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Sofitel Legend Metropole Hanoi : l’hôtel où Joan Baez a chanté sous les bombes

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Lieu de villégiature pour Catherine Deneuve, bunker improvisé pour Joan Baez, décor de négociations nucléaires entre Trump et Kim Jong-un… Le Sofitel Legend Metropole Hanoi incarne 120 ans d’histoire vietnamienne, entre luxe colonial, guerre froide et diplomatie contemporaine. Retour sur un hôtel où les murs ont enregistré bien plus que des conversations.

Dans une chambre du désormais nommé Sofitel Legend Metropole, à Hanoï, Joan Baez a écrit « Where Are You Now, My Son? ». C’était en décembre 1972 dans une capitale alors frappée par l’Opération Linebacker II, une pluie de bombes B-52 larguées par les États-Unis. Pendant que la terre tremblait au rythme du vacarme militaire, la chanteuse américaine enregistrait les pleurs de l’hôtel, les cris étouffés de femmes vietnamiennes réfugiées dans le bunker, et sa voix. Ce morceau hybride de plus de dix minutes, mêlant chant et field recording, incarne la mémoire sonore d’un bâtiment qui a vu défiler l’Histoire depuis 1901.

Construit par deux entrepreneurs français, André Ducamp et Gustave-Émile Dumoutier, le Metropole fut le premier hôtel de luxe d’Indochine. Avec ses carreaux en céramique, ses stores en bois et ses chambres à la blancheur coloniale, il fut dès le départ une vitrine de la puissance française à Hanoï. Mais l’histoire du Metropole est loin d’être un long fleuve de champagne. Il faut creuser – littéralement – pour en retrouver les strates les plus enfouies.


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La réception de l’hôtel.
La réception de l’hôtel.

Le bunker invisible

C’est en 2011 qu’un ingénieur chargé de travaux de rénovation Sofitel Legend Metropole du découvre une trappe scellée dans sa cour intérieure. À deux mètres sous terre, un abri anti-aérien en béton, longtemps oublié. C’est là que Joan Baez et une poignée d’invités internationaux ont attendu la fin des bombardements, entre le 18 et le 29 décembre 1972. La chanteuse, ex-compagne de Bob Dylan, elle-même y retournera quarante ans plus tard, en 2013, dans un documentaire réalisé pour CNN, émue et digne, redescendant les quelques marches vers ce que l’hôtel appelle désormais « The Bomb Shelter ».

Mais à l’époque, ce n’est pas un palace que Joan Baez découvre. En 1954, après la défaite de Diên Biên Phu, le Metropole devient un hôtel d’État. Nationalisé par la République démocratique du Vietnam, il héberge alors des hôtes triés sur le volet : diplomates soviétiques, ministres du Parti et délégations étrangères. Les murs, repeints en vert militaire, perdent leur éclat. Les miroirs sont masqués. L’hôtel cesse d’être un décor mondain : il devient outil politique.

Couloirs hantés par l’Histoire

Et pourtant, même dans son incarnation la plus austère, le Metropole reste un lieu de passage obligé. Graham Greene y séjourne dans les années 1950, avant de partir écrire The Quiet American. Catherine Deneuve y plante ses talons lors du tournage d’Indochine en 1991. François Mitterrand y dort en 1993 – et demande une baguette « digne de ce nom », rapportent les cuisiniers. Jane Fonda s’y rend en plein conflit, suscitant la fureur de l’Amérique conservatrice. Angelina Jolie et Brad Pitt y posent leurs valises en 2006, quelques mois après l’adoption de leur fils Pax au Vietnam. Et plus récemment, Donald Trump et Kim Jong-un y ont tenu leur second sommet, en 2019, preuve que le soft power du lieu résiste au passage du temps – et des bombes.

Le paradoxe du Metropole, c’est ce va-et-vient entre le faste et l’ascétisme, entre les cocktails et les sirènes d’alerte. Un lieu qui connaît aussi bien la recette du pho bo que les codes nucléaires. Un palace qui n’a jamais vraiment cessé d’être une scène.

La Terrasse, où l’on peut prendre son petit-déjeuner comme son dîner, évoque un Hanoï d’antan.
La Terrasse, où l’on peut prendre son petit-déjeuner comme son dîner, évoque un Hanoï d’antan.

Sofitel Hanoï : réhabilitation de la légende

Dans les années 1990, alors que le Vietnam s’ouvre prudemment au capitalisme, le gouvernement cherche un partenaire pour sauver ce joyau. Un joint-venture est signé en 1994 avec le groupe Accor, qui commence alors sa conquête de l’Asie. En 2009, l’hôtel rejoint la très exclusive collection Sofitel Legend, aux côtés du Santa Clara à Carthagène et du Grand à Amsterdam. Ici, rien n’est laissé au hasard : le service est chorégraphié, les uniformes du personnel reprennent les coupes de l’époque coloniale (sans la condescendance), et les suites portent le nom des illustres anciens : Graham Greene, Charlie Chaplin, Somerset Maugham.

Les chambres du bloc historique ont été restaurées à l’identique. Le jardin tropical bruisse de cigales artificielles (dispositif sonore pour touristes pressés). Mais le bunker, lui, reste brut, sans fard. Il se visite désormais comme une relique, pièce froide aux murs bruts, accompagnée d’un audioguide qui diffuse – bien sûr – la voix de Joan Baez.

Un pied-à-terre idéal à Hanoï

« Il y a un endroit sur cette planète où j’ai chanté pendant qu’on bombardait mon pays », dira la chanteuse bien des années plus tard. Et ce lieu, contre toute attente, continue de se transformer sans trahir sa mémoire. Le Metropole n’est pas un musée, mais une zone grise où se croisent diplomatie, luxe, mémoire et mise en scène.

Aujourd’hui, à deux pas du lac Hoan Kiem, le Sofitel Legend Metropole Hanoï reste un théâtre aux coulisses visibles. Les voyageurs s’y prélasse, près de la piscine, à quelques mètres de l’entrée du bunker. Le matin, deux options de petit-déjeuner sont proposées, dans des restaurants qui mêlent propositions occidentales et classiques vietnamiens — la meilleure façon de s’immerger à 100 % dans la culture du pays. Avec ses 358 clés, le festin ne s’arrête pas là : les restaurants et bars du Metropole sont tous des lieux de restauration réputés, chacun proposant une expérience exotique différente : Le Beaulieu offre la meilleure cuisine française de cette région du monde ; le Spice Garden revisite la cuisine vietnamienne traditionnelle avec une touche contemporaine ; Angelina, le bar-lounge-restaurant propose une atmosphère chic et feutrée ; La Terrasse apporte un charme parisien sur les trottoirs de Hanoï ; Le Club Bar régale ses invités avec son célèbre tea time accompagné de performances jazz envoûtantes ; enfin, le Bamboo Bar élève l’art de la détente au bord de la piscine à un autre niveau. Un spa complète l’offre de l’hôtel.

Angelina, l’un des plus élégants bars de la capitale vietnamienne.
Angelina, l’un des plus élégants bars de la capitale vietnamienne.

Hôtel Sofitel Legend Metropole Hanoi
15 Ngo Quyen Street, Hanoi, Vietnam 100 000
Site internet


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