The Good Business
Inauguré en 1995, l’Aéroport International de Denver (DIA) étonne par son architecture originale mais fascine aussi les amateurs de théories du complot. Présentation, avec l’architecte Alan Brown, de l’aéroport le plus mystérieux des Etats-Unis.
Deux fois plus grand que Manhattan, l’Aéroport International de Denver est le plus vaste des Etats-Unis. Ce projet a été initié en 1980, avec d’abord la longue recherche de l’emplacement idéal. Sa construction ne débute en effet qu’en 1989 et le projet initial, gigantesque, prévoit une ouverture pour 1993. Finalement, l’aéroport accueillera ses premiers passagers en 1995, avec 16 mois de retard et un dépassement de budget de 2 milliards de dollars !
De loin, l’aéroport de Denver se fond dans les montagnes alentours. Son toit aux allures de rangées de tipis est devenu une icône mais il se veut avant tout ergonomique. En effet, si l’intention de rendre hommage aux paysages du Colorado est évidente, il ne s’agit pas que d’une coquetterie. Selon Alan Brown, architecte au cabinet Perez en charge de ce dossier, il s’agit avant tout de « faire de l’aéroport de Denver un énorme bassin de lumière naturelle, chaleureux et qui donne l’impression d’avoir beaucoup d’espace ». Un détail important pour une des aérogares les plus engorgées du monde.
Finalement, le parallèle avec l’environnement de la région s’est fait naturellement : « La lumière et les grands espaces sont caractéristiques des plaines proches des Rocheuses. » Selon les architectes, il fallait aussi trancher avec les aéroports stéréotypés que l’on trouve partout sur les terres de l’Oncle Sam. Alan Brown souligne ainsi « une réelle volonté de créer une véritable identité en utilisant des formes qui, en plus d’être caractéristiques de la ville, sont aussi originales et inédites pour des aéroports ou d’autres grandes constructions ».
Le DIA est original, certes, mais les architectes du cabinet Perez ne sont pas pour autant partis de zéro. Pour les réseaux souterrains et l’organisation au sol, c’est l’aéroport d’Atlanta, une référence mondiale des aéroports de correspondance, qui a servi de modèle. Alan Brown reconnaît également l’influence de Schiphol à Amsterdam pour les services, et Changi (Singapour) pour la végétation et son « atmosphère relax ». Mais il n’y a pas que les aéroports qui ont inspiré les architectes de Perez. Brown affirme que pour obtenir un maximum de luminosité dans le terminal, ils se sont inspirés de la configuration de la Grand Central Station de New York.
Un véritable nid à théories du complot
Avec son design étonnant, sa démesure, ses galeries souterraines interminables, ses fresques apocalyptiques, son cheval effrayant et ses signes occultes un peu partout, l’Aéroport International de Denver est une mine d’or pour les amateurs de théories du complot. Un repaire pour l’élite internationale en cas de troisième guerre mondiale ? Un camp de concentration futur voulu par le nouvel ordre mondial ? Alan Brown s’en amuse : « le Colorado est une source de fantasmes depuis toujours dans le domaine militaire. Il y a beaucoup d’endroits secret défense dans la région, donc pour certaines personnes l’aéroport est forcément lui aussi un endroit mystérieux ». Il insinue presque que tout cela aurait été fait exprès : « cela fait partie de ce que l’art doit provoquer ». Une volonté de faire du DIA une perle pour conspirationnistes ? Une théorie qui se tient… surtout, si les Francs-Maçons ou les Illuminati avaient construit un repaire secret, pourquoi laisser autant de signes ?
Avec un trafic en constante augmentation depuis son inauguration – le record de passagers a été battu en juillet dernier –, le DIA s’adapte en permanence. La construction d’une autoroute directe entre l’aéroport et le centre-ville ou celle d’un réseau gigantesque de transfert de bagages en sous-sol en sont la preuve. Alan Brown est confiant : « L’aéroport tel qu’il a été conçu est voué à changer et grandir, pour s’adapter aux demandes futures. » Et au cœur du Colorado, la place ne manque pas…