Horlogerie
Un livre ouvert, et c’est tout un univers qui s’offre. Bienvenue à Cinecittà, sur le tournage de la Cité des femmes, ou dans l’intimité des maisons de Téhéran…
Portrait intime. Tous les recueils de cette jolie série, « Portraits de villes », ont cette part d’intimité qui leur donne justement tout leur sens et surtout leur intérêt. Mais cet opus-là a sans conteste quelque chose de plus. Quand India Mahdavi, architecte et designer, dépeint Téhéran, elle raconte bien la ville d’Iran où elle est née, qu’elle a été contrainte d’abandonner et qu’elle a redécouverte bien plus tard. La part d’émotion est palpable, la nostalgie aussi… Mais ce qui l’est surtout, c’est ce bonheur à être là, à partager ces moments-là, à se perdre au milieu des vestiges, à s’immiscer dans les interstices de cette ville toujours en chantier. C. M.
Nouveau nu. Mireille Darc, simplement assise sur une chaise en paille, vue de profil : c’est lui. Il a photographié les plus belles femmes du monde, celles du grand écran du grand monde et celles de « petite vertu » aussi sûrement… Ses images ont fait le tour du monde, sur papier glacé, parfois arrachées des magazines Lui ou Playboy et vendues sous le manteau ; ou dans des cabines de routiers, dans les catalogues Pirelli. Autodidacte et volontiers iconoclaste, le photographe français Francis Giacobetti a réinventé le nu. Et par là même la perception que l’on peut en avoir. C. M.
Epicurien. « Assumer son mauvais goût appartient à ces franches voluptés de la vie. » Voilà le type de maxime courte, acérée, que partage le journaliste et chroniqueur, pourfendeur d’idées reçues et amateur de chair. Un petit format qui se déguste comme on craquerait pour une boîte de chocolats ou de pâtes de fruits. On craque, on l’abandonne, on a un peu mal au cœur, mais on y retourne, on a comme un goût de trop-peu dans la bouche, on se goinfre, on l’oublie volontairement au fond d’un tiroir pour l’en retirer au beau milieu de la nuit. Tout simplement parce que c’est drôle, léger, souvent juste, même si on n’est pas d’accord. C. M.
Claque magistrale. Ce premier roman est une claque. Qui claque juste et net. Un aller-retour fulgurant. Hélène Nicolas, dite Babouillec, ne sait pas écrire, ne parle pas . Elle est autiste. Mais Babouillec sait lire. Nul ne comprend vraiment ni comment ni pourquoi… A l’aide de petits carrés sur lesquels sont écrites les lettres, avec sa mère Véronique, elle compose des mots, assemble des phrases coups de poing. « J’adore les mots, la possible extension de la pensée sans limite. Alors j’écris l’acte d’y croire. Donner à vos raisons un sens à mon silence. » Alors elle écrit, et nous on y croit. Et on se prend à aimer ses silences aussi justes, aussi clairvoyants, aussi irrésistibles. Ceux d’« une vie qui peut péter à chaque seconde ». C. M.
Ville verte. A l’exemple de Stefano Boeri et de son Bosco Verticale (deux célèbres tours, à Milan), les architectes sont de plus en plus nombreux à intégrer la nature dans leurs projets d’aménagement. Des récents White Walls de Jean Nouvel, à Nicosie (Chypre), aux projets de pure prospective, comme le Paris Smart City 2050 de Vincent Callebaut, qui viennent truffer les quartiers les plus minéraux de la ville de végétation luxuriante, se déploie ici tout le champ de l’inscription du végétal en milieu urbain. Face à la densification des villes, cet ouvrage montre les voies à suivre. M. G.
Mémoires. Retrouver le plus truculent des réalisateurs italiens, Federico Fellini, dans le plus improbable des studios de cinéma, Cinecittà, à l’époque la plus décadente de l’histoire italienne contemporaine, les années 80. Voilà le propos de ce vrai faux roman. Vrai roman car tout y est imaginaire, faux roman car on peut aisément rapprocher les destins d’Etienne, le héros, et de Stefan Liberski, l’auteur. Ce dernier a été, dans sa prime jeunesse, en 1979, l’assistant bénévole du « maître » sur le tournage de La Cité des femmes ! C. M.
Art du voyage. Il est une époque, finalement pas si lointaine, où le monde était bien plus grand. Où l’ailleurs était bien plus différent, bien plus dépaysant, bien plus exotique. Où, enfin, seule une élite pouvait goûter à ces horizons. Où ces voyages étaient prétextes à se forger, à devenir un homme. A pied, à cheval puis bientôt en train (ce sont les débuts de l’Orient-Express), jeunes romanciers, poètes en herbe, fils de famille partaient faire le tour de l’Europe (c’était déjà pas si mal !), poussaient parfois jusqu’aux confins de l’Extrême-Orient. Ils appelaient ça « faire le grand tour », tel un rite initiatique. Cet ouvrage XXL, comme sait si bien en produire l’éditeur Taschen, revient sur cet âge d’or du tourisme, celui d’avant les masses, quand le voyage était perçu comme l’expression la plus aboutie du savoir-vivre. C. M.
Un continent à la dérive. De même que Karen Blixen a raconté l’Afrique comme personne, Peter Beard a photographié ce continent comme aucun autre. Ami de Francis Bacon, familier d’Andy Warhol, intime de Truman Capote, Peter Beard s’est installé au Kenya à l’âge de 24 ans, en 1962. Depuis, il n’a jamais cessé, avec son style graphique incomparable, d’alerter ses contemporains sur le naufrage de l’Afrique, symbolisé, entre autres et selon lui, par la disparition des grands éléphants. C. M.
Vices/vertus. « L’abus d’alcool »… blablabla… « Fumer tue »… blablabla … Fini les long drinks et les sans-filtre, c’est mauvais pour nous. Désormais, nous le savons. Avec certitude. Mais il est une époque, finalement pas si lointaine, où c’était encore considéré comme glamour, sexy, attractif, symbole de réussite autant sociale que professionnelle. Ça buvait et ça fumait tout le temps, partout et dans tous les milieux. Il suffit de regarder un film d’avant les années 90. Alors, pubards du monde entier ont assuré leur fortune avec ce qui nous paraît aujourd’hui davantage ressembler à de la propagande… Les auteurs de ce recueil ont sélectionné les meilleurs spécimens. Attention, ça pique franchement. Mais, au final, ça fait surtout rire… jaune parfois. C. M.
Signes extérieurs. Il en a sélectionné 144. 144 halls d’entrée qui, selon lui, Karl Kolbitz, symbolise le mieux Milan, la capitale économique italienne, illustre le mieux la créativité d’architectes parfois encore débutants à l’époque, parfois déjà superstars, parfois même anonymes… 144 halls milanais imaginés par Gio Ponti, Luigi Caccia Dominioni ou Piero Portaluppi. 144 halls à chaque fois parfaitement identifiés (adresse exacte comprise) et très justement replacés dans le contexte économique et surtout historique de leur époque. 144 halls, à la fois témoins et illustrations. Pour avoir encore plus envie, là ou encore là, de pousser la porte. C. M.
Voyages immobiles. La très inventive collection de livres de voyage, « 36 hours » (un best-seller de l’éditeur Taschen), imaginée et dirigée par Barbara Ireland et réalisée en collaboration avec le New York Times, s’enrichit de deux nouveaux titres. Avec eux, on suit les traces de journalistes et photographes spécialisés, on se glisse dans les pas de découvreurs compulsifs. Explorer : plages, îles & côtes nous entraîne des Bermudes au Pays basque, en passant par Ningaloo, en Australie, dans 25 voyages de rêve ; tandis que Explorer : montagnes, déserts & plaines nous fait voyager de la Vallée des fleurs aux marais d’Okefenokee, via les Dolomites. A paraître prochainement, deux autres opus : Route, rail & piste et Villes & Métropoles. Parfaits pour voyageurs immobiles ou nomades en mal d’inspiration. C. M.
Lire aussi
The Good Books : la littérature comme vision de notre futur