Culture
Il n’y a pas que Glenn Gould qui a su donner un coup de fouet au prolifique Jean-Sébastien Bach… La relève est assurée !
• Bach intime. Trois cantates dissemblables, dont la BWV 22, composée par Bach pour appuyer sa candidature au poste de cantor à Leipzig, et des sommets émotionnels, dont une aria de la cantate BWV 127 interprétée par la soprano Hannah Morrisson. Familier de ce répertoire, Philippe Pierlot en livre une vision tout à la fois intime, humaine et bouleversante.
• Bach redécouvert. Voici le début de la première intégrale de l’oeuvre pour orgue et clavecin de Bach interprétée par le même musicien. On assiste ici à la naissance d’un génie, Benjamin Alard inscrivant Bach dans la lignée de ses maîtres. Le mélomane curieux ira, ici, de découverte en découverte dans une interprétation captivante.
• Bach réinventé. Sommet de la musique pour clavier de Bach, les Variations Goldberg nous sont ici proposées sous deux éclairages, aussi éloignés que complémentaires. Bien sûr, on reviendra toujours à Glenn Gould, Murray Perahia, au piano, Scott Ross ou Gustav Leonhardt au clavecin. Mais on n’a jamais fait le tour d’œuvres aussi essentielles. Le claveciniste espagnol Diego Ares en propose une interprétation qui prend son temps, ne craint pas les ornements et, selon le propos de l’interprète, constitue un élixir de félicité. Le compositeur français François Meïmoun a quant à lui choisi de transcrire pour quatuor à cordes, sans souci d’une introuvable modernité, cette oeuvre qu’il semble porter depuis toujours. Selon le compositeur, « une transcription est un hommage et une trahison. Mais elle est et reste l’un des plus beaux dérivatifs scripturaux d’un texte original admiré. Elle est un acte fait de déraison et d’humilité. » On ne saurait mieux dire pour saluer cette parution, dans la belle interprétation du quatuor Ardeo.
Thomas Dunford, luthiste
Instrument quasiment tombé dans l’oubli à partir du XVIIIe siècle, le luth revient depuis quelques années sur le devant de la scène. Grâce, tout d’abord, à des guitaristes tels que Julian Bream, puis, aujoud’hui, par l’entremise de musiciens de l’envergure de Hopkinson Smith ou de… Thomas Dunford. Son dernier disque, publié par Alpha Classics, est consacré à des œuvres à l’origine écrites par Bach pour le luth, ou transcrites par l’interprète lui‑même, notamment à partir de la deuxième partita pour violon. Ce disque envoûtant dégage une poésie et une émotion rares, et vous serez ému aux larmes par la sarabande de la suite en sol mineur, qu’on connaît également au violoncelle.
The Good Life : On a peine à imaginer aujourd’hui que cet instrument a suscité 30 000 partitions…
Thomas Dunford : C’est effectivement un instrument qui dispose d’un répertoire gigantesque, dominé notamment par la figure de John Dowland. On peut le considérer comme le Bach du luth. Il a le même génie chromatique, et sa musique est très moderne. Mais le luth est loin d’être bling‑bling. Il est tout en subtilité, en introversion, ce qui ne correspondait pas à l’époque rococo, qui cherchait la démonstration. Il s’est alors effacé du devant de la scène. Je suis venu à cet instrument par son répertoire.
TGL : De quand date votre instrument ?
T. D. : On a conservé très peu d’instruments d’origine. Le luth est très fragile. Et on trouve peu de luthiers qui en fabriquent aujourd’hui. Certains disent qu’un luth peut vous accompagner toute la vie, et d’autres qu’il a une durée de vie brève. Je possède celui dont je joue depuis mes 14 ans. Il a été conçu par un luthier contemporain. Quand on s’attache à un instrument et qu’il vieillit, c’est un peu comme une partie de son propre corps qui est gagnée par l’âge.
TGL : Ce disque est le premier volume d’une intégrale de la musique pour luth de Bach…
T. D. : Il est composé d’œuvres originellement écrites pour le luth et de transcriptions. Bach est un compositeur que j’adore jouer. Chaque fois il a repoussé les limites de l’instrument, que ce soit le clavier, le violon, le violoncelle ou le luth. Ce disque se termine par la chaconne de la deuxième partita pour violon, que j’ai transcrite. Une oeuvre sublime et presque injouable. Le travail de transcription en lui‑même n’a pas été très long. J’ai procédé à quelques réadaptations. Mais ce qui est particulièrement difficile, c’est d’honorer ce que cette musique suggère. Cette musique ne peut que nous porter loin, mais son génie nous rend, en tant qu’interprètes, constamment insatisfaits.
Bach, OEuvres pour luth, Thomas Dunford, Alpha.
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