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JR rejoue « Le Crime de l’Orient-Express » pour les trains Belmond

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Artiste de renommée mondiale, JR redéfinit les voyages de luxe avec son projet "L'Observatoire" pour le train Venise Simplon-Orient-Express, du groupe Belmond.

The Good Life a rencontré JR pour discuter de cette expérience immersive où chaque voyage devient une œuvre d’art en mouvement. En réinventant le concept du voyage d’exception pour Belmond et son train Venise Simplon-Orient-Express, l’artiste poursuit sa démarche avant-gardiste.


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Rencontre avec JR, créateur d’un wagon de l’Orient Express

The Good Life : Comment est né le projet de collaboration avec le VSOE (Venise Simplon Orient Express) ?

JR : Mes projets sont souvent nés d’un hasard, mais je pense que ce sont des hasards dans lesquels on dirige notre énergie… Les trains font partie de ma vie depuis longtemps. Quand le VSOE m’a approché pour discuter d’une collaboration, je n’aurais jamais imaginé qu’il soit possible d’aller si loin, et de faire quelque chose d’aussi fou ! J’ai eu carte blanche pour créer un monde qui me ressemble. Je suis touché de pouvoir faire entrer les gens dans ma bulle.

Le wagon du VSOE.
Le wagon du VSOE. JR

Prendre un train pour rejoindre Venise en plusieurs jours alors qu’on pourrait y aller en moins de deux heures en avion, ça peut sembler contre-productif, non ?


J’ai souvent du mal à expliquer aux gens qui disent : « Attends, mais pourquoi je devrais passer autant de temps en voyage alors qu’il existe des moyens d’aller beaucoup plus vite ? ». On vit dans une phase ‘live’ où tout doit aller très vite. Pour pouvoir retourner en arrière, à une époque où la notion de temps n’était pas la même, on doit presque jouer un rôle. C’est peut-être devenu la seule manière de réapprendre à ralentir. Par exemple, à bord du VSOE, il faut s’habiller, il y a tout un rituel. On se met presque dans la peau de quelqu’un d’autre pour oublier le monde extérieur. Quand on se retrouve pris dans ce jeu-là, et que le train part, on comprend à quel point c’est essentiel de ralentir. C’est comme si c’était quelque chose qui était ancré en nous, et que l’on avait perdu de vue… Le rythme du voyage aide à se reconnecter à tout ça.

Le trajet va être un peu plus une épopée, mais il va se passer des choses pendant ce voyage.

Pensez-vous qu’après les confinements liés à la pandémie, on est devenu plus attentif à la qualité de l’expérience qu’à la destination, et au sens que l’on donne à notre temps libre ?

Absolument ! J’ai abordé la création du wagon VSOE comme une destination à part entière. L’important n’est pas là où on va, c’est l’expérience d’y aller qui devient le voyage lui-même ! J’ai pensé le concept comme un moment à part, qui se déroule en avançant vers Venise ou vers Paris. C’est encore plus efficace qu’un avion au final, parce qu’on vit quelque chose de fort tout en avançant vers sa destination. C’est un processus que je dévoile à travers la collaboration avec Belmond, mais il a toujours fait partie de mon chemin artistique. Je l’utilise dans tous les projets que je fais d’ailleurs.

JR venise simplon orient express VSOE

C’est-à-dire ?

Quand je demande de l’aide pour coller des images sur le Louvre ou sur le sol de la prison de Tehachapi en Californie, l’un des établissements carcéraux les plus violents du pays, l’œuvre se trouve dans l’action de faire et pas tellement dans le résultat. Ce sont des projets participatifs. Les gens qui prennent part au projet se rappellent bien sûr de ce qu’ils ont vu, mais au final ils se souviennent surtout des gens qu’ils ont rencontrés, du temps qu’ils ont passé sur place, de la difficulté ou pas à coller une grande image. C’est toujours l’expérience qui nous marque.

Comment avez-vous imaginé la décoration du wagon ?

J’ai eu la chance de travailler avec un wagon historique. C’est une des voitures qui s’est retrouvée bloquée dans la neige en Turquie et qui a servi d’inspiration au roman d’Agatha Christie, « Le Crime de l’Orient-Express ». J’ai pris appui sur cette histoire pour en écrire une autre, qui me ressemble, tout en rendant hommage à son passé. A l’intérieur, on trouve pas mal de clins d’oeil à mes projets, mêlés à l’esthétique des années 1930. J’ai toujours aimé conserver l’histoire tout en la faisant voyager, ou évoluer, de manière très consciente. J’aime explorer les années pré-technologie, où on profitait pleinement de la création. C’est pour moi une manière de se reconnecter avec la part de rêve qui est en chacun de nous.

JR avec les plans du VSOE originel.
JR avec les plans du VSOE originel. JR

Le VSOE est un palace sur roues, réservé à une clientèle aisée. Pensez-vous que ce rêve soit réellement accessible à tous?

Je pense que oui. Le voyage va marquer la vie des gens qui seront dans le train, mais aussi celle de ceux qui n’y entreront jamais. Il y a ceux qui en rêvent, ceux qui pensent que le train n’existe plus, ou alors que dans les livres. L’imaginaire appartient à tous, pas uniquement à ceux qui peuvent monter physiquement à bord du wagon. C’est quelque chose que je trouve très beau. Il y a aussi un côté nostalgique des années où on partait en vacances en train-couchette. Ça n’était pas le grand luxe, mais ça m’a laissé un souvenir indélébile. Je me souviens des paysages qui défilent, et du temps qu’il fallait pour aller d’un point A à un point B. Toute cette accélération et ce besoin de se déplacer le plus rapidement possible ne nous a pas tellement servi au final.

C’est peut-être ça le nouveau luxe… On s’écarte du besoin frénétique d’amasser des choses, et on se tourne vers des expériences qui ralentissent le temps ?

Et c’est plus démocratique qu’il n’y paraît. On n’est évidemment pas obligé de faire le voyage en VSOE, mais le fait que ce genre de proposition existe introduit la notion du cool sur le fait de prendre le temps. Il y a beaucoup de trains qui font des Paris-Nice, des Paris-Rome, etc. qui vont prendre beaucoup de temps. Le trajet va être un peu plus une épopée, mais il va se passer des choses pendant ce voyage. À partir du moment où on rend ça cool, ça redevient une envie, qui peut nous aider à changer nos habitudes et notre manière de voir le monde.

JR venise simplon orient express VSOE


« Tehachapi », le documentaire JR sur une prison californienne est actuellement en salles.

Site internet de VSOE


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