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Rencontre avec Régis Marcon, un Chef dans le secret des cieux
Rencontre avec Régis Marcon, un Chef dans le secret des cieux
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The Good Business

Rencontre avec Régis Marcon, un Chef dans le secret des cieux

The Good Business

Triplement étoilé pour son restaurant de Saint-Bonnet-le-Froid (43), Régis Marcon, 62 ans, aurait pu abandonner les fourneaux avec le sentiment du travail accompli. Mais il est trop attaché à la gastronomie, obsédé par la transmission et la formation, passionné par les défis, pour se la couler douce. Rencontre à New York.

Il est l’un des chefs les plus respectés du monde. Régis Marcon reprend l’auberge de sa mère à la fin des années 70, et perfectionne, petit à petit la cuisine traditionnelle que sert depuis longtemps cette « Auberge des Cimes » à Saint-Bonnet-le-Froid en Haute-Loire. Il obtient, en 1990, sa première étoile Michelin, puis une deuxième en 1997 – deux ans après son Bocuse d’Or – et déménage dans un nouveau restaurant en 2005. La même année, il obtient son troisième macaron Michelin, qu’il a conservé depuis. Entre temps, en 2003, il est fait Chevalier de la Légion d’honneur. Rien que ça.

Dans sa petite commune auvergnate, il ouvre « La Chanterelle », une boulangerie, « La Coulemelle », un bistrot, et « Les Russules », un gîte. Des noms de champignons, dont il est un spécialiste. Son hôtel-restaurant principal, celui aux trois étoiles, ne s’appelle ni « cèpe » ni « oronge », mais simplement « Régis et Jacques Marcon », son fils qu’il a formé et qui l’épaule en cuisine. La transmission et la formation, deux indispensables à l’équilibre du Chef.

Le restaurant Régis et Jacques Marcon, à Saint-Bonnet-le-Froid (43).
Le restaurant Régis et Jacques Marcon, à Saint-Bonnet-le-Froid (43). Laurence Barruel

Autre passion de Régis Marcon : les défis. C’est ce qui l’a amené à accepter de travailler avec Air France, dès 2015, à la conception de cartes saisonnières pour la classe affaires, puis la première classe dès l’an prochain. C’est à l’occasion du voyage « Ciel un Chef » entre Paris et New York que The Good Life a pu rencontrer le Chef, le temps d’une interview au Chelsea Market, entre deux œufs Bénédicte.

Marcon, père et fils.
Marcon, père et fils. DR

The Good Life : Qu’est-ce qui vous a convaincu d’entamer cette collaboration avec Air France ?
Régis Marcon
 : J’aime les challenges et, lorsque l’on imagine un menu à déguster en avion, sur ce point on est servis ! Au niveau sanitaire, c’est déjà un premier défi. Il faut adapter les cuissons, pour optimiser la conservation. Mais sans perdre en mâche ! Puis, il faut sélectionner les bons produits, certains comme le rouget, le chou-fleur, le maquereau, sont exclus pour leurs odeurs, mais d’autres ne sont simplement pas bons une fois réchauffés. Les sauces, c’est là où je prends mon pied, mais il a fallu composer avec des fonds déjà préparés, pour des questions de logistique, là encore c’est une question d’adaptation. Enfin, il faut être régulier, de la première à la dernière portion. Travailler avec des contraintes, c’est aussi une manière d’apprendre, et c’est ce qui me plaît.

The Good Life : Quelles sont les étapes de la création d’une telle carte ?
Régis Marcon
 : Première étape, trouver le produit. Faire des essais. Deuxième étape, rencontrer les équipes créatives d’Air France, goûter avec eux, et ajuster. Une fois que l’on est d’accord, on envoie chez Servair [l’opérateur catering de la compagnie, NDLR]. Ensuite, je monte former les employés chargés de préparer les plateaux, pour leur expliquer ma vision des assiettes. Parfois, j’observe leurs habitudes et j’adapte mon dressage en fonction. Cela prend plusieurs mois, et ce n’est jamais vraiment fini. Par exemple, au départ, je n’aimais pas le poisson, je suis monté à Paris plusieurs fois pour que l’on revoit notre copie. C’est un beau travail d’équipe !

Dans le cadre de sa collaboration avec Air France, Régis Marcon a participé deux fois à l’expérience « Ciel un chef ».
Dans le cadre de sa collaboration avec Air France, Régis Marcon a participé deux fois à l’expérience « Ciel un chef ». DR

TGL : Qu’est-ce que la cuisine « aérienne » permet d’expérimenter ?
R.M.
 : Nous allons vers une consommation de viandes et de poissons plus raisonnable. Je pense que l’aérien permet d’exploiter des légumineuses, des légumes, des graines, et de proposer au moins 50 % de plats végétariens. Ce serait l’idéal d’aller vers une telle proposition, sortir du schéma « entrée – poisson – viande ». En effet, dans l’avion on sert des plats réchauffés, et rien n’est meilleur réchauffé qu’un cassoulet, une lentille, une soupe… Je pense également que l’on peut se passer de couteaux, même de couverts, pour se contenter d’une cuillère ! Faire de cet espace qui reste confiné, même en business, pour faire découvrir aux clients de nouvelles façons de manger.

TGL : C’est dans l’ADN d’Air France depuis quelques années de jouer sur la francité, et d’inviter des chefs très inspirés par leur terroir, comme vous…
R.M.
 :  C’est vrai, mais cette nuit j’ai commencé à réfléchir à ce que je pourrais servir en première classe l’année prochaine. J’imagine un dal indien, avec des lentilles jaunes, du lait de coco, du curry rouge, de la tomate… On imaginera la french touch plus tard ! (rires) Je me régale aussi en sortant de mon « terroir »…

Régis Marcon accompagné de Frédéric Crépin, chef Servair, sur le vol AF010 d’Air France entre Paris et New York, le 27 novembre dernier.
Régis Marcon accompagné de Frédéric Crépin, chef Servair, sur le vol AF010 d’Air France entre Paris et New York, le 27 novembre dernier. DR

TGL : Et vous aimez voyager !  
R.M.
 :  Exactement. J’adore me déconnecter, me dépayser. Cela permet d’ouvrir son esprit, découvrir de nouvelles traditions, faire de petits marchés… L’idée n’est pas forcément de ramener des produits, ou des idées, mais ça vient forcément quand on laisse l’expérience nous enrichir. Puis c’est toujours intéressant de découvrir les différences culturelles… Partout dans le monde, lorsque l’on est Chef, on s’annonce et notre « confrère » nous ouvre ses cuisines, discute… Mais ils ne réagissent pas tous pareil ! En Chine, c’est un lieu sacré, le cuisinier se fait discret, mais en Italie, il vous demanderait presque de mettre la main à la pâte ! (rires)

TGL : Justement, quelles sont les destinations qui vous ont le plus marquées ?
R.M.
 :  D’abord, il y a le Cambodge, où je suis parrain d’une école qui a déjà formé 150 jeunes, des élèves qui s’épanouissent, c’est une expérience très enrichissante.  L’Asie en général est fascinante, notamment pour sa culture du produit et de son histoire. Le Québec également, un pays (sic) très ouvert. Le Pérou aussi, où je suis allé en 1973, découvert le quinoa et me suis intéressé à l’histoire de cette graine, que les Espagnols avaient totalement rejetée. De fil en aiguille, à partir de ce simple produit, on en apprend sur le pays, les religions, la culture… Et on n’a jamais fini de découvrir de nouvelles choses. L’année dernière, en Afrique, au Sénégal, j’ai découvert des méthodes et savoir-faire que ne connaissais pas…

Les adresses du Chef Marcon

• Restaurant Régis et Jacques Marcon (trois étoiles au Michelin).
• Hôtel 4 étoiles Régis et Jacques Marcon.
• Hôtel 3 étoiles Le Clôt des Cimes.
• Hôtel 3 étoiles La Découverte.
• Bistrot La Coulemelle.
• Boulangerie La Chanterelle.
• Gîte Les Russules.

www.regismarcon.fr


 

 

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