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Voyager léger : l’essor irrésistible du tourisme sans enfants

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Hasta la vista babies ! Encore discrète en France, la tendance du « sans-enfant » s’impose désormais comme un appât de choix pour certains hôtels, restaurants et désormais compagnie aérienne qui n’hésitent plus à bannir les bambins de leurs rangs. Légale ou non, l’alternative séduit chaque année davantage. Voici pourquoi.

Sommes-nous devenus de parfaits égoïstes ? La question mérite d’être posée tant il aurait semblé impensable il y a encore 20 ans de s’offusquer publiquement de la présence d’un escadron de marmots hurlant au bord de la piscine ou zigzaguant entre les tables d’un restaurant – qu’il s’agisse ou non des vôtres. Baisse de la natalité, popularité du hashtag #regrettingmotherhood, revendications féministes, succès des ouvrages vantant les délices de la nulliparité (parmi lesquels le désarmant Pourquoi j’ai choisi d’avoir un chien (et pas un enfant) de la vétérinaire Hélène Gateau), les mouflets n’ont plus la cote. Le fameux droit à la déconnexion, que la France aura été la première à introduire dans le code du travail, ne consiste aujourd’hui plus seulement à couper ses notifications passées 19 heures mais aussi à réclamer une accalmie lorsqu’arrive la période bénie des congés payés. Êtes-vous prêts à voyager sans enfants ?


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Luxe, calme et voyage sans enfants

Le calme : une denrée rare brandie comme argument commercial déterminant par les quelques voyagistes proposant à leurs clients épuisés l’assurance d’une parenthèse exempte des frasques de leurs enfants, mais aussi (et surtout) de ceux des autres. Car pour les 3,5 % de personnes en couple âgées de 18 à 50 ans ayant pour projet de rester sans progéniture, quoi de plus injuste que de devoir supporter les caprices à cris ouverts de leurs voisins de transat ?

Si l’argument fait mouche pour cette catégorie de la population française dont il reste difficile de dresser un portrait-robot, celui à destination des couples ayant cédé aux joies de la parentalité est tout autre et entend bien faire taire la moindre once de culpabilité.

Votre relation mérite bien plus que ce qu’offre le quotidien »

Voici ce que l’on peut lire sur Adult Only, site leader de séjours pour adultes – dont la recherche sur Google nous a valu plusieurs semaines de fenêtres pop-ups vantant les délices de clubs échangistes, on vous aura prévenu. On imagine ici assez bien ce qui se cache sous le banal terme de « quotidien » : des réveils aux aurores dimanches compris, des giclées de purée mousseline dans l’œil, des soirées passées à se chamailler en chuchotant pour ne pas réveiller les chérubins pionçant à l’étage… Si en bon houellebecquien on considère l’enfant comme une sorte de « nain vicieux » doté d’une cruauté consubstantielle à sa condition, autant dire que la tentation de les « oublier » quelques jours relèvent légitimement du plus pur instinct de survie. Mais pas seulement.

C’était ça, ou l’explosion !

Ainsi, pour les couples dont la venue d’un enfant et les vacances en famille ont été hautement idéalisées, le premier été fait souvent l’effet d’une douche froide, comme en atteste Sabine, 35 ans, mère d’un garçon de 3 ans : « Nous avions fantasmé cette première semaine en famille au bord de la mer avant de réaliser que toutes les contraintes du quotidien étaient amplifiées. Dès le train, notre fils a commencé à hurler, a très mal dormi dans une chambre qu’il ne connaissait pas, a souffert de la chaleur, demandait une attention constante au bord de l’eau… Mon mari et moi étions désemparés. Nous n’avons même pas pu dîner une seule fois en tête à tête et sommes rentrés encore plus épuisés qu’à l’arrivée, d’une humeur de Mélenchon au lendemain du premier tour ! », se souvient-elle, visiblement amère.

L’année suivante, le couple s’est offert une semaine de vacances au sud de la Grèce en laissant leur fils entre les mains des grands-parents. « C’était ça, ou l’explosion, admet-elle. Nous nous sentions coupables d’abandonner notre enfant, mais notre relation souffrait de ce manque d’exclusivité. Désormais, nous nous accordons régulièrement ces temps de pause, sur des durées plus courtes ». Un compromis qui semble suffisant à se racheter une conscience.

L’avion, probablement l’épreuve la plus redoutée des parents.
L’avion, probablement l’épreuve la plus redoutée des parents. Hanson Lu / Unsplash

En périphérie des séjours all-inclusive, compagnies aériennes et restaurants ont aussi flairé le bon filon et n’hésitent plus à créer des espaces interdits au moins de 18 ans. A l’instar de Corendon Airlines qui propose des espaces dédiés aux adultes et voyageurs d’affaires : sièges XL, panneaux et rideaux de séparation… « Nous essayons de plaire aux voyageurs qui recherchent une plus grande tranquillité d’esprit pendant leur vol », s’explique Atilay Uslu, fondateur du groupe de voyages turco-néerlandais.

Nous pensons également que cela peut avoir un effet positif sur les parents voyageant avec de jeunes enfants. Ils peuvent profiter du vol sans s’inquiéter si leurs enfants font plus de bruit ».

Un pari alléchant, donc, même s’il reste à ce jour impossible de présumer du succès futur d’une offre déjà proposée par plusieurs compagnies asiatiques. Du côté des restaurants, la discrétion reste de mise et les adresses se refilent davantage sous le manteau. Pourtant, difficile de ne pas souscrire à la sentence d’un Yann Moix, qui affirmait il y a peu « que les enfants devraient être interdits au restaurant le soir » dans une chronique mordante diffusée sur France Bleu, au cours de laquelle il dresse le portrait-robot de l’enfant dictateur envoyant valser ses carottes râpées sur les sièges, avant de gratifier sa mère d’un uppercut dans le menton – qui mettra cet accès de violence sur son incapacité à digérer les sauces industrielles. Interdit de rire.

En France, prudence

Si la légalité de cette ostracisation des têtes blondes – et brunes – revient régulièrement sur le tapis, agences de voyages et plateformes en ligne affichent fièrement leur classement des plus belles destinations à découvrir en duo ou en bande avec en grande majorité des destinations longeant le pourtour méditerranéen. Au programme : des hôtels vus du ciel rivalisant de paysages aux couleurs d’atolls versicolores, de piscines à débordement et de cocktails orangés au diapason du soleil couchant, sans l’ombre d’une poussette Yoyo, de promesses d’activités ludiques, de toboggans en queue de cochon ou de menu steak-frites et yaourt à boire – en somme, rien de moins que le paradis.

Seulement voilà : en France, seule une poignée d’établissements revendique officiellement l’interdiction des bambins, dont le Moulin de chez Joyeux, dans le Limousin, éden naturiste bannissant aussi ceux qui auront l’outrecuidance de vouloir mouiller le maillot. Un argument de taille pour justifier l’absence totale de moins de 18 ans qui semble beaucoup moins assumée ailleurs. Ainsi, difficile de voir ostensiblement brandi l’argument « Adults only » sur les sites des gîtes et hôtels haut de gamme pourtant listés par les voyagistes. Un constat qui, au-delà de délibérations brumeuses sur une éventuelle conformité avec la loi, donne encore à ces échappées un délicieux frisson d’interdit.


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