The Good Business
Lancée en 2013, l’application Lydia – initialement prévue pour faciliter les transferts d’argent entre particuliers – a intégré, en décembre dernier, le club des licornes françaises, ces entreprises tricolores valorisées à plus d’un milliard de dollars.
Depuis juillet 2013 et son lancement sur le marché, il y a de grandes chances que vous ayez entendu au moins une fois ce refrain : « j’te fais un Lydia ». Après un resto, des vacances, un cadeau d’anniversaire, on peut, en quelques clics depuis cette application, rembourser un ami via son adresse e-mail ou son numéro de mobile.
Derrière cet empire de la tech française, on trouve Cyril Chiche et Antoine Porte. Le premier, après des études en école de commerce et une quinzaine d’années dans l’informatique, décide de lancer sa propre entreprise « qui est internationale, a un rapport avec le mobile, et en lien direct avec des particuliers ». C’est encore vague mais le futur patron observe l’explosion des paiements via mobile en Afrique, même sans smartphones, et en Asie, très en avance sur l’Europe. Bingo ! L’idée est là, il va falloir la mettre en pratique. Et, pour ça, il lui faut un associé avec les compétences techniques nécessaires.
Il le trouve chez My Little Paris. Antoine Porte, 24 ans, est alors responsable technique au sein de la start-up parisienne. En 2011, ils créent Lydia et deux ans plus tard, l’application est disponible. Depuis, l’entreprise a diversifié ses activités jusqu’à proposer toute une galerie de services bancaires, du crédit instantané à l’épargne puis, récemment, du trading accessible à tous dès 1€.
Si elle n’est pas encore légalement une banque, une part grandissante des 5,5 millions d’utilisateurs de Lydia l’utilise pour déposer son salaire, réaliser des transactions par carte, épargner et investir. Comme leur banque principale donc. Et, suite à une levée de fonds de 100 millions de dollars le 8 décembre dernier, l’entreprise est entrée dans le cercle prestigieux des « licornes » valorisées à plus d’un milliard de dollars.
Tout devrait s’accélérer dans les prochaines années ! D’ici 2025, Lydia espère détenir les comptes principaux de 10 millions d’européens et embaucher 800 nouvelles têtes.
L’interview The Good Life de Cyril Chiche, co-fondateur de Lydia :
The Good Life : La banque, c’est comme la santé, on a du mal à imaginer un profane se lancer sur le marché…
Cyril Chiche : Si je devais résumer l’aventure Lydia, je dirai : « ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait ». Avant de nous lancer, on a creusé le sujet. C’était faisable, et autorisé, ça suffisait ! Si on avait eu connaissance, à l’avance, de la montagne de problèmes pénibles à résoudre lorsqu’on travaille dans la finance, on ne l’aurait pas fait. Mais une fois sur notre lancée nous avons relevé les défis les uns après les autres et il était trop tard pour faire demi-tour.
The Good Life : En moins de 8 ans, Lydia est devenue une licorne et compte plusieurs millions d’utilisateurs. Comment est-ce que l’on s’adapte à une croissance aussi rapide ?
Cyril Chiche : D’abord, l’humilité. Il faut être capable de remettre en question régulièrement nos décisions, même celles qui fonctionnent à l’instant T. Ensuite, la passion. C’est tellement difficile, les probabilités de réussir sont très faibles et sans passion on abandonne assez vite. Aussi, l’investissement et les sacrifices requis pour réussir nécessitent de pouvoir compter sur le support sans faille des siens. Enfin, le choix de nos collaborateurs, qui doivent être 101 % rigoureux – pas d’erreur possible ! – mais 0 % rigide, capables de s’adapter.
TGL : Comment avez-vous réussi à rendre le trading accessible tout le temps, pour tout le monde, à partir d’un euro ?
C.C. : Tout notre métier c’est de maitriser les complexités du monde bancaire, y ajouter de la tech, et le restituer en une phrase : il est possible d’investir en bourse, dans des cryptomonnaies, des métaux précieux et des ETF (paniers d’actions) pour 1 €, depuis son canapé, à 1h du matin, même quand les marchés sont fermés. On travaille avec un market maker qui va fabriquer un produit dérivé d’une action, afin de la rendre sécable. Ainsi, même si une action Amazon vaut 3500 $, il est possible d’en acquérir une partie dès 1 €. C’est complexe, mais le résultat, c’est l’achat d’action où on veut et quand on veut. Fluide, rapide, clair : on tente d’humaniser un secteur qui se contentait d’aligner des chiffres.
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