Culture
Ce talentueux pianiste ukrainien s’apprête à arpenter l’Italie pendant tout l’été avec la tournée Piano B, un un projet itinérant qui, du 1er juillet au 15 août, investira 40 places italiennes de musique classique. Rencontre avec Alexander Romanovsky.
Comme Mozart et Rossini, à l’âge de 15 ans Alexander Romanovsky se voyait discerner le prestigieux titre d’Académicien honoraire par l’Académie Philharmonique de Bologne pour son interprétation des Variations Goldberg de Bach. A 17 ans, il a remporté le Premier Prix du Concours international de piano Ferruccio Busoni en Italie.
Cet été, la musique pleine de liberté d’inspiration de cet interprète captivant habitué des scènes du monde entier, remplira les places italiennes lors de la tournée Piano B. En se produisant sur une scène mobile sur remorque conçue spécifiquement pour l’occasion, le Maestro souhaite rejoindre ces lieux qui n’avaient pas été pensés pour la musique. Sur les notes de Sergueï Rachmaninov et Frédéric Chopin, Piano B (plan b) se veut comme une alternative ambitieuse proposant une nouvelle perspective pour réagir aux mois difficiles que nous avons tous vécu. Avec TGL, il revient ainsi sur sa soif de rencontres et l’envie de réveiller son public.
8 questions au pianiste Alexander Romanovsky :
The Good Life : On affirme que votre musique redéfinit les limites de la musique classique. Dans quelle mesure ?
Alexander Romanovsky : Pour que la musique arrive vraiment à son auditeur, l’interprète doit la réinterpréter à chaque fois, il se doit de rentrer à tel point dans la matière du morceau qu’il devient presque le sien, comme s’il l’avait composé lui même. Il n’y a rien de révolutionnaire. Tous les grands artistes parlaient de cela. C’est la seule façon pour réinterpréter les grands chefs-d’œuvre. Pour ce qui concerne la forme d’un concert de musique classique qui s’est instaurée il y a plus de cent ans, je crois que le moment d’expérimenter des nouvelles solutions est arrivé. A condition que l’essence même de la musique reste inaltérée.
The Good Life : Comment définir votre style musical ?
Alexander Romanovsky : Je suis dans une quête pérenne d’émotions pures, c’est à dire l’expression la plus parfaite d’un état d’âme. C’est quelque chose de très difficile à obtenir, mais, pendant quelques instants magiques, quand on arrive à le faire, on ressent une joie immense. Pour cette raison, la recherche et le travail sur un morceau peuvent prendre des années. C’est un processus qui, en réalité, n’a pas de fin. Je cherche à ce que ma musique parle, implique et soulage ceux qui l’écoutent.
TGL : Pour quelle raison avez-vous décidé de devenir pianiste ?
A.R. : Il n’y a pas eu un moment précis où j’ai pris une décision définitive… Cela a été un processus progressif d’auto-reconnaissance en tant qu’artiste. J’avais conscience de ne pas arriver à trouver une meilleure façon d’être moi même, autre que quand je suis sur scène. L’effet que la musique peut avoir sur les personnes me fascine depuis toujours. Enfant, cela me permettait de communiquer avec les adultes sur un pied d’égalité. A l’école j’étais respecté par les petits brutes car ils étaient intrigués par ce que je pouvais faire au piano. Maintenant en tant qu’un « grand », la musique est un moyen pour communiquer avec tous ceux qui ne parlent pas ma langue.
TGL : Un conseil pour les jeunes qui souhaitent embrasser une carrière de pianiste ?
A.R. : Il faut savoir que la passion ne suffit pas. Il faut beaucoup de sacrifices, mais aussi avoir un regard ouvert sur le monde et une vaste culture. Il faut essayer d’arriver à comprendre en quoi consiste sa propre unicité.
Piano B, 42 dates dans toute l’Italie
TGL : Comment avez-vous conçu la programmation Piano B, une tournée de 42 dates dans plusieurs localités italiennes qui aura lieu du 1er juillet au 15 août ?
A.R. : En imaginant de jouer dans certaines des étapes du tour. Il s’agit de choix souvent intuitifs, je fais confiance à mes sensations. Cette-fois, je me suis arrêté sur Sergueï Rachmaninov et Frédéric Chopin. Si ce projet n’avait pas été ambitieux, il n’aurait eu aucun sens. Je voulais toucher le plus de monde possible d’une manière humainement faisable. J’ai une soif de rencontres, le désir de réveiller les gens avec ces émotions qu’on avait parfois oublié avec les difficultés vécues pendant les derniers mois.
TGL: Comment est née la collaboration avec la résidence d’artiste Palazzo Monti qui soutient le projet ?
A.R. : J’ai rencontré le fondateur Edoardo Monti lors d’un concert que je jouais à l’occasion du centenaire d’Arturo Benedetti Michelangeli, dans la Sala della Vittoria Alata du Capitolium de Brescia en 2020, à la suite duquel nous sommes devenus amis. Piano B est l’opportunité que nous cherchions pour collaborer ensemble.
TGL : Dans quelle mesure cette initiative est conçue comme une expérimentation sociale ?
A.R . : Nous allons pouvoir observer la réponse de publics distincts à l’écoute, parfois inattendue, de la musique classique. Une photographie du vrai état des choses qui, peut-être, nous aidera à comprendre le rôle que la musique classique joue à nos jours.
TGL : Pouvez-vous nous présenter la playlist que vous avez imaginé pour TGL ?
A.R. : La musique est un univers. La musique du vingtième siècle est simplement une comète dans un espace infini : alors pourquoi ne pas explorer d’autres étoiles en quête de celle qui nous donnera les émotions les plus fortes ? Ici j’ai concocté quelques uns des morceaux qui me donnent des frissons…
La Good Playlist d’Alexander Romanovsky :
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