The Good Business
Le dynamisme de l’« Afrotech » témoigne de l’effervescence de l’économie numérique en Afrique. Le secteur des hautes-technologies fait ses preuves avec des résultats tangibles. Pour ausculter un entrepreneuriat africain riche de promesses, nous avons sollicité un financier qui a décidé de se consacrer à ce secteur d’avenir, Eric M.K. Osiakwan, fondateur de Chanzo Capital (Ghana).
Lors de son discours d’ouverture du 6e Sommet Global de l’Entrepreneuriat (GES), en 2015 à Nairobi (Kenya), Barack Obama déclarait : « Je voulais être ici car l’Afrique est en plein mouvement… Les jeunes s’attèlent très sérieusement à la technologie. » De fait, l’année dernière, les start-ups du continent ont reçu 185 millions de dollars d’investisseurs et d’institutions d’aide au développement. Mais récemment, le fonds Chan-Zuckerberg, monté par le patron de Facebook et son épouse, a fait exploser les compteurs en annonçant un don de 45 milliards de dollars à Andela, une structure dont l’objectif est d’apporter des formations et de l’emploi à des développeurs africains. A l’heure où ce secteur explose, The Good Life a interrogé Eric M.K Osiakwan, fondateur de Chanzo Capital, un fonds de capital-risque spécialisé dans la high-tech africaine.
D’où vous est venue la volonté de financer des projets de start-ups en Afrique ?
J’ai commencé ma carrière en tant que « business angel ». Et puis un jour, j’ai réalisé que l’Afrique était en train de passer de la consommation de technologie à la création de technologie. J’ai redoublé d’implication et j’ai commencé à soutenir plus de start-ups. En 2013, je comptais déjà huit entreprises dans mon portfolio. Par la suite, j’ai décidé de créer une association de business angels (www.angelafrica.net) qui a engendré Angel Fair Africa, un événement où des entrepreneurs pré-sélectionnés viennent pitcher leur concept devant une salle pleine d’investisseurs dans le but de conclure des deals. Il était devenu clair pour moi que les start-ups avaient surtout besoin d’un accompagnement financier : j’ai donc décidé de créer Chanzo Capital, un « micro-venture-capitalist » qui investit dans les projets d’économie d’échelle dans les pays des KINGS (Kenya, Côte d’Ivoire, Nigeria, Ghana et Afrique du Sud).
Quel genre de projets financez-vous à travers Chanzo Capital ?
Nous considérons que dans les cinq pays clés qui dominent l’économie africaine digitale (les KINGS), la technologie mobile peut jouer un rôle de disruption dans cinq secteurs : la fintech (Financial Service), l’éducation (Edutech), l’énergie (Energytech), la santé (Healtech) et l’agriculture (Agtech). Notre définition de la rupture tourne principalement autour de ces cinq secteurs-là, mais elle n’est pas limitée…
L’année dernière, les start-ups africaines ont récolté 185 millions de dollars. Qui apporte ces fonds ?
Ils viennent d’entrepreneurs qui ont bien réussi, comme moi ou Jason Njoku, Mbwana Ally, Michael Jordan… mais aussi d’autres venture capitalists en-dehors du continent africain tels que Steve Case, Tim Draper, Dave McClure… Certains fonds viennent aussi de grosses corporations et de donateurs privés.
Les KINGS peuvent-ils servir de moteurs pour le reste de l’économie africaine ?
Oui, c’est précisément la thèse que je soutiens, grâce à l’économie digitale.
Quel rôle joue l’aspect politique dans l’émergence des start-ups africaines ? Bénéficient-elles de subsides ou d’aides à la formation ?
Le Kenya est le meilleur exemple de bonne gouvernance lorsqu’il s’agit de favoriser l’innovation et la culture de l’entrepreneuriat autour du digital. Bitange Ndemo, le précédent Secrétaire Permanent au ministère de l’information, de la communication et de la technologie, souhaite faire du Kenya une « nation de start-ups ». L’un de ses grands succès fut d’implémenter des infrastructures (des câbles sous-marins notamment) pour connecter le Kenya au reste du monde et que ça reste abordable.
Prenons la République Démocratique du Congo. Pensez-vous que s’il amorçait un changement radical dans son implication technologique, communicationnelle et numérique, le pays pourrait entrer dans une nouvelle ère ?
Oui, je pense que la technologie a un impact très fort sur toute la société, y compris en politique. En déployant des moyens de communication digitaux, on installe une meilleure transparence, ce qui est essentiel.