The Good Business
Il est l’un des rares horlogers à la tête d’une manufacture. Lionel a Marca, le nouveau président de Breguet s’appuie sur sa maîtrise technique pour diriger cette illustre marque du groupe Swatch vers un avenir brillant. La cinquantaine sportive, l’élégant directeur aux origines transalpines entend respecter l’immense héritage de cette maison qui a presque tout inventé en horlogerie.
Lionel a Marca a pris le poste de CEO de la marque Breguet en août 2021. C’est en 1992 que cet horloger-rhabilleur de formation intègre le Swatch Group, superstructure horlogère comprenant dix‑huit marques réputées, pour gravir tous les échelons, jusqu’à prendre la direction des opérations produits de Blancpain, puis celle d’Harry Winston en 2014. Aujourd’hui à la tête de Breguet, il entend respecter l’immense héritage de cette maison qui a presque tout inventé en horlogerie.
The Good Life l’a rencontré au sein de l’élégante boutique Breguet, place Vendôme, à Paris, dans le grand salon privé, où la conversation s’engage entre une partie des collections exceptionnelles du musée Breguet et les vitrines contiguës.
6 questions à Lionel a Marca, président de Breguet :
The Good Life : D’où venez‑vous, Lionel a Marca ?
Lionel a Marca : J’ai 55 ans et je fais partie de Swatch Group depuis trente ans. Au début, j’ai travaillé dans le montage de mouvements de prestige, notamment chez Frédéric Piguet. Je participais à la mise au point du tourbillon central Omega. À l’époque, les ingénieurs dessinaient encore les pièces sur papier et non sur ordinateur. J’intègre Blancpain en 2004 ; professionnellement, c’est un rêve que j’atteins. Je vais rester vingt‑deux ans au sein de cette enseigne. J’y ai rencontré Marc A. Hayek, avec qui je partage la même vision. Il me nomme vice-président produits, responsable de la partie opérationnelle.
The Good Life : Qu’avez‑vous trouvé en arrivant chez Breguet ?
Lionel a Marca : Je peux déjà vous dire que grâce à son héritage et son exigence, les finitions des montres Breguet sont exceptionnelles. Même si l’on retrouve des complications similaires chez d’autres marques, le soin apporté à chaque détail chez nous n’a aucun équivalent. C’est ce patrimoine, cette histoire qui font la richesse de notre entreprise. La marque dispose d’une manufacture intégrant des équipes performantes, notamment dans le domaine de la R&D, mais aussi dans les métiers d’art, héritage de Nicolas G. Hayek, qui tenait particulièrement à perpétuer ces savoir-faire. L’esprit est là, la compétence aussi. Mon rôle est aujourd’hui de les guider dans la bonne direction. La richesse s’exprime également à travers nos 6 collections, que je souhaite conserver. Nous allons toutes les revisiter, au fur et à mesure.
Comment se vendent les montres Breguet ?
Très bien ! Nos produits sont intergénérationnels. Au sortir de cette pandémie, les gens souhaitent retrouver des valeurs intemporelles. Les montres en font partie. Il n’y a rien de plus inutile qu’une montre, et pourtant, ces objets se vendent mieux que jamais. 2020 a été une année particulièrement difficile au vu des nombreuses fermetures, mais 2021 a été une excellente année. En France, cela a très bien fonctionné. Nous avons su renouer avec la clientèle locale, notamment à travers plusieurs événements en ligne, et nous avons réussi à compenser la problématique de l’absence des touristes.
Que voulez‑vous mettre en place ?
Je souhaite que l’histoire de cet horloger génial soit plus largement connue. Il a tout inventé, du tourbillon au crowdfunding, avec sa montre à souscription, ou aux bases de données clients à travers nos grands livres conservés dans notre musée de la Place Vendôme. C’est aussi l’un des premiers à avoir développé les comptoirs. Au XVIIIe siècle, il est déjà présent en France, en Russie et en Espagne. Enfin, c’est un designer extraordinaire, créateur d’un style très épuré, dépouillé et élégant.
Pour le futur, où souhaitez‑vous emmener Breguet ?
Les produits à venir reprendront les signatures de la marque dans un esprit contemporain. En matière de complications, la gamme comprend des pièces ultrafines, des répétitions minutes, des tourbillons… Notre challenge, aujourd’hui, est de créer des montres aux complications innovantes tout en étant simple d’utilisation pour le porteur. Nous allons aussi travailler les matières. Nous avions déjà le titane dans la collection Marine, nous pouvons potentiellement décliner ce matériau dans d’autres collections. Pour autant, je ne vais pas faire une Reine de Naples en titane, ça n’a pas de sens. Concernant un autre sujet, celui de la durabilité, Swatch Group a mis en place une politique générale. Mais nous œuvrons aussi à notre niveau. La manufacture accueille des panneaux solaires sur son toit, depuis une dizaine d’années nous procédons au recyclage des eaux, nous cherchons aussi à réduire le plastique à usage unique. Nous étudions jusqu’à la quantité de feuilles de papier utilisées pour les imprimantes.
Le petit mot de la fin ?
En ce qui me concerne, je dois beaucoup à la famille Hayek. Je ne les remercierai jamais assez d’être là où je suis. À présent, je suis plus que jamais au service de Breguet. Travailler pour cet horloger est une vraie fierté.
Marine Hora Mundi, une complication facile d’accès
Lionel a Marca souhaite revenir, pour ses futurs modèles, à des complications faciles d’utilisation. La fonction « Hora Mundi » (heures du monde) s’inscrit parfaitement dans ce cahier des charges. Son fonctionnement est d’une grande simplicité. Un vrai régal ! Il suffit de tirer la couronne à 8 heures et de sélectionner la ville de son choix. Puis de tirer la couronne à 3 heures et régler l’heure et la date. Pour la seconde ville de son choix, il faut réitérer l’opération : tirer la couronne à 8 heures et choisir sa ville de destination : New York, La Paz, Honolulu… ? Dès lors, une simple pression à 8 heures, permet de sauter d’un fuseau à l’autre, instantanément. Saisissant !
L’astucieux mécanisme fonctionne par le biais de cames et de marteaux et d’un différentiel intégré au mouvement. Cette complication apparaît en 2011, sur la collection Classique. Elle s’insère, cette année, dans le boîtier de la nouvelle Marine Hora Mundi. Cette famille Marine rappelle les liens anciens unissant Breguet et le maritime. La manufacture devient l’horloger de la Marine royale française en 1815.
Cette montre Marine Hora Mundi s’habille d’or rose ou blanc. Son splendide cadran bleu abysse, notamment, est une petite merveille de profondeur, de volume et de relief. Le regard y plonge avec jubilation. Il accueille une mappemonde ainsi que deux guichets : villes du monde à 6 heures, et date à 12 heures. Une animation soleil/lune (jour/ nuit) à 4 heures complète l’ensemble. Pour contempler cette magnifique montre et son remarquable cadran, un petit tour en boutique s’impose !
Lire aussi
Renault : hydrogène, R5 et millennials, une interview exclusive Luca de Meo
Interview : rencontre avec Valérie Plante, mairesse de Montréal
Montres : 10 questions à François-Henry Bennahmias CEO d’Audemars Piguet