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Superstar des repas festifs en Chine et aux Etats-Unis, l'eau-de-vie de Cognac n'est plus à la fête en Hexagone. Martell, l'une de ses plus grandes maisons, s'est ainsi donnée pour mission de réhabiliter cet art de vivre à la Française.
Après la liqueur Saint-Germain, venue concurrencer le sacro-saint Aperol dans la composition d’un Spritz, la Suze ou encore le Lillet, c’est au tour d’un autre spiritueux bien de chez nous de tenter une remontada dans le cœur des Français. Martell, plus ancienne grande maison de Cognac, s’affiche en effet de plus en plus à la carte des bars prestigieux.
Avez-vous déjà pensé à commander un Cognac-Tonic en apéritif ? Un doigt de Martell en digestif ? Alors que les Américains et les Chinois en sont friands — ces deux pays sont les plus gros consommateurs de Cognac au monde —, la France, pourtant berceau de cette eau-de-vie, la boude. Pierre-Adrien Babeau, Head of Brand Advocacy chez Martell, pointe du doigt une image vieillotte laissée par les habitudes de fin de repas nos grands-parents.
Différences de perception du Cognac
Les États-Unis ont acheté 115 millions de bouteilles l’an passé, ce qui en fait le premier marché d’exportation pour le Cognac. Outre-Atlantique, l’élixir français est vu comme une boisson à la mode. Présentes dans les clips de rap, les marques ont vite surfé sur l’image « cool » généreusement offerte par les artistes de la culture street pour imposer leur boisson.
A l’inverse, en Chine, deuxième marché mondial où les ventes ont bondi de 55,3% en 2021, cette eau-de-vie est vue comme statutaire. De par son prix et l’évocation d’un certain art de vivre à la Française, boire du Cognac est un signe extérieur de prestige.
Entre les deux marchés, on ne boit pas le même Cognac ni de la même façon. Les catégories VS (« Very Special ») ou VSOP (« Very Special Old Pale ») en cocktail chez les Américains, moins onéreux et aussi plus jeunes consommateurs ; VSOP ou XO (« Extra Old », vieillit au moins 10 ans) consommés en digestif en Chine dans une tranche de population plus âgée.
Le Nigéria, l’Afrique du Sud, le Mexique et la Russie font également office de nouveaux marchés florissant pour le Cognac, qui y séduit de plus en plus, tantôt pour le prestige, tantôt pour la tendance.
Martell à la reconquête des irréductibles Français
La France, en revanche, est à la peine. 98 % de son Cognac est exporté, un chiffre qui prouve sa discrétion dans nos habitudes. Pourtant, ses ventes ont enregistré une forte progression en 2021 (+23,4% en volume, selon le Bureau national interprofessionnel du Cognac).
La tendance est ainsi à la hausse malgré la crise. Un atout pour Martell qui entend bien dépoussiérer l’image du Cognac pour reconquérir le palais des Français. « Nous cherchons à nous éloigner de la représentation du verre de Cognac bu auprès de la cheminée sur un fauteuil en cuir » glisse Pierre-Adrien Babeau. Car, si l’eau-de-vie reste populaire dans le cœur de nos aïeuls, force est de constater que les moins de quarante ans semblent avoir oublié cette tradition française.
Pour réveiller la belle endormie, Martell œuvre subtilement. En décembre, par exemple, la marque inaugurait une bouteille en édition très limitée (2000 exemplaires) customisée par l’ornementaliste Pierre Marie. Un beau cadeau qui n’était disponible qu’aux Galeries Lafayette, à Paris et en Chine.
Martell a aussi dans son viseur d’éduquer les consommateurs et de faire évoluer leurs habitudes de consommation envers le Cognac. En introduisant sa marque dans les bars les plus prestigieux de la capitale, notamment au Mandarin Oriental qui a invité la marque tout l’hiver à investir sa terrasse, elle permet aux curieux de (re)découvrir l’élixir sous un jour nouveau. Ainsi, si on trouve ses jus dans d’autres bars parisiens, comme à celui de l’hôtel The Hoxton, prêt à être dégusté neat ou on the rocks, éduquer les papilles aux cocktails faits à partir de Cognac Martell est une gageure majeure.
Rémy Savage, l’un des mixologues les plus reconnus au monde, s’est donc vu donné comme mission la création de mélanges inédits. L’as des shakers démontre alors que l’eau-de-vie peut se consommer de mille et unes façon, l’inscrivant ainsi dans le registre de son époque… et pourquoi pas inspirant les jeunes générations à les adopter en lieu et place des sempiternels mojitos.
Redécouvrir le patrimoine
La marque entend également se développer grâce à l’intérêt toujours plus croissant du public pour le Made In France. En faisant redécouvrir l’histoire du Cognac, son processus de fabrication, ses modes de dégustation, c’est toute un savoir-faire que Martell souhaite diffuser. Un objectif déjà soutenu par sa fondation, implantée à Cognac, bien sûr, un lieu pluriel qui mêle pédagogie et lifestyle à travers son musée et son bar en rooftop.
Autre idée derrière cette reconquête : se trouver sur le parcours des touristes, notamment asiatiques et américains, lors de leurs séjours français.
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