Reports
Il y a peu de pays et de villes où le vélo ne gagne pas de terrain dans sa pratique, ses infrastructures, son marché. Pour autant, un classement des métropoles les plus actives n’est pas aisé, en raison de données rarement consolidées et de critères très variables : kilomètres de pistes cyclables, nombre d’adeptes, fréquence ou longueur des trajets…
Forcément contestable, le palmarès du cabinet danois Copenhagenize, lancé en 2011 et dont la 5e édition date de 2019, étudie un panel de 112 agglomérations : il reste le plus complet et le plus international. Les 10 villes que nous recensons ici font partie du top 20 de cet index vélo-friendly.
10 villes qui aiment le vélo :
Amsterdam
Incontournable ! Si les Pays-Bas sont le pays roi du vélo, Amsterdam en est la vitrine. Environ 60 % de sa population âgée de 12 ans et plus l’utilisent chaque jour, un chiffre surpassé seulement par d’autres villes néerlandaises, mais bien plus petites. Pistes cyclables sécurisées, signalétique adaptée, parkings géants… la cité s’est organisée autour de ses canaux et de ses vélos. Au point qu’il y en aurait aujourd’hui davantage que d’habitants : près de 900 000 pour une population de 813 000 personnes, avec 225 000 places de stationnement dédiées… Plus que de collectionner les records – ce qui n’est pas sans poser des problèmes de saturation –, Amsterdam fait la démonstration que la qualité des infrastructures est décisive pour ancrer la pratique.
Barcelone
Rare métropole d’Europe du Sud à développer depuis longtemps une stratégie vélo, la capitale catalane a créé dès 2007 son système public de libre-service baptisé Bicing. L’hypercentre a vite été balisé d’une centaine de stations pour se déplacer à l’intérieur d’une ceinture verte de 120 km de pistes. Au-delà de ce périmètre, c’est l’élection de l’écologiste et militante sociale Ada Colau, en 2015, qui a véritablement boosté le réseau, que ce soit en stations (420 au total) ou en voies cyclables (environ 300 km). Surprenant pour une ville aussi touristique, le système Bicing, par abonnement annuel uniquement, reste dévolu aux résidents de Barcelone.
Bogota
Le cyclisme est une quasi-religion en Colombie, qui compte nombre de champions, dont le jeune Egan Bernal, vainqueur du Tour de France 2019. La crise du Covid a démultiplié la pratique quotidienne des habitants de Bogota, habitués aux pistes cyclables depuis les années 70. La maire écologiste, Claudia López, qui avait pris ses fonctions le 1er janvier 2020 en se rendant à vélo à son bureau, a fermé de nombreuses artères à la circulation automobile et créé des voies cyclables temporaires. Et ce, dès février, aux prémices de la pandémie, faisant de cette métropole d’Amérique latine un modèle rapidement copié. Une manière aussi d’institutionnaliser la « ciclovía dominical », ce rituel du dimanche dans la capitale colombienne qui voit des centaines de milliers de cyclistes envahir les rues.
Copenhague
Le cabinet danois Copenhagenize est-il le mieux placé pour classer Copenhague ville la plus vélo-friendly du monde ? C’est son credo : diffuser les bonnes pratiques d’urbanisme cyclable de sa capitale. Les arguments objectifs existent : 350 km de pistes surélevées, 17 ponts réservés aux cyclistes, des feux synchronisés prioritaires, et même des poubelles inclinées dans le sens de la route pour jeter sans s’arrêter ! Du coup, 30 % des trajets sont réalisés à vélo, dix fois plus qu’à Paris. Le virage a été pris dès les années 80 sous la pression de la population. La ligne directrice était simple : faire en sorte qu’il soit toujours plus rapide d’aller à vélo d’un point A à un point B. C’est ainsi qu’on devient n° 1 !
Montréal
La métropole québécoise a vu les déplacements à vélo augmenter de 17 % en 2020. Plus que la conjoncture de la crise sanitaire, la croissance de la pratique couronne une stratégie globale portée depuis 2017 par la présidente de la Communauté métropolitaine, Valérie Plante. Objectif prioritaire : des aménagements de sécurité rassurants, qui confortent une utilisation durable, sur un réseau dense de plus de 1 000 km aujourd’hui. À l’été 2020, elle a lancé la construction d’un réseau express vélo, le bien nommé REV, long de 184 km, pour répondre à la saturation de certaines pistes. Résultat : 2 cyclistes montréalais sur 3 font déjà un usage utilitaire de leur vélo, avec l’objectif d’aller encore plus loin à l’horizon 2022.
Oslo
Vitrine mondiale de la voiture électrique, avec un niveau d’équipements et d’infrastructures sans comparaison, la capitale norvégienne se veut aussi un havre cycliste. Avec un avantage certain : la modeste superficie de la ville et une connexion directe avec la nature. Et une restriction : difficile de circuler à vélo en plein hiver. Les habitants d’Oslo privilégient la propriété individuelle, tandis que les visiteurs sont incités à utiliser City Bike, le service en libre-service pourvu d’une centaine de stations. La coalition rose-vert à la tête de la mairie tend à contraindre l’usage de la voiture, même électrique, au profit d’un développement des pistes cyclables. Au final, un grand gagnant à coup sûr : la tranquillité sonore des résidents.
Paris dans le top 10 des villes vélo-friendly
Classée 8e dans le dernier index Copenhagenize, Paris fait son chemin sur la carte mondiale des villes de vélo. Si le système en libre-service Velib’ existe depuis 2007, si des records de pratique ont été établis en 2020, renouvelés au printemps de cette année, la capitale française reste un outsider, bousculé, même en France, par le dynamisme de métropoles régionales, comme Bordeaux, Strasbourg ou Lyon. Pour transformer cet engouement sans précédent, autour d’un réseau qui atteint aujourd’hui environ 1 000 km pérennes et provisoires selon la Mairie, l’effort doit porter sur la qualité des infrastructures : adaptation des « coronapistes », multiplication du stationnement, accélération de l’intermodalité avec la banlieue… Exemple : la gare de Lyon compte 200 places dédiées, contre 10 000 à la Centraal Station d’Amsterdam. Il y a encore du chemin…
Taipei
La capitale de Taïwan, grand pays producteur de cycles, est aussi considérée comme la métropole la plus provélo d’Asie, alors que le continent est généralement réputé pour l’anarchie de son trafic automobile. Plus que la densité des pistes cyclables, souvent intégrées aux trottoirs, c’est le système en libre-service YouBike qui y contribue surtout : lancé en 2009 avec le fabricant local Giant, le programme a tardé à décoller. Avant que la technologie locale ne simplifie son utilisation et assure son succès. Cette année, le lancement du programme YouBike 2.0 dope encore davantage le système : stations rechargées à l’énergie solaire, puce GPS et antivol automatique sur les vélos. Taipei est entrée pour la première fois dans l’index Copenhagenize en 2019.
Tokyo
Difficile d’imaginer la capitale du Japon, au réseau routier et de transport public si dense, figurer parmi les villes les plus vélo-friendly. Tout un ensemble de pistes cyclables y a pourtant été développé depuis une dizaine d’années, sécurisant ainsi une pratique déjà facilitée par le grand civisme des automobilistes. Un système en libre-service existe dans 11 quartiers, comme Shinjuku ou Shibuya, avec un total de 870 stations. L’implantation de vastes parkings à vélos pousse aussi les habitants à l’intermodalité avec le train. Pour les visiteurs, la quantité de petites boutiques spécialisées permet de louer facilement et à prix modique. Des parcours mènent au-delà des limites de la mégapole en suivant le cours des rivières Edo ou Tama.
Utrecht
La quatrième ville des Pays-Bas mérite un focus : elle est sans doute la capitale mondiale du vélo en regard de sa taille et de sa population, environ 350 000 habitants. S’y trouve le plus grand parking à vélos couvert du monde, sur trois niveaux, sous la gare : 12 500 places, avec le projet de le porter à 33 000 en 2025 ! La piste cyclable la plus fréquentée aussi : la Vredenburgknoop, qui mène au centre médiéval. Des avenues, des rues, des ponts sont entièrement fermés à toute autre circulation que le vélo, vu comme un atout économique : impact des investissements sur l’activité, contribution à l’emploi, bénéfice indirect sur la santé. Ce n’est pas le moindre atout du modèle d’Utrecht.