The Good Business
Edward Murray – Maire de Seattle
Difficile de dire quel est le principal titre de gloire d’Edward Murray – Ed, pour les intimes et pour les administrés –, maire démocrate de la ville de Seattle depuis janvier 2014. Auparavant, il a été membre de la chambre des représentants de l’Etat de Washington de 1995 à 2007, puis sénateur jusqu’en 2013. En deux ans de mandat, Ed Murray a fait voter plusieurs lois qui ont mis Seattle sur le devant de la scène et en ont fait une ville plutôt avant-gardiste en matière d’administration municipale. Droits des homosexuels, aide au logement pour les moins fortunés, plan d’urgence pour les sans-abri, nouvelle taxe pour améliorer les transports : chacune de ses décisions lui vaut l’adhésion et le soutien d’une large majorité des habitants. Ed Murray est aussi le premier maire élu d’une grande ville américaine à être homosexuel et marié. Fervent défenseur des droits de la communauté Lesbiennes, Gays, Bi et Trans (LGBT) depuis le milieu des années 2000, il a soutenu activement le projet de loi du domestic partnership, une sorte de pacs. Votée par l’Etat de Washington en 2007, cette loi a été suivie d’une autre, en décembre 2012, autorisant le mariage entre personnes du même sexe. Rien d’étonnant, donc, à ce que Seattle héberge aujourd’hui la deuxième plus importante communauté LGBT des Etats-Unis, après San Francisco. Autre fait notoire : c’est à Seattle que les Américains vont le moins à l’église. Ce qui, selon Ed Murray, est une preuve d’ouverture d’esprit : « J’ai été élu maire alors que je suis d’origine irlandaise, catholique et que je vais à la messe ! Cela prouve que les habitants de Seattle sont particulièrement tolérants ! » C’est à Ed Murray encore que les employés doivent de bénéficier d’un salaire horaire minimum de 15 dollars. Cette décision va s’appliquer progressivement, d’ici à trois ans pour les entreprises de plus de 500 employés et, d’ici à sept ans pour les plus petites. Une mesure qui a été décidée bien avant que New York n’en fasse autant pour les employés des fast-foods. Et puisque l’Etat de Washington a légalisé le cannabis fin 2012, le maire de Seattle a pris des mesures pour l’implantation de points de vente et de dispensaires autorisés. Reste que les défis à relever sont encore nombreux. En novembre dernier, Ed Murray a fait voter une nouvelle taxe pour financer un plan de réaménagement complet des transports dans la ville, qui a de plus en plus de mal à gérer sa croissance. Le revers de la médaille de son attractivité… S. C.
Paul Allen – Cofondateur de Microsoft et mécène
Difficile de savoir lequel de Bill Gates ou de Paul Allen mérite le titre de figure tutélaire de Seattle ! Tous deux natifs de la ville, ils y vivent et y investissent depuis qu’ils ont arrêté leurs études pour cofonder Microsoft, en 1975. Tous deux figurent au classement des 400 Américains les plus riches. Milliardaire – sa fortune est estimée à 18,1 milliards de dollars, ce qui le situe à la 26e place –, mécène et touche-à-tout passionné, Paul Allen incarne chacun des domaines qui caractérisent Seattle. Ses passions – et ses investissements – vont du football américain à l’art, en passant par l’aviation et la recherche scientifique. Il est propriétaire de l’équipe de football américain de Seattle, les Seahawks, qui a remporté la finale du Super Bowl en 2014, et finance l’Allen Institute for Brain Science. Guitariste depuis qu’il a entendu Jimi Hendrix (natif de Seattle aussi), il a enregistré un album avec son groupe, The Underthinkers, et écrit ou coécrit les 13 titres de l’album Everywhere At Once, sorti en 2013. En bon philanthrope, il reverse le montant des ventes au fonds pour l’éducation du musée Experience Music Project (EMP) qu’il a créé. La grande majorité de ses projets, investissements et entreprises est gérée par sa société, Vulcan Ventures, qui se décline en Vulcan Aerospace, Capital, Real Estate, Technologies et Productions. Le montant global engagé jusqu’à présent atteindrait 2 milliards de dollars. Vulcan, propriétaire de nombreux immeubles du centre de Seattle, a aussi investi dans des dizaines d’entreprises et de start-up. Mais les vraies passions de Paul Allen sont à chercher du côté d’Everett et des hangars qui jouxtent les usines de Boeing. Il y a entreposé sa collection d’avions de combat de la Seconde Guerre mondiale – tous en état de vol –, ainsi que des véhicules militaires. Cette passion pour l’aviation l’a conduit à soutenir le projet de SpaceShipOne – premier avion expérimental privé américain ayant volé au-delà de l’atmosphère –, qui a effectué ses vols en 2004. Avec succès, puisque Richard Branson a acquis une licence pour sa société Virgin Galactic. Ce projet est prolongé par Stratolaunch, un avion géant destiné à lancer des véhicules suborbitaux ou des fusées orbitales. Paul Allen possède plusieurs yachts, dont i, un 126-mètres qu’il loue à des expéditions scientifiques et qui a permis de localiser l’épave du Musashi, en 2015, un cuirassé japonais de la Seconde Guerre mondiale. Comme disait Malcolm Forbes : « La différence entre un homme et un enfant, c’est le prix de ses jouets… » S. C.
Kimerly Roschah –Directrice du Seattle Art Museum
Plus qu’un musée, le Seattle Art Museum (SAM) est constitué de trois sites : l’établissement principal du centre-ville, l’Asian Art Museum, dans Volunteer Park, et l’Olympic Sculpture Park, en front de mer. Un défi dans une ville en pleine expansion où le mécénat règne en maître.
The Good Life : Quelle était la situation du SAM quand vous êtes arrivée en 2012 ?
Kimerly Roschah : En 2007, le musée avait été agrandi en partenariat avec la Washington Mutual Bank. Le SAM était propriétaire de 12 étages de l’immeuble et n’en occupait que 3. Les autres étaient loués par une banque qui a fait faillite en 2008. Fragilisé par l’agrandissement et par l’ouverture du parc de sculptures, le musée a traversé une grave crise financière. Telle était la situation à mon arrivée. Les choses se sont arrangées grâce à la venue d’un nouveau locataire, d’un refinancement du prêt immobilier et d’une économie globale qui se porte mieux. Il a fallu aussi retravailler la programmation en incluant davantage d’art contemporain.
TGL : De quoi sont constituées les collections ?
K. R. : Il s’agit d’un musée généraliste. Mais la force de notre collection, c’est l’art moderne américain de l’après-guerre. Nous avons reçu récemment le don d’une collection majeure [celle de Bagley et Virginia Wright, NDLA]. Nous avons aussi de très belles pièces d’art africain traditionnel, d’art amérindien de la côte Ouest et l’une des meilleures collections asiatiques du pays.
TGL : Quelle est l’implication des grands philanthropes de la ville ?
K. R. : Microsoft et la famille Gates sont des donateurs. Paul Allen l’est aussi, par l’intermédiaire de sa fondation. Nous avons d’ailleurs monté une exposition à partir de sa collection qui fait une tournée dans tout le pays. Starbucks est également l’un de nos partenaires, en particulier en ce qui concerne l’art contemporain. Nous n’avons pas encore réussi à faire participer Amazon, mais nous y travaillons ! Je suppose que les intérêts philanthropiques de son fondateur Jeff Bezos sont ailleurs. Mais je ne désespère pas, c’est une jeune compagnie.
TGL : Paul Allen vient d’ouvrir son propre centre d’art, le Pivot Art + Culture. Qu’en pensez-vous ?
K. R. : Réussir à atteindre le public n’est pas une chose facile. Il va lui falloir dépenser énormément d’argent, car la communauté ne sera pas forcément prête à contribuer à sa vision, du moins pas tout de suite. Il est certain que nous préférerions que ces philanthropes fassent équipe avec nous plutôt que de monter d’autres musées ou galeries et faire cavalier seul.
TGL : Ces jeunes qui arrivent à Seattle pour y travailler sont-ils intéressés par l’art ?
K. R. : Ça n’est pas leur première préoccupation. Mais je pense qu’ils s’y intéresseront lorsqu’ils seront plus stables et fixés. Ce sera à nous de nous montrer présents pour eux à ce moment-là. Pour la première fois, cet été, nous avons eu une vraie foire d’art contemporain, qui a été mise en place par Paul Allen. Ç’a été un grand succès. Il faut démarrer quelque part ; le potentiel est là, et il est énorme. S. B.
Dennis Muilenburg – Président de Boeing Company
Ne l’appelez plus le numéro 2 ! Le 1er juillet 2015, Dennis Muilenburg est devenu président-directeur général de Boeing Company, en remplacement de Jim McNerney dont il était le numéro 2 depuis fin 2013. Contrairement à son prédécesseur, manager chez General Electric et ancien dirigeant de 3M, Dennis Muilenburg est un pur produit de l’ascension sociale made in Boeing ! D’aucuns ont vu dans sa nomination la revanche des ingénieurs ! Né en 1964 – comme Jeff Bezos –, Dennis Muilenburg est ingénieur aéronautique et spatial. Il a rejoint Boeing dans la région de Seattle comme stagiaire en 1985, après avoir terminé ses études à l’université d’Etat de Washington. A cette époque, Seattle est encore le fief de Boeing, qui y a vu le jour en 1916. Le siège déménagera à Chicago en 2001, mais la région de Seattle reste le cœur industriel de l’entreprise. La quasi-totalité des avions commerciaux y est toujours fabriquée et assemblée. Pendant une quinzaine d’années, Dennis Muilenburg mène sa carrière d’ingénieur sur des projets tant civils que militaires. Puis il dirige les systèmes d’armes pour le programme Joint Strike Fighter, avant d’enchaîner les postes de vice-président : programmes et ingénierie pour la gestion du trafic aérien, division des systèmes de combat, services et support pour l’entité Boeing Defense, Space & Security (BDS), entité dont il prend la présidence en 2009. En décembre 2013, il est nommé président et directeur des opérations du groupe, poste nouvellement créé par le conseil d’administration qui anticipe la succession de Jim McNerney. Devenu « le grand patron », Dennis Muilenburg peut s’appuyer sur sa connaissance et sur ses expériences dans les différentes entités du groupe, notamment ses années passées à la présidence de la division BDS. Des compétences qui lui seront bien utiles pour réorganiser cette activité et l’adapter aux réductions budgétaires du Pentagone. La to-do-list de Dennis Muilenburg prévoit aussi l’amélioration de la productivité des best-sellers de Boeing Aviation commerciale, notamment le 737, ainsi que le renouvellement du 777. Il lui faudra également réduire les coûts de production et consolider les premiers succès du 787. Ses années d’ingénieur à Seattle seront sans aucun doute un atout majeur dans son jeu pour relever ces défis ! S. C.
Gray Madden – Président de Filson
Nommé président de Filson en décembre 2013, Gray Madden a pour défi de tripler le chiffre d’affaires de cette marque de vêtements séculaire de Seattle, une belle endormie avec une histoire à faire rêver les story tellers de la communication. Filson est née à l’époque de la ruée vers l’or, avec ses chercheurs en quête de fortune. C. C. Filson leur propose des vêtements et de l’équipement adaptés à leurs explorations. Puis la ruée laisse place à l’industrie forestière et aux bûcherons en chemises à carreaux. Voilà les bases du style Filson. Des bases solides, authentiques, et dans l’air du temps. Une histoire et des produits, garantis à vie, en grande partie made in Seattle. Pour preuve : ces grandes fenêtres qui permettent aux clients du nouveau flagship de voir l’atelier de fabrication des sacs de la marque, les grands classiques et les best-sellers. Depuis 2012, Filson appartient à Bedrock Manufacturing Co., compagnie fondée par Tom Kartsotis, créateur, entre autres, de la compagnie Fossil et responsable du réveil de Detroit avec la marque Shinola. Lequel a proposé à Gray Madden, alors Global Brand Manager chez Fossil pour les montres Burberry, de partir à Seattle. Une fois en poste, Gray Madden constate que Filson n’a jamais fait de publicité et qu’elle fonctionne uniquement sur sa notoriété et sur la distribution d’un catalogue, une pratique aussi ancienne que la marque. Chaque mois, des centaines de milliers d’exemplaires sont envoyés dans les foyers américains, jusqu’à 2 millions en période de fêtes. Un outil encore indispensable, mais désormais appuyé par des campagnes publicitaires. Aujourd’hui, 50 % des ventes se font en ligne, 35 % dans les magasins et 15 % à l’export. Filson possède maintenant sept boutiques aux Etats-Unis et deux à Londres, ainsi que des distributeurs en Europe et en Asie. Gray Madden a également engagé une nouvelle équipe de création, chargée de développer une collection femme, un secteur encore inexploité par la marque. « J’ai l’impression que nous sommes une start-up de 118 ans ! » résume Gray Madden. C’est vrai, la chemise à carreaux règne en maître dans les bureaux de Filson, suivie de près par l’emblématique gilet moleskine. Des barbus, des vélos et un esprit Pacific Northwest qui fait encore rêver les chercheurs d’or urbains aux quatre coins de la planète. S. B.
Pete Nordstrom – Coprésident de Nordstrom
La première chose que l’on remarque de Pete Nordstrom, c’est qu’il est grand. Mais également, souriant et élégant. On n’en attendait pas moins d’un descendant des fondateurs des magasins haut de gamme Nordstrom (13,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2014). Entretien.
The Good Life : Quels sont les liens entre Nordstrom et Seattle ?
Pete Nordstrom : Nous sommes fiers d’être de Seattle ; nous avons notre propre identité. Ce n’est pas New York ou Los Angeles. Ici, nous avons la possibilité d’être nous-mêmes ! Cela nous a laissé le temps de faire de la marque un acteur d’envergure régionale, puis nationale. Seattle est une belle ville, qui a beaucoup changé au cours des dernières décennies. Il y a eu beaucoup d’innovations, c’est stimulant.
TGL : Quelles sont les grandes étapes de l’histoire de Nordstrom ?
P. N. : C’est une évolution qui s’est faite plutôt naturellement. Mon arrière-grand-père est arrivé de Suède et il a ouvert un magasin de chaussures en 1901. La deuxième génération, américaine car née et éduquée dans ce pays, était plus ambitieuse, et plus nombreuse aussi. Elle a multiplié les magasins de chaussures en cherchant à offrir le meilleur, c’est-à-dire de nombreuses pointures pour chaque modèle et un service client de qualité. La troisième génération, celle de mon père, a écrit un nouveau chapitre en étendant l’offre, aux vêtements d’abord, puis aux cosmétiques et à d’autres rayons. Et ça a marché ! Cette génération a ensuite voulu sortir de Seattle. Le succès des centres commerciaux et l’introduction en Bourse de Nordstrom, en 1971, leur ont permis de le faire. Puis ma génération est arrivée, en même temps que le numérique. Nous avons ouvert notre site de vente en ligne, ainsi que les premiers magasins, au Canada et bientôt à Manhattan !
TGL : Etait-il évident pour vous que vous travailleriez dans le groupe familial ?
P. N. : Non ! D’ailleurs, nous ne sommes que quatre des trente-cinq descendants Nordstrom à travailler dans le groupe : mes deux frères et moi, qui sommes coprésidents, et l’un de mes cousins. Et la famille ne détient que 21 % du capital. Mais il n’y a jamais eu d’objectif familial. J’ai commencé à travailler au magasin de Seattle pendant les vacances d’été, puis, à 21 ans, j’ai rejoint le groupe après mes études. J’avais besoin de travailler, je connaissais l’entreprise et j’aimais bien l’idée de collaborer avec mes frères !
TGL : La clientèle de Seattle a-t-elle changé ?
P. N. : Oui. La ville est devenue plus jeune, plus riche, plus dynamique. Avant, Seattle dépendait de Boeing. Aujourd’hui, il y a des dizaines de grandes entreprises qui réussissent. Et l’économie se développe !
TGL : Quels sont vos projets à l’international ?
P. N. : En 2014, nous avons ouvert nos premiers magasins au Canada. Quatre Canadiens sur cinq vivent à moins de 160 kilomètres de la frontière avec les Etats-Unis. Et, en 2018, nous allons ouvrir notre grand magasin à New York ! Mais je ne suis pas sûr que Paris, Milan ou Londres aient besoin de Nordstrom. Peut-être que la prochaine génération sortira du continent nord-américain… S. C.
Jeff Bezos – Fondateur et président d’Amazon
Jeff Bezos est né à Albuquerque, au Nouveau-Mexique, en janvier 1964. Après avoir travaillé pour plusieurs compagnies financières à Wall Street, il crée Amazon en 1994, à Seattle. Vingt et un ans plus tard, avec une fortune personnelle estimée à plus de 47 milliards de dollars, il occupait la quinzième place du classement Forbes des personnes les plus riches du monde. Le 23 novembre 2015, le retour sur Terre de la fusée New Shepard mise au point par sa société Blue Origin, propulsait Jeff Bezos au quatrième rang de ce classement avec une fortune désormais évaluée à 60 milliards de dollars ! Ce travailleur persévérant et acharné a su anticiper l’essor formidable du commerce électronique et a bâti la plus grosse entreprise mondiale de vente en ligne. Malgré des résultats en dents de scie, aussi souvent en pertes que bénéficiaires, la valorisation boursière d’Amazon dépasse les 300 milliards de dollars. Jeff Bezos a multiplié les créations et les acquisitions dans tous les domaines qui contribuent à améliorer les performances économiques d’Amazon. La gamme de liseuses Kindle a fait décoller le marché des livres électroniques. Le rachat de la start-up Kiva Systems a apporté au géant une technologie de robots de transport bien utile dans ses entrepôts. Sans parler des nombreux rachats de sites de vente en ligne, comme Zappos, spécialisé dans les chaussures. Amazon Web Services (AWS), qui fournit nombre de services en ligne de type Cloud comme du traitement de données, du stockage, etc., dote Amazon d’une image plus high-tech et, surtout, lui apporte une marge bénéficiaire bien supérieure à celle de la distribution. Voyages spatiaux, production de films ou presse – il a racheté le Washington Post en 2013 –, Jeff Bezos veut être présent dans tous les secteurs. Pourtant, là où les grands patrons d’Internet suscitent l’admiration, Jeff Bezos attire plutôt les critiques. S’il partage avec Steve Jobs (Apple) et Larry Ellison (Oracle) d’avoir été élevé par des parents adoptifs, sa réputation n’a rien de comparable à la leur. Nommé personnalité de l’année par Time Magazine en 1999, il a été élu « pire patron du monde » par la Confédération syndicale internationale (CSI) en 2014. Réputé « libertarien » (libéral radical), il est plus soucieux des résultats financiers de son entreprise que des conditions de travail de ses employés ou du respect de ses engagements auprès de ses partenaires. Enfin, à Seattle, où le mécénat est pratique courante, il fait figure de radin et n’a commencé à contribuer aux associations locales que récemment. S. C.
Alan Maskin – Architecte associé chez Olson Kundig
Alan Maskin est l’un des cinq associés de la firme d’architecture Olson Kundig. Fondée en 1966, elle fait partie de ces entreprises qui comptent à Seattle. Elle se distingue non seulement par ses réalisations, mais aussi par sa philosophie et par l’ambiance qui règne dans ses bureaux du quartier de Pioneer Square : un joyeux fouillis de bois et de briques, ouvert, vivant et chaleureux. On y trouve des maquettes, des dessins, des œuvres d’art, des objets inventés non identifiés et 140 collaborateurs. Tout le monde adore Alan Maskin. Et on comprend vite pourquoi : sa générosité, son enthousiasme et sa disponibilité ne sont en rien entamés par ses longues années de pratique. Au studio, il est celui qui initie des ateliers créatifs, des installations éphémères et des explorations multidisciplinaires tout en veillant à entretenir un esprit poétique et artistique. Dans son portfolio : le Bill & Melinda Gates Foundation Visitor Center, l’exposition Bezos Center for Innovation, le Frye Art Museum et le Cybercrime Center de Microsoft. Des lieux où il a su mettre en scène des concepts abstraits et livrer du contenu didactique qui passe par l’interaction entre les gens et les espaces. Natif de Boston, Alan Maskin a étudié les beaux-arts et enseigné aux enfants avant de devenir architecte afin, comme il l’explique, de gagner sa vie en dessinant tous les jours. Il choisit Seattle et le programme de l’université de Washington avant d’intégrer Olson Kundig en 1992 pour ne plus en bouger et en devenir l’un des dirigeants. La ville se développe alors au rythme des nouvelles entreprises qui s’y installent et, au milieu d’une architecture un peu générique, se trouvent quelques œuvres fortes, comme l’Experience Music Project (EMP), de Frank Gehry (2000), et la Seattle Central Library, de Rem Koolhaas (2004). Des bâtiments qui n’ont cependant rien à voir avec la tradition de l’architecture du Pacific Northwest. « D’une certaine façon, notre architecture est, aux Etats-Unis, celle qui se rapproche le plus de celle du Japon. Essentiellement à cause du bois, qui a été notre ressource principale. Et aussi parce que nous avons intégré ce matériau à l’architecture moderniste. Enfin, il y a cette relation très forte avec la nature et le paysage, l’eau, les montagnes. » Un vocabulaire qui est encore celui qu’utilisent les architectes d’Olson Kundig et qui suit le principe d’un design inside out, où la fonction dicte la forme et où la lumière d’un ciel souvent gris doit être maximisée. Ce qui n’empêche pas, selon Alan Maskin, de raconter une histoire, de dérouler un fil narratif. Comme cet immeuble résidentiel où chacun des propriétaires devait choisir la couleur de son unité rendant le résultat imprévisible et aléatoire. Ou les projets sur lesquels travaille actuellement Alan Maskin : un jardin inspiré d’une fable d’Esope sur le toit d’un immeuble, en Corée, et un musée consacré aux mots dans la ville de Washington. S. B.