuve Escaut sur 80 kilomètres et franchir la frontière avec les Pays-Bas pour arriver à la mer du Nord. Cela n’empêche pas le port d’afficher fièrement un trafic annuel de 14millions de conteneurs EVP (équivalent vingt pieds), de 290 millions de tonnes de marchandises et de quelque 3,5 millions d’automobiles. L’un de ses points forts réside dans le réseau de 1 000 ­kilomètres de pipelines qui courent sous ses installations.

Respect du pacte vert européen

Constitutif du port, le pôle chimique est le premier en Europe et le deuxième mondial derrière Houston. Huit des dix plus grands industriels de la chimie et de la pétrochimie y sont présents, dont BASF, Total Energies, ExxonMobil ou encore Ineos. Ils partagent l’ambition de l’autorité portuaire : devenir un précurseur de la chimie « verte » et le premier port mondial à répondre aux besoins de l’économie, du climat et de la population.

BlueChem est un incubateur de start‑up qui se consacrent à la chimie durable.
BlueChem est un incubateur de start‑up qui se consacrent à la chimie durable. Martin Bruno

Ils multiplient les projets de capture de CO2, de récupération de chaleur fatale, de production et de stockage d’hydrogène pour atteindre les objectifs du pacte vert européen, comprenant, notamment, la réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. Le port est stratégique pour les industries de la chimie, qui comptent pour un tiers des exportations belges (32,7 %). Elles y trouvent des infrastructures efficaces, notamment ferroviaires, ainsi que des pipelines, et peuvent y accéder par le fleuve, la mer, le train ou la route.

« L’une des forces d’Anvers pour le secteur est que la chaîne de valeur est ici complètement intégrée, des composants et des matières premières jusqu’à l’emballage et au transport, mais aussi de la R&D jusqu’à la production », souligne Ann Wurman, directrice d’Essenscia Flandre, la branche locale de la fédération de la chimie, des matières plastiques et des sciences de la vie.

Les nombreux projets menés en recyclage, récupération ou transformation des matières ajoutent encore à cette attractivité. « Beaucoup d’entreprises du secteur font de leur site d’Anvers le navire amiral, le démonstrateur de leur capacité à “verdir” leur activité », ajoute Ann Wurman.

La vue depuis le MAS – Museum aan de Stroom, à Anvers.
La vue depuis le MAS – Museum aan de Stroom, à Anvers. Martin Bruno

À l’heure des transitions numérique et énergétique, de la lutte contre le réchauffement climatique, Anvers veut assurer la pérennité de ses activités industrielles, qui sont ses principales ressources économiques et d’emplois, en accompagnant leur « verdissement », leur optimisation et leur numérisation.

Pour cela, la ville a lancé plusieurs pôles de compétitivité, qui associent l’ensemble des acteurs, de l’université et des start-up aux grandes entreprises, dans des écosystèmes où échanges et proximité accélèrent la production d’innovations de rupture. Le hub The Beacon se consacre à rendre « smart » la mobilité, le port et la logistique. Créé en 2019, il compte une centaine de membres, parmi lesquels de nombreuses start-up, l’institut belge de recherches en microélectronique et composants Imec ou le japonais Fujitsu.

« Notre principale activité consiste à créer une communauté entre ces acteurs, très différents les uns des autres, à les inspirer. Pour cela, nous organisons toutes sortes de rendez-vous thématiques, de rencontres », explique Inés Sylverans, directrice de The Beacon. Les événements récents ont traité de la manière de rendre les ports plus sûrs et de faire baisser la criminalité, ou encore d’informatique quantique.

Dans l’une des chambres de la maison d’hôtes Patina, à Anvers.
Dans l’une des chambres de la maison d’hôtes Patina, à Anvers. Martin Bruno

Dans les couloirs de The Beacon, Helicus, qui développe un centre de contrôle pour les vols de drones, côtoie le Lab 5G d’Orange, démonstrateur des compétences industrielles des réseaux 5G, NxtPort, qui a mis au point une plate-forme de partage sécurisé de données pour les acteurs de la chaîne logistique du port, ou Aloxy, qui installe des capteurs de surveillance des vannes dans les installations chimiques. Ses petits boîtiers jaunes équipent les sites de BASF, de Shell, de Chevron à Anvers, mais aussi à Singapour et au Moyen-Orient.

Des start-up en pole position

BlueChem, pour sa part, est consacré à la chimie. « C’est le premier incubateur pour la chimie durable », précise Liesbet Boogaerts, sa directrice géné‑ rale. Implanté sur un ancien site pétrochimique devenu l’écoparc Blue Gate, Blue Chem accompagne les start‑up issues de l’université voisine pour en faire des scale‑up qui testeront bientôt leurs produits à échelle 1 sur les sites des grands chimistes du port.

Dans le quartier des diamantaires, à Anvers.
Dans le quartier des diamantaires, à Anvers. Martin Bruno

L’incubateur se concentre sur la circularité, le biosourcé, le recyclage avancé et l’intensification des processus. Parmi les 14 start-up incubées actuellement, citons Aquature, créée par Steffen Georg, qui traite les eaux usées avec des énergies renouvelables et en extrait le CO2 ; FlyBlast, qui modifie génétiquement des cellules d’insectes pour la production d’insuline ; ou encore la française Fairbrics, qui produit des fibres polyester décarbonées à partir de… CO2 !

Quant à Dunden, le hub installé aux abords du jardin botanique de la ville, il accompagne les start-up dans les domaines de la santé et de l’impact social. Présente depuis 2020, Vanessa Vankerckhoven a, par exemple, créé Idevax, une solution de transfert dermique de vaccins qu’elle a brevetée. Moins douloureux qu’une seringue, son dispositif utilise seulement 10 % du volume habituel d’un vaccin pour la même efficacité !

Autre start-up du hub, Epcon (Epidemic Control) utilise les données et l’intelligence artificielle pour prédire les épidémies et renforcer les systèmes de santé publique dans les pays en développement. Toutes ces initiatives montrent que le port joue un rôle essentiel dans la dynamisation des activités, dans la croissance et l’économie de la ville, mais il a aussi un fort impact culturel et sociétal.

Croquettes de crevettes grises, spécialité locale, et bière belge au Café Commercial, à Anvers.
Croquettes de crevettes grises, spécialité locale, et bière belge au Café Commercial, à Anvers. Martin Bruno

Tout port, qu’il soit sur un fleuve, sur la mer du Nord, la Méditerranée ou sur un océan, ouvre la ville qui l’héberge sur le monde entier. Les navires y entrent, y déversent leurs marchandises et en repartent, marquant la ville d’une couleur particulière. Ainsi, Anvers a recensé pas moins de 172 nationalités dans sa population de 540 000 habitants.

À titre de comparaison, Paris n’en compte que 110 pour plus de 2 millions d’habitants ! Cette ouverture sur le monde se ressent partout, dans les cuisines des restaurants, dans la diversité des visages rencontrés dans la rue, à l’université ou dans les bureaux, dans les histoires et les profils des créateurs, des artistes comme des ingénieurs, des entrepreneurs ou des étudiants, qui trouvent dans cette ville et ses contrastes un environnement stimulant conjugué à une qualité de vie et à une taille humaine, tout ce qui vaut à Anvers d’être qualifiée, à juste titre, de « métropole de poche », sans ironie aucune.


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