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Le pôle de production central de Santoni.
Le pôle de production central de Santoni intègre une école des métiers.
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The Good Business

Santoni L’empreinte du luxe

The Good Business

Depuis le premier modèle de chaussure né dans les années 70, le soin artisanal est suivi de très près par Andrea Santoni. Un amoureux de la belle pompe, doublé d’un perfectionniste au talent commercial remarquable : en à peine quinze ans, son chiffre d’affaires a quasiment quadruplé !

Santoni a investi 3,5 M € pour ce bâtiment green et responsable de 5 200 m2.
Santoni a investi 3,5 M € pour ce bâtiment green et responsable de 5 200 m2. DR

Vingt-cinq jeunes ont été engagés au cours de l’année dernière. Au cœur des Marches, en Italie centrale, on a certes ressenti les effets de la crise économique et de la consommation qui peine à redémarrer, mais l’entreprise Santoni, originaire de Corridonia, représente cette culture du savoir-faire qui fait briller le produit italien haut de gamme dans le monde entier. Pourtant, la chaussure parfaite n’existe pas. Andrea Santoni, qui a commencé son apprentissage du travail du cuir et de la couture à l’âge de 13 ans, en est convaincu. Fils de paysans, il crée son premier laboratoire rudimentaire dans le garage familial. Il achète ensuite un terrain afin d’y faire construire une usine. « Je la considère comme mon troisième enfant. Je me rappelle encore du premier modèle que j’ai réalisé : une bottine à la Celentano [en hommage au chanteur Adriano Celentano qui imposa un style très personnel dans les années 60, NDLR] en cuir nappa noir, avec un talon de 4 centimètres. Un modèle que j’ai modifié au fil des années. »

Andrea Santoni, fondateur et président de la société.
Andrea Santoni, fondateur et président de la société. Susanna Pozzoli

Président de la société, Andrea Santoni travaille aujourd’hui avec sa femme, Rosa, ourleuse expérimentée, et avec son fils aîné, Giuseppe, administrateur délégué (lire interview). Dans ce coin d’Italie niché entre la mer Adriatique et les collines des Marches, l’industrie de la chaussure est encore une affaire de famille. Andrea Santoni sélectionne personnellement les peaux dans les meilleures tanneries d’Italie ou d’ailleurs. La peau de cheval tannée côté chair, le cordovan, provient par exemple de la tannerie Horween, à Chicago. Soucieux de transmettre son savoir-faire, il emmène toujours avec lui un groupe de jeunes artisans à qui il enseigne l’amour pour l’odeur vive et enivrante du cuir. La matière est ensuite façonnée à l’école des métiers qui a été créée au sein du pôle de production central de Santoni.

En chiffres

Date de fondation : 1975.
Localisation : Corridonia (Macerata).
Ateliers de production : 3.
Boutiques : 22, dont 3 en Italie.
Nombre d’employés : 530.
Nombre de paires de chaussures fabriquées en 2015 : 1 300 par jour.
Nombre de paires de chaussures fabriquées sur mesure : 150 par an
CA 2015 : 70 M € (20 % en Italie).

Double contrôle qualité
Ce projet zéro impact, conçu par l’architecte Alessandro Bassetti, s’étend sur 5 200 m2 : le verre, l’acier et l’aluminium, presque entièrement recyclables, la façade à double vitrage, qui fait fonction de serre en hiver et de radiateur en été, et les jardins verticaux sont en accord avec le nouveau courant du green building dont les mantras sont l’énergie propre, la durabilité et la biodiversité des espèces végétales. Même le parking des employés est recouvert de panneaux photovoltaïques. L’entreprise a investi 3,5 millions d’euros pour cette indépendance énergétique et écologique. Ici, dans ce bâtiment ultramoderne ainsi que dans les deux unités voisines, consacrées aux collections femme et sneakers, environ 1 300 paires de chaussures sont produites chaque jour. Les modèles préférés d’Andrea Santoni sont ceux avec un montage Bologna, un cousu Goodyear, mais en plus souple et plus flexible : « Nous effectuons un double contrôle qualité sur toutes les paires, en tannerie et en atelier. Je passe personnellement en revue les collections femme et je teste les collections homme », souligne Andrea Santoni, qui a commencé son aventure d’entrepreneur, en 1975, quand seuls comptaient les grands volumes. Une attention à rebours qui saute aux yeux quand on regarde les artisans diplômés des beaux-arts de Macerata s’occuper du glacis de la chaussure : la première couche de couleur est appliquée au chiffon de coton avec des mouvements lents et toujours verticaux. On applique ensuite d’autres couches avant la finition au pinceau. La chaussure est enfin vernie avec des crèmes et des cires naturelles qui lui donnent une patine unique et incomparable. Cinq heures sont nécessaires pour cette étape. « Je me rappelle d’un voyage à Paris, il y a quinze ans, où j’ai aperçu de telles chaussures dans une vitrine. En rentrant chez moi, je m’en étais fabriqué une paire. Entre le glacis et la patine, on peut trouver cinq tonalités différentes sur une chaussure. Comme dans une toile d’artiste. » Sa passion pour la couleur l’a mené à choisir l’orange comme signe distinctif des semelles Santoni. Des semelles toujours construites avec une trépointe, ce qui permet de remplacer la semelle d’usure. Le produit artisanal doit durer dans le temps. Un credo qui attire d’autres secteurs, de la mode, mais pas seulement : des bracelets de montre fabriqués en exclusivité pour l’horloger suisse IWC, des chaussures de sport créées en exclusivité pour Mercedes-AMG, une collection capsule imaginée pour Rubelli… Ces nombreux marchés de niche ont fait bondir le chiffre d’affaires de l’entreprise en à peine quinze ans : en 2001, il était de 18 millions d’euros ; en 2004, année de crise économique pour le secteur de la chaussure, il est monté à 24 millions, puis à 30 l’année suivante, pour arriver à 70 en 2015.

Le glacis de la chaussure est une étape qui nécessite 5 heures de travail.
Le glacis de la chaussure est une étape qui nécessite 5 heures de travail. DR

Le soleil se couche sur le quartier général de Santoni. Ouvriers et employés rentrent chez eux sans redouter le trafic. Dans le cœur battant de l’usine, les portes blindées se ferment : elles gardent précieusement un coffre-fort digne de celui d’un pirate, rempli de peaux précieuses aux noms exotiques comme l’iguane et la raie, le lézard et le python. Toutes sont étiquetées. Demain, elles seront choisies pour être découpées à la main, assemblées, cousues, colorées et vernies. Même la peau de crapaud se transformera comme par enchantement en un décolleté sexy ou une chaussure masculine fuselée à double boucle.

3 Questions à Giuseppe Santoni

Administrateur délégué de l’entreprise

Giuseppe Santoni, administrateur délégué de l'entreprise.

The Good Life : Quelle est la tendance de croissance pour Santoni et dans quelle direction se dirige l’entreprise ?
Giuseppe Santoni : Notre chiffre d’affaires, pour 2015, s’élève à 70 M €. L’Italie, qui représente 20 % du chiffre d’affaires, a augmenté d’environ 3 %. Ce succès est notamment dû aux collections femme et accessoires pour lesquelles nous misons et investissons énormément en termes de ressources et de créativité. D’ailleurs, une division comprenant un bureau de style autonome a spécialement été créée. Parmi les pays étrangers, nous nous concentrons sur l’Europe de l’Est, qui apprécie la longévité des chaussures Santoni ; sur le Japon, qui aime notre savoir-faire et notre vision des choses ; sur la France, second marché européen après le marché italien (10 % du chiffre d’affaires), qui, plus que tout autre pays, achète des chaussures colorées aux formes fuselées. La Chine nous intéresse également beaucoup, mais la conquête de ce marché est difficile pour le type de produit que nous proposons : le consommateur chinois n’est pas prêt à dépenser des sommes importantes et ne s’émeut pas devant une paire de chaussures faites dans les règles de l’art. En outre, il achète souvent à l’étranger. Cela dit, nous travaillons très bien à Hong Kong, dans notre boutique qui est installée dans l’atrium du grand magasin Landmark.
TGL : Comment le produit Santoni est-il aujourd’hui distribué dans le monde ?
G.S. : Nous avons trois boutiques en Italie (à Milan, à Rome et à Cagliari) et dix-neuf dans le monde. Au printemps prochain, nous ouvrirons des boutiques monomarques à Paris, à Zurich, à Singapour et dans différentes villes chinoises, où nous sommes déjà présents (Shanghai, Shenzhen et Pékin). En ce qui concerne la vente en ligne, nous avons trois plates‑formes : européenne, asiatique et américaine. Ce canal, auquel nous croyons beaucoup, doit être encore plus structuré. Il arrive que notre clientèle commande une paire de chaussures sur le site après l’avoir vue en boutique. Le point de vente classique reste
toutefois une vitrine pour la marque et un lieu indispensable.
TGL: Existe-t-il une géographie de la chaussure Santoni ?
G.S. : Nous sommes devenus célèbres grâce à la chaussure à double boucle, un produit emblématique auquel nous avons également associé un sac et qui se vend très bien en Asie ainsi qu’en Europe de l’Est. Le mocassin règne sur les Etats-Unis et représente, avec les sneakers, 50 % du secteur masculin. Pour tous les modèles, nous pouvons dire que la chaussure Santoni est comme un meuble fait par un ébéniste : on peut la démonter et la cirer. En effet, nous assurons un service d’entretien et nous remplaçons les semelles. Pour ce qui est du sur‑mesure, nous réalisons environ 150 paires de chaussures par an pour une clientèle très exigeante : il faut compter en moyenne trois mois d’attente, et le prix varie entre 4 000 et 8 000 € pour une paire de chaussures en crocodile. Toujours made in Santoni, car l’important n’est pas l’endroit où l’on fabrique un produit, mais la culture et l’ADN de la marque.

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