The Good Business
Depuis quelques années, le marché quasi-sclérosé de la montre made in the USA reprend des couleurs sous l’impulsion de « micro » marques indépendantes qui perpétuent les valeurs de l’horlogerie locale.
On connaissait Timex et Hamilton, qui a déménagé de sa Pennsylvanie natale pour la Suisse lors de son rachat par Swatch Group, puis, bien avant, Elgin, disparue depuis 1968. Des maisons horlogères créées aux Etats-Unis qui partagent toutes les mêmes valeurs : fonctionnalité, bon rapport qualité/prix, solidité et une sobriété que certains voient comme une approche simpliste du design horloger.
A part le maroquinier Fossil fondé en 1984, et la marque de surfwear Nixon créée en 1997 – elle plaît beaucoup aux millennials – il a fallu attendre les années 2010 pour que le marché de la montre américaine se renouvelle et voir apparaître de nouveaux acteurs. Si l’on enlève de l’équation Apple et sa Watch qui en font l’un des plus gros vendeurs de montres de la planète, il reste principalement de petites marques indépendantes.
La plus célèbre a été créée en 2011 et n’est pas qu’une marque de montres (et de sacs, de vélos, d’accessoires etc.). Shinola fait également partie des leviers qui ont permis la renaissance, timide et toujours en cours, mais bien amorcée, de sa ville d’origine : Détroit.
Parmi les marques les plus influentes on compte également Kobold, Keaton Myrick, Oak & Oscar, Martenero, Brew… Si certaines invoquent clairement les fantômes du passé, comme Vortic qui réimprime en 3D, les boîtiers des américaines d’antan, Elgin notamment, l’immense majorité de ces horlogers indépendants a réussi à apporter une touche de modernité à ses tocantes, sans perdre le fil conducteur de ce qui fait le succès des montres made in the USA.
Ainsi, les prix dépassent rarement les 2000 $, la praticité est « la » qualité mise en avant par les marques, le design est minimaliste et les boîtiers aussi virils que Josh Brolin dans un Ford Bronco. Les détails ? La sophistication ? La subtilité ? Oui, mais « à l’Américaine ».
Une nouvelle scène en développement dont les talents, même les plus doués, reviennent au bercail. Ainsi, Cameron Weiss, allure de surfeur, a fait ses armes en Suisse chez Audemars Piguet et Vacheron Constantin, avant de rentrer en Californie pour lancer, en 2013, sa propre manufacture : Weiss Watch Company. Il fabrique lui-même les mouvements et boîtiers de ses montres, dont le look néo-rétro et la fiabilité séduisent très vite les influenceurs et journalistes menswear américains.
Quatre questions à Cameron Weiss, fondateur de Weiss Watch Co.
The Good Life : Comment avez-vous eu l’idée de fonder votre marque horlogère aux Etats-Unis ?
Cameron Weiss : Je suis passionné par les montres depuis toujours. Tout petit je ne sortais jamais sans en porter une. Après 10 ans dans le milieu en Suisse, j’ai commencé, il y a 5 ans, à fabriquer mes montres dans mon appartement de Beverly Hills avec l’ambition de participer à redorer le blason de la manufacture américaine. Je fabrique moi-même, du début à la fin, mes mouvements mécaniques, CAL 1003, depuis 2016.
The Good Life : Qu’est-ce qui différencie une montre américaine d’une montre suisse ou allemande ?
Cameron Weiss : L’origine est, en effet, une différence majeure…. Ici, nous n’avons pas accès à de grands nombres de fabricants pour nos boîtiers, nos mouvements, même nos bracelets. Il faut apprendre à se débrouiller par nos propres moyens et tout développer « in house », ce qui a donné aux montres américaines une identité différente de celles que l’on trouve en Europe, hors des standards. Et on ne va pas réinventer la roue ! Même si j’utilise des technologies modernes, je reste profondément inspiré par le design américain.
TGL : Comment expliquez-vous le récent boom des indépendants sur la scène étasunienne ?
C.W. : Je pense que l’effet de surprise, et l’attrait pour la nouveauté, y sont pour beaucoup. Mais tout cela ne devrait pas tarder à se stabiliser. Je suis très heureux de voir de nouvelles compagnies éclore sur le territoire, c’est la preuve que de plus en plus de gens sont fiers de voir « US MADE » écrit sur leur poignet. Il faut maintenant que cet engouement dépasse nos frontières…
TGL : Justement, quel avenir pour cette nouvelle génération d’horlogers américains ?
C.W. : Les amateurs de montres sont nombreux ici et ils ont beaucoup aidé les petites marques indépendantes comme la notre, à se développer. Il y a un vrai marché à conquérir, et de nouvelles manufactures voient le jour régulièrement. Je suis impatient de voir comment tout cela va évoluer, et j’espère que les infrastructures vont continuer à se développer, pour faciliter la fabrication.
Nos 4 horlogers indépendants américains favoris
1. Shinola. Détroit. 2011.
Modèle incontournable : Black Blizzard 48 mm.
2. Weiss Watch Company. Los Angeles. 2013.
Modèle incontournable : American Issue Field Watch – CAL 1003.
3. Brew. New York. 2015.
Modèle incontournable : Retrograph – Oxford.
4. Oak & Oscar. Chicago. 2015.
Modèle incontournable : The Jackson.
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