The Good Business
Fondée en Pennsylvanie au XIXe siècle et distribuée en Europe par la société bolognaise WP Lavori in Corso depuis 1984, la marque Woolrich vit aujourd’hui une seconde jeunesse et part à la conquête des marchés européens.
En chiffres
- 1830 : naissance de Woolrich, en Pennsylvanie.
- 1984 : WP Lavori in Corso commence à distribuer la marque en Italie.
- 1998 : première licence en Italie.
- 2016 : naissance de Woolrich Europe, le 1er janvier, dont le siège est à Bologne.
- Nombre d’employés : 75.
- Boutiques dans le monde : 21.
- Nombre de multimarques : 2 500.
- Nombre de shops in shop : 40.
- Chiffre d’affaires 2016 : 117 M €.
- Pièces produites en 2016 : 850 000.
- Prix moyen d’un manteau : 600 €.
Histoire
John Rich, qui vendait des habits de travail pour les champs et la mine, crée la fabrique Woolrich en 1830, en Pennsylvanie. En 1845, une seconde fabrique ouvre ses portes, autour de laquelle un village est construit, baptisé Woolrich City. L’entreprise devient bientôt le fournisseur officiel de l’armée américaine, mais aussi des expéditions en Antarctique de l’amiral Richard E. Byrd. C’est ainsi qu’est réalisée expressément l’Arctic Parka, résistante aux températures les plus rigoureuses. WP Lavori in Corso devient le distributeur italien de Woolrich en 1984, mais les collections américaines ne conviennent pas forcément aux exigences des consommateurs européens. Italiens et Américains trouvent la parade en créant une licence et une nouvelle marque : Woolrich John Rich & Bros. Nous sommes en 1998. Les collections sont plus conformes aux standards européens, plus fitées, mais continuent de s’inspirer de l’ADN de la maison mère. WP Lavori in Corso commence naturellement par conquérir le marché italien, avant de s’imposer dans d’autres pays d’Europe, puis dans le monde entier, États‑Unis et Canada (un comble !), Japon et Corée compris. En janvier 2016 naît une entité spécifique au sein du groupe : Woorlich Europe.
Depuis le 1er janvier 2016, l’entreprise est une « standing alone company », une société indépendante qui mise toujours plus sur le retail. Trente-quatre ans après l’apparition des vêtements Woolrich en Italie, le groupe WP Lavori in Corso (WP, pour « Work in Progress » ; Lavori in Corso en étant la traduction italienne), entreprise bolognaise fondée en 1982 par Giuseppe Calori et sa fille Cristina, a donné vie à Woolrich Europe. L’objectif ? Développer la marque Woolrich John Rich & Bros. en Europe et en Asie. Le lien entre WP Lavori in Corso et Woolrich, les entités italienne et américaine, a toujours été placé sous le signe de la bonne fortune : grâce aux collections homme, femme et enfants, lancées sur le marché italien en 1998, à la distribution dans le reste de l’Europe au début des années 2000, puis en Asie et même en Amérique du Nord, l’entreprise a connu une croissance constante. Le chiffre d’affaires pour l’année en cours devrait approcher les 117 millions d’euros, en augmentation de 10 % par rapport à 2015. La nouvelle compagnie veut atteindre les 183 millions d’euros avant 2020.
Ne pas confondre…
Les collections Woolrich Outdoor, soit Woolrich Original et Woolrich White Collection, ne sont disponibles qu’aux États‑Unis et sont conçues et produites par la maison mère, américaine. www.woolrich.com
Les collections Woolrich John Rich & Bros. sont conçues et distribuées dans le monde entier par Woolrich Europe, filiale de WP Lavori in Corso. www.woolrich.eu
Le succès tire son origine notamment des manteaux emblématiques, comme l’Arctic Parka (75 000 pièces vendues pour la seule saison 1998), mais également des pulls, des chemises et des accessoires. Tout a commencé autour des deux concepts essentiels que sont le confort et la performance. Ce défi se joue également sur le territoire français, où WP Europe investit des sommes importantes. « Dans le cadre d’un développement massif du retail, nous ouvrirons notre premier flagship-store à Paris en automne et nous augmenterons les corners dans les grands magasins comme le Printemps, Le Bon Marché et les Galeries Lafayette, ainsi que le nombre de nos revendeurs, qui sont actuellement soixante-dix pour les collections homme et soixante pour les collections femme, déclare Andrea Canè, aujourd’hui directeur artistique, qui a débuté comme magasinier au quartier général milanais et a connu toute la genèse de l’aventure. Vu le nombre élevé de visites de clients français sur notre site de vente en ligne, nous aimerions rallonger la saisonnalité du manteau en le rendant à la fois plus technique et plus versatile. La collection capsule Outdoor Teton, en collaboration avec Gore-Tex, qui comprend pour l’hiver 2016 l’Arctic Parka No Fur, déclinée pour la première fois depuis 1972 sans fourrure, va dans la première direction. La ligne Archive Collection pour femme, qui présente la Military Parka à mémoire de forme, avec un profil en fourrure qui part du bas de la fermeture et fait le tour de la capuche, va, quant à elle, dans la seconde direction. Sans oublier les pantalons larges, les grands pulls à col montant, les capes amples qui reprennent les laines, les motifs et les modèles provenant des archives historiques se trouvant en Pennsylvanie. » Ces pièces conquerront sans aucun doute les nombreux fans de la marque, people en tête, dont Vincent Cassel, Penélope Cruz, Valentino Rossi, Sienna Miller, James Franco et Salma Hayek.
Mais l’ADN outdoor de la marque se retrouve également dans l’opération de co-branding présentée lors du dernier Pitti Uomo à Florence : l’E‑bike Woolrich. Il s’agit d’un vélo urbain également adapté aux terrains accidentés, équipé d’une assistance électrique et entièrement assemblé à la main, en Italie, par Deus Ex Machina. Grâce à son smartphone, il est possible de programmer le style de pédalage. Un objet design et pratique qui sera vendu dans les 21 boutiques Woolrich dans le monde, dont Cortina d’Ampezzo, Forte dei Marmi, Amsterdam, Londres, Boston et Tokyo. « D’ici à quatre ans, 70 % des collections seront distribués dans les boutiques monomarques. Ces boutiques auront forcément besoin de plus d’espace pour accueillir la ligne de chaussures, produite dans la région des Marches, qui utilise des semelles Vibram pour bottines et baskets, et la ligne de sacs pour laquelle nous développons actuellement une collaboration avec une styliste américaine. D’ici à 2018, nous lancerons également une gamme de valises », annonce Andrea Canè. Ce dernier pense aux six collections par an et porte une attention particulière au segment enfants. « Née il y a une dizaine d’années, surtout pour le marché italien, la marque Woolrich Kids représente un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros et sera distribuée dans les plus grandes boutiques, souligne-t-il. Le travel retail est important pour nous. En ce qui concerne Woolrich, les boutiques de Berlin, Amsterdam et New York seront, dans dix ans, de véritables lieux de promotion de l’entreprise. » Le concept-store initial a été réalisé par le studio international Wonderwall de Tokyo, sous la direction artistique de Masamichi Katayama. Pour les campagnes publicitaires, le thème du road-trip est le point central du travail de photographes reconnus et émergents : de Larry Fink à Bill Owens, en passant par Nicola Casamassima et Tiina Itkonen. La prochaine campagne automne-hiver, photographiée par Jackie Nickerson, a comme décor Woolrich City, en Pennsylvanie, et l’usine américaine. Retour aux sources.
3 questions à Cristina Calori
Présidente de WP Lavori in Corso.
Dans les années 80, celles du « Milan à boire », dans une Bologne bonne vivante et cultivée, une jeune fille blonde et curieuse, qui travaille dans une agence de publicité, décide de se lancer dans la distribution de marques à importer en Italie. Venant d’une famille d’entrepreneurs (son père, Giuseppe Calori, avait des intérêts dans le secteur pétrolier et des cliniques privées), Cristina Calori, désormais présidente de WP Lavori in Corso, continue de cultiver sa passion pour les licences. Et pour les voyages.
The Good Life : Comment a débuté cette aventure ?
Cristina Calori : Avec la découverte des chaussures Vans qui, dans la seconde moitié des années 80, s’écoulaient à plus de 110 000 paires par saison. Mais aussi avec des marques de niche comme Parachute, dessinée par deux architectes canadiens, Anna Sui, et les céramiques Fiesta, célèbres pour leurs plats très colorés et incassables. Sans oublier le secteur de la cosmétique avec des marques naturelles comme Kiehl’s, Key West Aloe et Dr. Bronner. Nous vendons encore aujourd’hui des bougies parfumées dans nos boutiques.
TGL : Parallèlement, c’est également l’arrivée des marques familiales comme Woolrich…
C. C. : Woolrich et Barbour ont commencé leur chemin ensemble, au moment de l’ouverture de la première boutique WP à Bologne. Mais il y avait également d’autres marques familiales : Miller, Pendleton, Eagle. En ce qui concerne Barbour, je me souviens d’un distributeur d’articles de chasse et pêche qui nous offrit son entrepôt. Ce fut le début du succès de cette veste cirée, pas chère, utilisée par les conducteurs de Vespa, mais aussi portée par un homme très élégant comme Raul Gardini lors de la Prima della Scala.
TGL : Au fil des années, comment a évolué la recherche dans ce secteur ?
C. C. : Entre les années 80 et 90, la matrice était surtout anglo‑américaine. Au cours des quinze dernières années, les Japonais ont su parfaitement interpréter le goût américain. Archivistes nés, ils sont imbattables pour réaliser des copies et des rééditions de tissus. Et les archives des entreprises sont une véritable mine d’or.