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Émettrices de CO2 sur les pistes de ski, les dameuses Diesel font leur révolution et passent à l’électrique. Cet hiver, les premières machines françaises assemblées par CM Dupon entrent en service dans les Alpes. On respire !
Plantez les bâtons, faites une pause de quelques secondes avant de continuer à dévaler les pistes et inspirez un bon coup. Le bon air de la montagne a parfois un petit arrière-goût de gasoil, mais si vous skiez du côté de Serre Chevalier, vous respirerez sans doute un peu mieux. La station, au domaine géré par la Compagnie des Alpes, a reçu cet hiver ses premières dameuses électriques fabriquées par l’entreprise française CM Dupon.
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Les dameuses peuvent aussi être électriques !
Les dameuses ? Ce sont ces grandes machines à chenilles qui assurent, la nuit venue, la préparation des pistes de ski pour le lendemain. Traditionnellement, elles sont mues par des moteurs Diesel et représentent à elles seules 90 % des émissions directes – ou Scope 1 – de CO2 des stations de ski.
Repenser leur motorisation était donc un levier d’action essentiel pour la Compagnie des Alpes (à la tête de 10 domaines de ski français, dont La Plagne, Les Arcs, Tignes, Val‑d’Isère, Méribel, Les Ménuires…) et dont le parc de 140 dameuses tourne déjà, depuis l’hiver dernier, au HVO100, un carburant synthétisé à partir d’huiles et de graisses alimentaires usagées, permettant de réduire de 90 % les émissions de CO2 et de 62 % celles de particules fines.
Mais ce n’est qu’une étape. Engagé dans un plan « Net Zero Carbone » à l’horizon 2030, ce gestionnaire vise le zéro émission et a missionné CM Dupon, l’unique constructeur français de dameuses, pour réaliser un modèle 100 % électrique. Une gageure : la machine, aux dimensions standardisées, doit être capable d’assurer un travail identique à celui des modèles thermiques, dans des conditions climatiques extrêmes.
Surtout, comme le rappelle Romain Dupon, le P‑DG du constructeur, « pour être viables, les dameuses électriques ne peuvent pas représenter un surcoût pour leurs exploitants ». Spécialisée dans les surfaceuses de patinoires depuis les années 50, l’entreprise basée à Pontcharra (Isère) a changé de dimension en rachetant le fabricant français de dameuses Aztec en 2016 pour se faire une place aux côtés des deux géants du secteur, l’italien Prinoth et l’allemand Kässbohrer.
Une autonomie de 5 à 6 heures
Lancé en 2020, le projet est basé sur le modèle Alpine du français, modifié en remplaçant tous ses composants hydrauliques par des éléments électriques, à commencer par des batteries lithium de technologie automobile.
Après deux ans seulement de développement, un premier modèle probatoire a pu être utilisé durant l’hiver 2021-2022 dans la station de La Plagne, suivi, l’hiver d’après, par un prototype testé en conditions d’exploitation à Tignes.
Résultat de ces essais ? « Nous avons une autonomie réelle de 5 à 6 heures, qui nous permet de fonctionner de la même façon qu’une machine thermique, explique-t-on chez CP Dupon, en précisant qu’elle est utilisée 7 heures par jour, soit deux fois 3 h 30 d’affilée, avec une pause intermédiaire, utilisée, ici, pour la recharge. Nous avons besoin de 2 heures pour une charge complète sur un chargeur automobile. »
Mais, comme avec une voiture électrique, une charge partielle est bien plus rapide et permet d’obtenir l’autonomie nécessaire au cycle de travail quotidien.
Des coûts d’entretien moindres
En plus de permettre la décarbonisation, les avantages des nouvelles machines sont nombreux. « Une puissance accrue, un couple instantané, mais aussi une machine plus facile à manier, plus douce, plus sensible aux impulsions du chauffeur, souligne Romain Dupon. Et aussi un centre de gravité plus bas, ce qui a son importance sur des pentes à 100 % d’inclinaison ! »
Surtout, la machine de CM Dupon se veut économique et vertueuse, avec un développement axé sur la recherche du rendement énergétique en minimisant les pertes – avec notamment un système de récupération de l’énergie à la descente. Cela participe à la viabilité économique chère à son dirigeant.
« Le coût total de possession, c’est-à-dire sur tout le cycle de vie de la machine, est identique à celui d’une machine thermique », précise-t-il. En effet, si le prix d’achat est plus élevé, « l’énergie électrique revient moins cher, l’entretien est moindre, et la durée de vie du modèle est plus longue : entre 6 et 8 ans, contre 5 à 7 ans pour son équivalent thermique ».
Sans oublier le bénéfice premier de l’engin : sur un an, il évite le rejet de 80 tonnes de CO2, soit 500 tonnes de CO2 durant son cycle de vie (un chiffre qui inclut la fabrication des batteries). Multipliez cela par les centaines de machines en exploitation dans nos montagnes, cela vous donnera le tournis, comme un shoot d’oxygène pur !
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