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The Good Guide
Le groupe de rock anglais The Libertines a ouvert son hôtel-studio à Margate, en Angleterre, fin 2020. The Albion Rooms s’est imposé comme le lieu de retrouvailles privilégié de ses quatre membres qui y ont enregistré leur nouvel album, « All Quiet on the Eastern Esplanade ». Visite.
« All Quiet on the Eastern Esplanade » annoncent les Libertines dans le titre de leur quatrième album, disponible depuis le 5 avril. Une quiétude retrouvée 22 ans après leur premier opus fracassant « Up The Bracket », une séparation, et des retrouvailles, il y a plus de dix ans. Cette nouvelle étape est fortement associée à un lieu : The Albion Rooms, l’hôtel et studio qu’ils ont inauguré à Margate, petite ville balnéaire du Kent, plébiscitée par les Londoniens, à l’automne 2020, et que nous avons visité en ce début de printemps.
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Dorures et néon rouge : The Albion Rooms dénote
L’« Eastern Esplanade » dont il est question sur ce nouveau disque n’est autre que l’adresse du QG des « Libs », comme les appellent encore les fans. À quinze minutes du centre-ville de Margate, dans le quartier de Cliftonville, la maison victorienne surprend à côté de ses voisines en briques. La façade peinte en gris foncé affiche des détails dorés et le nom de l’établissement en néon rouge. À ce moment-là, le visiteur n’ayant pas entendu parler du projet n’a aucun moyen de savoir qui se trouve derrière l’établissement. À raison, puisque l’idée n’a jamais été d’en faire un musée ou un lieu de pèlerinage pour les fans.
Les premiers détails se repèrent tout de même dans le hall d’entrée : dans le haut de l’encadrement d’une porte, la photo mythique de Peter Doherty et Carl Barât figurant sur la pochette de l’album « The Libertines » (2004) et sur la gauche, les paroles du titre « Fame et Fortune » de l’album « Anthem for Doomed Youth » (2015) écrites à la main. Les détails sont ensuite plus subtils, nous explique Imogen Mew, manageuse de l’établissement, en nous accueillant sur place : « Le tapis rouge et doré que l’on retrouve dans l’escalier est inspiré de la fameuse veste rouge militaire du groupe. »
Le groupe composé de Peter Doherty, Carl Barât, Gary Powell et John Hassall a acheté l’établissement en 2017, après la fermeture d’un bed & breakfast très mal réputé dans la région. La vue imprenable sur la mer et le charme du kiosque à musique qui se trouve de l’autre côté de la route ont rapidement séduit les interprètes de « Time for Heroes ». Mais l’idée première des Anglais était d’avoir leur propre studio. Alors exit le vieux sauna miteux du sous-sol. C’est d’ailleurs dans ce studio, désormais fréquemment loué par des groupes locaux, que les quarantenaires ont enregistré leur nouvel album. La façade des Albion Rooms se trouve même sur la pochette du disque, et tous les clips des singles sortis jusqu’à présent ont été tournés à quelques mètres. Une façon de placer Margate sur la carte rock du pays. Carl Barât, le chanteur-guitariste, a même quitté Londres pour s’y installer, tandis que Peter Doherty vit à Étretat, en France.
Des fans pour clientèle, mais pas seulement
Le nom de The Albion Rooms n’a rien d’anodin pour les fans du groupe de rock. C’est ainsi que Peter Doherty et Carl Barât avaient nommé le premier appartement dans lequel ils ont vécu ensemble dans le quartier de Bethnal Green, à Londres, au début des années 2000. Mais si vous imaginez un hôtel rock’n’roll plutôt chaotique, détrompez-vous. Aucun détail n’y a été laissé au hasard. Le lieu plutôt intime a de quoi fasciner, à condition tout de même d’être prêt à faire un voyage dans le temps. L’ensemble de la décoration a été réalisée par Rhiannon Sussex.
L’hôtel comprend sept chambres, toutes uniques et à l’esprit « décadent », réparties sur trois étages. Elles n’ont pas de simples numéros, mais ont un nom évocateur lié à l’univers du groupe. « The Delaney » est la seule référence directe à une de leurs chansons. Puis, il y a la « William Blake », et « la chambre de Carl », comme nous le souffle à l’oreille la manageuse des lieux — là où le guitariste loge quand il vient. Sombres, voire même gothiquse, les murs sont recouverts d’une tapisserie noire à imprimé crocodile. Un clin d’œil à la fameuse veste en cuir que porte toujours le rockeur.
Ce type d’imprimé se retrouve peu dans chaque chambre, façon tapis léopard ou canapé panthère. Son plus gros atout ? L’unique balcon de l’hôtel et sa vue sur Walpole Bay. Côté décoration, le minimalisme n’est pas de mise, entre large tête de lit, crucifix noir, serpents dorées sur l’étagère des livres et peintures du même style à l’intérieur de l’armoire. Certains meubles et objets proviennent d’ailleurs des collections personnelles des artistes.
Les attributs classiques d’une chambre d’hôtel haut de gamme sont au rendez-vous : thé, café, mini-bar, sèche-cheveux de grande marque, peignoir et chaussons sont à disposition. L’enceinte Bluetooth a spécialement été gravée avec l’inscription « The Libertines » et « The Albion Rooms ». Les salles de bain élégantes affichent un sol en damier noir et blanc. À l’étage du dessus, la chambre Emily Dickinson, du nom de la poétesse américaine, est plus romantique. La préférée de Peter Doherty. On y trouve d’ailleurs deux de ses tableaux.
La tapisserie vient d’un imprimé victorien de femme nue déniché par le musicien il y a quelques années et reproduit en grand format. Toute en dorures, l’atmosphère reste résolument vintage, presque sortie du 19eme siècle, avec un lit king-size en fer forgé.
Enfin, la chambre la plus spacieuse, sobrement appelée « The Loft », se trouve au dernier étage en attique. Avec une salle de bain plus large (douche et baignoire) et un aspect plus « boudoir », elle conjugue tous les éléments phare de la maison tel que le velours et les motifs tape-à-l’œil. Après avoir quitté les ambiances romantiques et gothiques des chambres, la cage d’escalier (l’architecture victorienne ne rime pas avec ascenceur) éblouit avec sa croix en néon rouge et rose. Les photographies accrochées rendent hommage à de grandes icônes rock de David Bowie aux Sex Pistols.
Un bar et petite salle de concert à petite jauge à l’hôtel The Albion Rooms
Que serait un hôtel rock sans un bar ? Situé au sous-sol, The Waste Land – un hommage au poème de l’Américain T.S Eliot mentionnant Margate – a une jauge de 80 personnes et accueille chaque week-end des concerts de groupes montants sur petite scène au tapis léopard. Occasionnellement, les membres des Libertines y improvisent, eux aussi, un petit set. De passage en mars, Peter Doherty a décidé qu’il allait jouer le soir même. « On l’a annoncé sur nos réseaux sociaux et je n’arrêtais pas de recevoir des messages de personnes qui voulaient venir de Londres ou annuler leur réservation au restaurant pour nous rejoindre, mais l’espace reste très limité », appuie Imogen Mew. Une façon de rappeler que la création de ce lieu a permis à certains fans privilégiés de rencontrer leurs idoles de près.
Les cinq étages des Albion Rooms n’ont pas grand-chose à voir avec la poignée d’hôtels de luxe ouverts à Margate depuis la fin de la crise sanitaire. « L’idée est de proposer une véritable expérience. Les artistes peuvent enregistrer en studio, puis se reposer dans les chambres et jouer au bar ensuite. Quant à la clientèle qui vient à l’hôtel, elle va en général aussi au bar. D’ailleurs, certains clients viennent seuls. Des groupes se forment, il y a l’idée de communauté. C’est plus qu’un hôtel. Les Libertines ont toujours voulu que ce lieu soit un espace pour tout le monde », détaille la manageuse, qui rappelle que Peter Doherty et Carl Barât aiment ce lieu comme leur « propre maison ».
« La dernière fois, Peter aidait les clients à monter leurs valises », ajoute la maîtresse des lieux. Lors d’un séjour sur place, n’oubliez pas de quitter l’ambiance feutrée de ce temple du rock’n’roll et d’aller prendre l’air, car les Albion Rooms marquent aussi le début d’une belle balade à faire le long des falaises blanches, direction Broadstairs.
Hôtel The Albion Rooms
31 Eastern Esplanade, Cliftonville, Margate CT9 2HL. Site internet
Ouvert le week-end seulement hors saison. Bar/salle de concert The Wasteland. Pas de restauration sur place pour le moment.
