Art
The Good Culture
La photographe américaine Cindy Sherman inaugure sa première grande rétrospective belge au Fotomuseum (FOMU), à Anvers. Organisée de manière chronologique, l’exposition couvre trente ans de carrière en une centaine d’œuvres.
Dès le début, les clés du travail de Cindy Sherman sont là. Sa poupée découpée dans du papier photo, datée de 1975, révèle un intérêt pour la mode et le déguisement comme véhicules d’une mise à nu, au sens propre comme au figuré.
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Bas les masques
En parallèle, la découverte des films noirs des années 50, où les personnages féminins ont aussi peu de profondeur que l’arrière-plan sur lequel ils se trouvent, pousse l’artiste à construire des identités qu’elle capture en un seul cliché. La formule de ses portraits stéréotypés est née !
Au fil des ans, l’empreinte de Cindy Sherman dans la mode – ou son absence – jauge notre capacité d’autodérision, comme le démontre la série d’images rejetées par Dorothée Bis, alors jugées inappropriées par la marque. Pour bien comprendre la portée de cette exposition, il faut idéalement en voir deux autres, également insérées dans l’hommage de la Flandre à l’artiste James Ensor.
In Your Wildest Dreams – Ensor Beyond Impressionism, qui se tient à quelques pas de là, au musée royal des Beaux-Arts (KMSKA), évoque l’étonnante modernité du peintre du XIXe siècle. Inspiré par Gustave Courbet et Rembrandt, l’artiste rebelle a utilisé le masque pour révéler une certaine hypocrisie latente.
Pour Ensor comme pour Cindy Sherman, il ne s’agit pas de se cacher derrière un faux-semblant, mais bien de sublimer les stéréotypes d’une société parfois trop embourgeoisée pour oser se regarder honnêtement dans le miroir.
Chez le premier, les protagonistes se transforment en squelettes ridicules (Squelettes voulant se chauffer, 1889) ; chez la seconde, les images pointent du doigt la vacuité de personnages en perpétuelle demande d’attention.
Au musée de la Mode (MOMU), l’exposition Make-Up, sur le rôle du maquillage et du masque, utilise deux œuvres de Sherman pour souligner une obsession de l’apparence qui amplifie les imperfections jusqu’au grotesque.
Cindy Sherman, FOMU, jusqu’au 2 février. Fomu.be
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