Horlogerie
Temps pourri, soirées longues à n’en plus finir, croissance en berne… Rien de tel, pour passer la barre de cette fin d’hiver, qu’une bonne dose d’héroïnes. Au chaud parmi ces plumes, on traverse à cheval les plaines du Grand Ouest américain, on navigue parmi les souvenirs d’enfance, les rêves et les quêtes d’absolu.
Dorica castra
Chamboule-tout, ribouldingue… suite à la dépression de sa voisine Julie, qu’elle croyait pourtant remarquable en tout, la vie sans queue ni tête d’Emilienne Valse se mue soudain en une quête obsessionnelle : trouver et photographier la femme parfaite ! Inspirée par l’installation Le Cours des choses des artistes suisses Peter Fischli et David Weiss dans laquelle une série d’objets du quotidien entraînent chacun leur tour le mouvement du suivant, elle s’embarque dans une odyssée rocambolesque qui va la mener de la maison bretonne d’une veuve de pasteur à une fête vénitienne en passant par les couloirs d’un palace parisien et le boudoir sucré d’une nymphe médiatique.
Recherche femme parfaite, Anne Berest, Grasset, 304 p., 19 €.
Hommage
Quel plaisir de retrouver la plume délicate d’Yvonne Baby enluminer les pages « à l’encre bleu nuit », titre de ce recueil de portraits écrits à la troisième personne, éclairant le souvenir de quelques personnalités ayant influencé sa vie. Née en 1929, rédactrice en chef du service Culture du Monde de 1971 à 1985, Yvonne Baby a scruté le siècle avec l’acuité qui sied aux grands esprits, toujours lumineuse, ouverte, cultivée. Une intelligence qui rayonne sur cette galerie d’hommages en clair-obscur réunissant Georges Sadoul, Alberto Giacometti, Louis Aragon, Henri Cartier-Bresson, Hervé Guibert ou encore Catherine Guérard.
A l’encre bleu nuit, Yvonne Baby, éditions Baker Street, 208 p., 18 €.
Muse
Son surnom, Laure, elle le doit à Georges Bataille, dont elle fut la maîtresse et la muse au début des années 30 et qui établit, en 1943, avec Michel Leiris, une édition posthume de ce court récit autobiographique à la poésie saisissante d’une enfance plongée dans un milieu catholique austère. Un monde glauque où règnent une mère et un abbé sadique et dans lequel l’héroïne dit « se sentir seule, magnifiquement seule ». Un étouffoir que Colette Peignot (de son vrai nom) n’aura de cesse de fuir, rejoignant un amant en Corse puis filant en Suisse ou en Russie au gré de ses passions amoureuses et politiques ; sans pour autant échapper à la tuberculose qui l’emportera en 1938, à l’âge de 35 ans.
Le Triste Privilège ou une vie de conte de fée, Laure Allia, 64 p., 6,20 €.
Embarquement
Figure toute-puissante du monde littéraire chez Gallimard puis Flammarion, éditrice de Yasmina Reza, Michel Houellebecq, Catherine Millet, Michel Onfray ou Christine Angot pour ne citer que les noms les plus rutilants, Teresa Cremisi s’est prêtée à l’exercice périlleux de la confession. Depuis Alexandrie, secret bien gardé de ses origines, cette Franco-Italienne entraîne le lecteur dans le chahut d’une rhapsodie cultivée où s’entend l’admiration d’une jeune fille polyglotte pour la littérature qui, tenaillée entre les lamentations dépressives d’une mère sculptrice et les absences d’un père incapable d’affronter la vie, s’en ira, seule, triompher à Paris.
La Triomphante, Teresa Cremisi, Les Equateurs, 191 p., 17 €.
Western
Le Far West est un pays fou qui n’a d’autres frontières que celles de l’imaginaire. Le décor idéal pour laisser libre cours au souffle romanesque si singulier
de Céline Minard qui y fait se rencontrer les destins d’Eau-qui-court-sur-la-plaine, Indienne rescapée d’un massacre, et de deux frères, Brad et Jeff, escortant leur mère mourante. Le point de départ d’un labyrinthe fantastique de scènes où se croisent, se tuent, se volent, se mentent, se fuient, se retrouvent… des personnages inoubliables.
Faillir être flingué, Céline Minard, Rivages poche, 312 p., 8,50 €.
Voyage
Quelle voyageuse êtes‑vous ? Rêveuse ? élégante ? érudite ? ou aventurière ? C’est ainsi que se présente le guide Venise comme je l’aime, de France Thierard, écrit comme un roman, celui d’une amoureuse qui n’aime rien de plus que de se perdre parmi le dédale des ruelles vénitiennes.
Venise comme je l’aime, France Thierard, Elzeviro, 328 p., 23,90 €.