The Good Business
Et si la capitale serbe figurait parmi les good spots à découvrir le temps d’un week-end ? Et si la ville, après avoir pansé ses plaies, était en train de devenir le repaire festif du moment, un nouveau Berlin en somme ?
Oublions les aventures du héros de la série « SAS », Malko Linge, dans Danse macabre à Belgrade, de Gérard de Villiers. La capitale serbe n’est plus le nid d’espions qu’elle a pu être à ses heures les plus sombres. Le postcommunisme et les années de guerre sont loin. Désormais, une certaine douceur de vivre lotte dans les vieux quartiers ombragés. Aux terrasses des cafés, toujours pleines, les discussions sont sans fin. Belgrade sait vivre et brille pour son sens de la fête. Elle a cette dérision que l’on trouve dans les films d’Emir Kusturica.
Souvent comparée au Berlin des années 90 et 2000, Belgrade a gardé cette ambiance des villes « entre deux », meurtries par le passé, louchant vers l’avenir tout en vivant à cent à l’heure. La « ville blanche » (traduction de son nom serbe, Beograd) a de quoi dépayser. D’un côté, sa forteresse de vieilles pierres, construite à partir du XIVe siècle, et, de l’autre, la ville nouvelle, Novi Beograd, érigée par Tito dès 1948. Cette mer de béton, au camaïeu de gris et au style parfois brutaliste, ne laisse pas indifférent.
De bonne humeur et sous le soleil, on lui trouvera même une certaine beauté. D’autant que le musée d’Art contemporain (MoCAB) vient de rouvrir cet automne après dix ans de fermeture. Novi Beograd ferait presque figure de capsule dans le temps avec le poussiéreux hôtel Jugoslavija, qui a perdu de sa splendeur d’hier, devenant une sorte de décor de film pour remakes de séries américaines des années 70-80. Dans son bar-restaurant pimpant neuf, le Sugar & Spice, les serveuses circulent en rollers sur des notes disco au milieu d’une déco boule à facettes. De quoi faire se retourner le maréchal Tito dans sa tombe.
Belgrade et ses paradoxes
Mais Belgrade n’est pas à un paradoxe près. Alors que le modèle des grands centres commerciaux s’épuise dans le reste de l’Europe et bien qu’elle n’en manque pas, la capitale en construit deux nouveaux. Le premier, le Rajiceva Shopping Center, a ouvert en septembre sur la rue commerçante Kneza Mihaila, grâce à un investissement, dit-on, de 80 millions d’euros de la société israélienne Ashtrom Group. C’est ici que le groupe hôtelier Mama Shelter vient de poser ses chambres, inaugurant son ouverture vers les pays de l’Est. Le second mall est encore en construction. Il fait partie du projet Belgrade Waterfront, très controversé, mené par Eagle Hills, une société d’Abou Dhabi.
Les financements semblent aussi obscurs que les méthodes de fonctionnement (on parle de 300 millions d’euros d’investissement, mais personne n’est à même de le confirmer). L’ensemble de tours s’intégrerait parfaitement à Dubaï. Seul point positif : Belgrade Waterfront a réhabilité quelques kilomètres de quais le long de la rivière Save – dommage qu’ils ne soient pas assez larges pour accueillir piétons et cyclistes. Reste que malgré les polémiques, il est le projet phare de la ville. Dès la sortie de l’aéroport, il s’affiche en quatre par trois, comme si on déroulait une auto route aux investisseurs potentiels. Pour faciliter leur arrivée, et celle des touristes, un visa n’est plus exigé pour les Chinois, les Américains, les Russes, les Israéliens…
Et ça marche ! Grâce à certaines lignes aériennes directes, les rues résonnent de langues étrangères… et, toujours, du vrombissement de Zastava, les vieilles voitures de l’ancienne République yougoslave. Beaucoup de Serbes continuent à rouler avec – sans doute faute de pouvoir faire autrement. Le salaire mensuel moyen ne dépasse pas les 400 euros. Résultat, la capitale est l’une des moins chères d’Europe. Un bon point pour convaincre les plus récalcitrants à un city break insolite.
Plus d’infos
Office du tourisme de Serbie : www.serbie.travel
A lire : Serbie. Mythologies balkaniques, de Gaëlle Pério Valero, Nevicata.