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Sans prendre le train, il est possible, grâce aux brasseries de gare, de retrouver ces atmosphères si particulières des départs et des arrivées.
Quelques silhouettes cahotant avec leur valise, des regards rivés aux pendules, c’est cela aussi le climat des brasseries de gare de Paris et d’ailleurs…
5 brasseries de gare à Paris
Ancienne gare d’Orsay, Restaurant du Musée d’Orsay. Il y avait donc ici une gare et les trains venaient déposer leurs soupirs le long des quais jusqu’au début des années 70. Il y avait même un grand hôtel de luxe avec une salle de restaurant spectaculaire qui fut préservée lors de la transformation des lieux au début des années 80. Cette salle est une véritable œuvre d’art, avec ses nombreuses fresques murales, une hauteur de plafond enthousiasmante et d’immenses fenêtres offrant un Paris enchanteur. Jean‑Michel Wilmotte a déposé une touche contemporaine, égayée par les chaises dessinées par l’artiste Jacopo Foggini. Quant à la cuisine, elle a été confiée au groupe Alain Ducasse. Celui‑ci déroule donc une technique irréprochable, avec des plats formatés respectant le genre : filet de bar au four, légumes du moment, sucs de cuisson au porto ; pièce du boucher, échalotes confites et frites ; céréales, légumineuses et champignons… Esplanade Valéry‑Giscard‑d’Estaing, Paris 7e. musee-orsay.fr
Gare Saint-Lazare, Lazare. Éric Frechon, 3 étoiles au Bristol, à Paris, n’a pas mis longtemps à deviner ce qu’on attendait de lui lorsqu’il a ouvert cette brasserie, en septembre 2013, à la gare Saint‑Lazare. Il connaissait déjà le style bistrotier puisque, dès le milieu des années 90, il avait épaté la galerie avec son bistro La Verrière, près des Buttes‑Chaumont. Il a vite retrouvé ses marques, dans un décor de bois, cuivre, laiton, tissu, pour abattre son maquereau en terrine, gelée de vin blanc et raifort, le merlan de ligne rôti aux croûtons et pignons ou encore l’une des meilleures saucisses-purée de Paris. Il y a même, ici, l’un des meilleurs jambon‑beurre de Paris : pain baguette maison, jambon Prince de Paris, beurre Bordier, belle croustille ! Ambiance urbaine, notamment au café du matin.
Face à la gare Saint‑Lazare, Brasserie Mollard. C’était une époque, en 1895, où, lorsqu’on s’embarquait dans la construction d’un restaurant, il s’agissait souvent de faire le plus beau de Paris. D’où une surenchère de mosaïques de Sarreguemines, d’architectes en vue (celui du Negresco et d’Angelina), et même d’ornements pour le meuble de caisse ! Tout était objet de prouesse technique. En 1965, après des années d’errance, la célèbre brasserie située face à la gare Saint‑Lazare retrouva ses fresques d’origine, ses tons vert d’eau, bleu roi, dorés, ses marbres beiges et marron sur de grandes colonnes. La carte a gentiment changé et délivre les grands classiques de brasserie – plateaux de fruits de mer, choucroute, entrecôte grillée béarnaise, homard thermidor… – dans une ambiance surannée, au milieu d’habitués et de voyageurs sur le départ (ou le retour). 115, rue Saint-Lazare, Paris 8e. mollard.fr
Face à la gare du Nord, Terminus Nord. C’est comme un phare dans la nuit. Immobile depuis 1925, cette brasserie, avec la lumière drue de ses globes en opaline, veille au grain et, de ses écrans bleutés, vous rappellent les horaires et le quai des trains. Du reste, beaucoup de voyageurs sont là, l’esprit ailleurs, la valise pas loin attendant sur le sol en mosaïque. Plats sérieux, avec l’inévitable entrecôte‑sauce béarnaise, la sole meunière, les plateaux de fruits de mer, la crème brûlée, les pichets de sylvaner… Service à son affaire, virevoltant de table en table, clientèle mélangeant Parisiens du coin et provinciaux en effervescence. Le bonheur de la brasserie avec ses ralentis, son bar en acajou, ses plats à la remorque et cette atmosphère rare d’instants entre ici et ailleurs.
Gare de Lyon, Le Train Bleu. La salle est enthousiasmante avec ses volumes généreux, ses fresques et ses longues banquettes. On se croit déjà ailleurs si ce n’est qu’en contrebas (demandez une table au-dessus des quais) il y a la foule des voyageurs qui, parfois, accourent à l’ultime minute avant le départ de leur train. Le décor vaut une longue méditation, puisque s’y profilent les destinations desservies : lac d’Annecy, Villefranche, Lyon, Menton… La carte reprise en main par Michel Rostang essaie de tenir la route. Elle y arrive avec crème et technique : quenelles de brochet à la lyonnaise ; gigot d’agneau servi à la voiture de tranche ; côte de veau Foyot, crêpes Suzette flambées au Grand Marnier. Clientèle disparate, parfois bourgeoise et étrangère. Service agréable selon les rangs. Place Louis-Armand, Paris 12e. le-train-bleu.com
A Metz, Rennes, Roanne et Chamonix
Gare de Metz, Terroirs de Lorraine. Dans la gare de Metz, elle aussi élue plus belle gare de France, il y avait l’un des meilleurs restaurants de la ville, réputé pour ses spécialités régionales. Après sa fermeture, une librairie s’y installa, mais, depuis la réhabilitation de cette gare en 2016 et l’arrivée de Michel Roth (ex‑Ritz), une figure de la restauration née à Sarreguemines, le buffet a repris des couleurs (bleu et moutarde) et, surtout, une belle vitalité, avec une carte riche en spécialités locales, à l’image d’une vivifiante potée lorraine ou encore d’un fish and chips réalisé avec des poissons d’eau douce, d’une quiche mosellane, d’un pressé de truite fumée et foie gras de canard, d’un biscuit de brochet croustillant et son coulis orange-cardamome…
Gare de Rennes, Paris-Brest by Christian Le Squer. Sous la houlette de la famille Ruello – également présente au moulin de Rosmadec, à Pont-Aven –, le Breton Christian Le Squer – 3 étoiles au Four Seasons George V, à Paris – œuvre à la gare de Rennes depuis juillet 2019. Celui-ci a vite compris qu’il ne fallait pas tourner autour du pot. Dans ce vaste restaurant de 130 couverts, place aux plateaux de fruits de mer, pâté en croûte, kouign‑amann salé en soupe de lait ribot, poitrine de cochon confite et caramélisée, frites du mont Saint-Michel… le tout servi dans un décor lumineux – signé Jouin-Manku – et épaulé par une carte de vins délurée par Éric Beaumard. Et ce, à 1 heure 25 de Paris… 19, place de la Gare, Rennes. parisbrest.bzh
Face à la gare de Roanne, Le Central. Tout à côté de l’ancienne maison Troisgros – dorénavant installée à Ouches, près de Roanne –, le Central a pris le relais face à la mythique gare repeinte un beau jour en rose et vert pour célébrer le fameux saumon à l’oseille créé par Jean et Pierre Troisgros. Le Central est un café‑restaurant‑épicerie situé dans un ancien hôtel des années 1920. Le décor est plaisant et chaleureux, et délivre une atmosphère provinciale de bon aloi. N’allez pas chercher midi à quatorze heures, car ici la cuisine est de brasserie, avec ses rognons, cuisses de grenouilles‑frites et le marché du jour. Plats soignés, pas donnés, mais apportant le souvenir ouaté d’un mythe encore vivant de la gastronomie française.
Chamonix, Le Refuge du Montenvers. Il n’est pas nécessaire de rameuter de longs trains et des gares cathédrales. On peut aussi déguster, comme on le ferait d’un sorbet, une gare de montagne, celle de Chamonix, par exemple, et se laisser hisser onctueusement vers les sommets avec le train touristique du Montenvers. Régulièrement, il égrène ses montées. En 25 minutes, vous quitterez la vallée encaissée pour gagner lentement, à travers rocailles, sapins et granit, la gare ferroviaire du Montenvers. C’est ici que se trouve la mer de Glace, ou plutôt ce qu’il en reste. Le panorama est néanmoins saisissant ; mieux encore, on peut s’y restaurer, voire y dormir. La table est déterminée, avec ses fondues, tartiflettes, gratinées à l’oignon, écorce de sapin, diots de Savoie, pintade aux truffes… Impasse du Montenvers, Chamonix-Mont-Blanc. refugedumontenvers.com
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