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Le légendaire pick-up vient de renaître de ses cendres dans une version 100 % électrique. Pour autant, il ne s’agit pas d’un projet de BMW, désormais propriétaire de Mini, mais d’une aventure franco-chinoise qui mixe design rétro et technologie de demain.
A la fin des années 60, une série anglaise va littéralement crever le petit écran par son caractère de drame psychologique décalé, teinté d’un certain esprit surréaliste et d’une esthétique plutôt pop. Le Prisonnier raconte l’histoire d’un agent secret britannique qui se réveille un beau matin dans un étrange village habité par une communauté de dandys affublés d’un numéro. Qui a oublié la célèbre réplique, « Je ne suis pas un numéro », qu’il répète tout au long des 17 épisodes ? Malgré le huis clos qui caractérise chaque scénario, et donc le peu de mouvement, les automobiles tiennent un rôle important. Il y a la Lotus Seven du protagoniste, alias Numéro 6, qui apparaît à chaque générique, comme le souvenir de sa vie précédente. Mais aussi, et surtout, la Mini Moke, qui est l’unique moyen de transport routier dans la bourgade isolée. Dans la vraie vie, la Moke a été conçue en 1964 comme un véhicule militaire léger sur une base de Mini. Un peu comme une Jeep à l’anglaise, facilement parachutable. Sauf que la Mini Moke n’était pas 4 x 4 et qu’elle fit un flop dans l’armée. En revanche, elle s’afficha très vite comme une petite auto idéale pour les loisirs et la plage. Son allure assez décalée se prête plutôt bien à l’extravagance so British de la série, qui connaîtra une telle reconnaissance qu’elle ne cessera d’être rediffusée, hissant du même coup la Mini Moke au rang d’icône de la route.
Sur le marché automobile, le modèle connaît une histoire moins facile. Le climat anglais ne favorisant pas les ventes – à peine 15 000 exemplaires sortis des chaînes BMC de Longbridge entre 1964 et 1968 –, le constructeur doit revoir ses plans. La fabrication s’expatrie alors sous des cieux plus cléments, en Australie, où BMC produit la Mini Moke jusqu’en 1981. C’est au Portugal qu’elle finira sa vie, entre 1990 et 1993, sous la marque italienne Cagiva. Au total, à peine 50 000 véhicules fabriqués en une trentaine d’années. A titre de comparaison, la Mini (versions 1959-2000) a été produite à… 5,3 millions d’exemplaires ! Mais le « petit âne » – traduction de moke tirée d’un dialecte ancien par ses deux créateurs, Alec Issigonis et John Sheppard – s’est fait sa place parmi les autos culte. A tel point qu’une fois la production totalement arrêtée, plusieurs initiatives tenteront de faire revivre le mythe, évidemment au prix de batailles juridiques tentant de braver les questions d’homologation. Alors, en passionné de la première heure – ou presque –, quand on apprend qu’un projet s’inscrit déjà dans le futur de l’automobile tout en faisant revivre un fleuron de l’automobile française – feu la société Heuliez, devenue Fabrique régionale du Bocage –, on n’hésite pas un instant à aller s’asseoir au volant de l’engin.
En fait, la voiture est fabriquée en Chine par Shandong Tangjun et peaufinée en France, à Cerizay, dans les Deux-Sèvres. A première vue, peu de choses distinguent la Nosmoke de la Moke. La même bouille avant de grenouille, la même structure en tôle d’acier plié, l’absence totale de portières et une toile tendue sur des arceaux en guise de toit. Un pare-chocs un peu plus présent marque la face avant. C’est en soulevant le capot que le distinguo est plus évident : en lieu et place du 850 ou 1 000 cm3 de la Mini d’antan, on trouve un moteur électrique de fabrication chinoise. Qui veut sortir mètre ruban et balance s’apercevra que les cotes ont un peu bougé, mais pas tant que ça : 3,18 mètres de long contre 3,05 ; 1,45 mètre de large au lieu de 1,3 ; 780 kg contre 578… La puce aurait-elle pris de l’embonpoint ? La surcharge pondérale vient en fait des batteries, placées dans les montants latéraux de la caisse et sous la banquette arrière. Quant à la prise en main, elle est à peu près aussi simple que celle d’une auto… tamponneuse. Une marche avant, une marche arrière et un accélérateur. Ah si, tout de même, un frein. Et puis, ne pas oublier qu’après une centaine de kilomètres, il faudra la brancher sur une prise de courant durant une demi-douzaine d’heures. A la première accélération, c’est la relative rapidité conjuguée à l’absence de bruit qui surprend. Évidemment, l’électricité a aussi du bon, côté pollution sonore. Le constat est d’autant plus flagrant qu’on est plus en prise avec les éléments extérieurs que dans n’importe quelle autre voiture. D’ailleurs, on se sent finalement assez vite d’égal à égal avec les deux-roues motorisés, qui vous regardent comme si vous étiez encore plus « nu » qu’eux au volant de ce gros jouet, sans casque, ni portières. Il est vrai que l’absence de ces dernières vous rend très visible de l’extérieur. Plus moyen de se cacher pour téléphoner ou tapoter un SMS. Mais quelle dégaine ! Comme si cette voiture vous donnait une vraie aristocratie automobile, à 10 000 pieds des « pôvres » petits rouleurs avec leur banal Diesel qui fait un bruit infect. Elle s’affiche comme une formidable machine à sourires pour les autres usagers de la route. Petits et grands, qui ne connaissent pas nécessairement la version originale, ne peuvent s’empêcher de tomber immédiatement sous le charme de cette ligne inattendue. Vous devenez l’homme le plus sympa de la Terre, mieux que si vous aviez une Ferrari. Et d’afficher une mine réjouie en la voyant se faufiler au milieu d’un parc automobile, de plus en plus homogène du point de vue des formes. A se demander même comment l’administration, plutôt versée de nos jours dans les questions sécuritaires, autorise une voiture aussi dépouillée à arpenter le bitume. Mais ne nous posons pas trop de questions idiotes. L’essentiel n’est-il pas que ce petit bijou de design puisse circuler ?
Aussi, celle qui est en fait classée dans la catégorie des quadricycles lourds (permis B ou B1 dès 16 ans) ne se fait pas vraiment prier au feu vert ou au stop pour s’inscrire dans le trafic routier. De même, avec son poids plume et le petit « coup de pied » électrique, la Nosmoke s’affranchit facilement des côtes et des légers dénivelés. Certes, l’engin affiche une vitesse maximale de 70-80 km/h, mais on est très très loin du caractère poussif des voitures sans permis souvent limitées en termes de reprise. A son bord, on n’a pas senti qu’on était plafonné. En ville et sur les nationales, elle s’insère tranquillement dans le flow. Pour ce qui est de la tenue de route, le centre de gravité très bas assure une vraie maniabilité dans la circulation. Si bien que, même si elle est plutôt destinée à un usage de loisirs, elle est une formidable petite citadine. Dans sa configuration de base, le pare-brise et les deux retours sont très efficaces pour ne pas éprouver l’écoulement de l’air. Et en hiver, la Nosmoke peut même s’habiller d’un genre d’imperméable pour se protéger de l’eau. Évidemment, en cas de chute de température, ça se complique, d’autant que sans moteur thermique, pas de chauffage. Tout cela a un prix (15 990 euros), qui se révèle finalement équivalent à celui d’une Moke originale sur le marché de l’occasion ou à celui de la Zoé de Renault, une fois la déduction faite du bonus écologique. Mais, là encore, pourquoi tant de considérations matérialistes quand on a la chance de rouler tous les jours dans une auto qui vous donne à la fois une vraie élégance et de la bonne humeur ?
Caractéristiques
- Moteur : DC Brush 10 Kw
- Tension électrique : 96 V
- Batteries : plomb 12
- Temps de charge : entre 6 et 8 h
- Coût de charge : 1 €
- Autonomie : 80 à 130 km
- Longueur : 3,18 m
- Largeur : 1,45 m
- Hauteur : 1,55 m
- Poids : 780 kg
- Taille des pneus : 155 / 65 R13
- Vitesse max : 70 km/h
- Prix de vente : 15 990 € TTC
- Contact : www.nosmoke.fr