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The Good Life a décidé de relancer son hors-série « 100 % photo », une sélection des clichés les plus marquants parus dans ses numéros classiques depuis 2020. En kiosque depuis le 9 novembre.
Lisez ou relisez l’édito de Paul Miquel, rédacteur en chef de The Good Life, à l’occasion de la sortie du nouveau hors-série photo.
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Edito de Paul Miquel, hors-série photo de The Good Life
« L’art du regard »
Une photographie est plate, elle a des bords et elle est statique ; elle ne bouge pas. Bien que plate, ce n’est pas un vrai plan. L’épreuve a une dimension physique. » Stephen Shore, Leçon de photographie, Phaidon, 2007
C’est un petit livre merveilleux d’à peine 130 pages, que j’adore. Connaissant ma passion pour les images, un ami photographe me l’a offert il y a près de dix ans. Je m’en souviens encore, c’était à la fin de l’été, en Provence. Il avait poussé le vice jusqu’à écrire cette malicieuse dédicace : « Ça va, ne le prends pas mal, c’est un bon auteur ! » Le titre du livre ? Leçon de photographie, de Stephen Shore. Dans ce manuel richement illustré, le maître américain, pionnier de la photographie couleur, distille conseils et remarques, lâchant ses mots comme des haïkus, des plus obscurs aux plus poétiques. Car – on l’oublie parfois dans notre monde fou où, grâce aux téléphones portables, photographier est désormais aussi banal que respirer – la photo est un art difficile, sensible, technique, souvent ingrat aussi. Il existe ainsi différentes manières de regarder et de comprendre les photos et leur univers.
Longtemps enseignant au Bard College, dans l’État de New York, Stephen Shore sait décoder ce monde-là en partant de rien, donc de tout. « Une photographie peut être appréhendée à plusieurs niveaux. D’abord, c’est un objet physique, une épreuve. Sur ce papier imprimé se trouve une image, l’illusion d’une fenêtre ouverte sur le monde. C’est à ce niveau que se lit habituellement une photographie et que l’on découvre son contenu : sou- venir d’un paysage exotique, visage d’un être cher, ro- cher humide, paysage nocturne, explique-t-il. Un autre niveau, compris dans celui-ci, contient des signaux qui s’adressent à l’appareil percepteur de l’esprit. Ils donnent un effet à ce que l’image représente et à l’arrangement de ses éléments. »
Presque logiquement, les mots de Stephen Shore prennent tout leur poids quand il aborde la photographie sous un angle plus technique. Exemple sur l’art du cadrage : « Le cadre définit d’emblée le contenu de la pho- tographie. Les objets, personnes, événements ou formes qui captent l’attention du photographe lorsqu’il effectue ses délicats choix de cadrage sont les bénéficiaires de l’accentuation donnée par le cadre. Celui-ci résonne en fonction d’eux, et en retour, attire l’attention du spectateur sur eux. » Une photographie peut séduire le spectateur au premier coup d’œil. Tenter de comprendre les ressorts de cette attirance, souvent liée à des goûts très personnels, n’est pas totalement dénué d’intérêt ; surtout par les temps qui courent.
Cette année, The Good Life a décidé de relancer son hors-série « 100 % photo », sélection des clichés les plus marquants parus dans ses numéros classiques depuis 2020. Trois ans de good life résumés en images, car, oui, une image est aussi une information, souvent plus percutante que mille mots. Un exemple ? L’œuvre que nous avons sélectionnée en couverture : un photomontage datant de 1949 réalisé pour le magazine féminin argentin Idilio, représentant une jeune femme qui se tient debout, géante, sur la planète Terre et flottant dans l’espace sidéral. Une œuvre signée de l’artiste, photographe et graphiste germano-argentine Grete Stern (Galería Jorge Mara – La Ruche, Buenos Aires), connue pour son imagerie fantaisiste et son regard vif sur la condition féminine de son époque. Sa signature stylistique, empreinte d’une rare poésie, incite, a minima, à la réflexion. Désormais partenaire de Paris Photo, dont la 26e édition se déroulera du 9 au 12 novembre au Grand Palais éphémère, où près de 200 exposants accueilleront amateurs et professionnels, The Good Life veut ainsi marquer son attachement à cet art du regard qui aide – parfois – à changer notre vision du monde.
– Paul Miquel