The Good Business
Petit pays mais grands projets : la « perle des Balkans » multiplie les efforts pour s'affirmer en tant que nouvelle destination de luxe.
Les mille et une vies de Sveti Stefan
Rattachée à la municipalité de Budva, cette presqu’île reliée au continent par un étroit isthme de sable est devenue l’emblème du Monténégro, avant celles des marinas et des resorts de grand luxe. Le pays se réduisait alors à ce cliché-symbole dans toutes ses campagnes de promotions touristiques internationales. Il est vrai que ce village fortifié du XVe siècle, dressé sur un îlot rocheux, ne manque pas de charme avec ses ruelles étroites, sa belle pierre et ses toits orange.
Tito lui-même avait succombé au potentiel de l’île et décidé d’en faire un établissement de grand luxe, dans lequel célébrités, stars de cinéma et hommes politiques défilaient pendant que le maréchal prenait ses quartiers à la villa Milocer, bâtisse néoclassique du XVIIIe siècle et demeure d’été de la reine Marija Karadjordjevitch, épouse d’Alexandre Ier de Yougoslavie.
Données clés (2017)
• Déclaration d’indépendance : 3 juin 2006.
• Candidature officielle à l’entrée dans l’Union européenne : 2010 (dépôt en 2008) et entrée estimée en 2025.
• Utilisation de l’euro depuis 2002.
• Superficie : 13 812 km2.
• Population : 642 550 habitants.
• Capitale : Podgorica (177 000 habitants).
• PIB : 4,125 Mds €.
• Croissance du PIB : de 4,5 à 5 % (3e taux de croissance en Europe, Monstat Statistics 2018).
• Taux de chômage : 17 %.
• Salaire net moyen : 511 € (Monstat Statistics 2018).
• Taux d’inflation annuel : 2,5 %.
• Importations de biens : 55,7 % du PIB.
• Exportations de biens : 8,9 % du PIB.
• Flux net d’IDE : 12 % du PIB.
• Dette publique : 65,1 % du PIB.
Cette riche histoire fait aujourd’hui le bonheur de son actuel gérant, le groupe singapourien Aman, à la tête, depuis 2008, d’un domaine de 32 hectares comprenant l’île de Sveti Stefan, la villa Milocer, un parc, trois plages et un spa. Résolument discret – c’est sa marque de fabrique –, il est toutefois devenu un acteur incontournable du développement de toute une région et a surtout acquis une réputation incontestable de pionnier dans l’essor touristique du pays.
Chiffres clés dans le secteur du tourisme (2018)
• 2,2 M de touristes, soit 10,22 % de plus qu’en 2017.
• Plus de 12 M de nuitées, soit 8,15 % de plus qu’en 2017.
• Provenance : Russie (25,1 %), Serbie (24,5 %), Bosnie-Herzégovine (9,1 %), Ukraine (3,9 %), Allemagne (3,6 %), France (3,1 %), Pologne (2,8 %), Grande-Bretagne (2,6 %).
• D’après la Central Bank of Montenegro (CBM), les revenus du secteur touristique international s’élèvent à 1 Md €, en augmentation de 8,6 % par rapport à 2017 (et une augmentation de 81,29 % par rapport à 2010).
3 questions à Goran Kovacevic, Responsable de la stratégie et du développement des affaires pour Lustica Bay
The Good Life : Quelles sont les caractéristiques du secteur touristique au Monténégro ?
Goran Kovacevic : Ce qui s’est passé ces dix dernières années, c’est surtout que le Monténégro est apparu sur les radars. L’indépendance de 2006 a donné de la visibilité à cette destination. Tout à coup, les gens se sont mis à s’intéresser à ce nouveau pays européen. Pendant cette période, le gouvernement a entrepris d’importants efforts pour améliorer l’accessibilité et les infrastructures du pays, même s’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Le nombre de visiteurs augmente et la tendance se confirme d’année en année. Nous observons également un changement intéressant dans le segment du marché. Il y a moins de touristes régionaux et davantage de touristes occidentaux et internationaux. On voit une part grandissante de touristes venant des pays du Golfe, mais aussi de Chine. Par ailleurs, le Monténégro fait partie du programme de la nouvelle route de la soie entrepris par le gouvernement chinois. Les entreprises de construction chinoises sont déjà présentes et jouent un rôle important dans le développement des infrastructures, ce qui devrait soutenir la croissance du secteur du tourisme.
« Il est plus intéressant pour nous de nous associer. »
TGL : Existe-t-il un écosystème du tourisme de luxe ?
G. K. : Nous sommes une petite communauté et nous nous côtoyons. Bien sûr, nous sommes concurrents même si nous proposons des produits différents les uns des autres. Mais nous avons surtout des points communs, et il est plus intéressant pour nous de nous associer et d’avoir une même voix pour mieux négocier avec le gouvernement. L’amélioration des infrastructures, et en particulier du trafic aérien, est, par exemple, l’une de nos priorités. Et puis le Monténégro est un petit pays qui ne possède pas autant de ressources que nous, ici. En promouvant nos projets, c’est le pays que nous mettons en avant, et il est vital de montrer tout ce qui se passe en ce moment pour démontrer le dynamisme et le foisonnement du secteur du tourisme de luxe.
« C’est ce que nous avons fait en Egypte, à Oman ou à Andermatt. »
TGL : Quels sont les enjeux derrière l’édification d’un projet aussi faramineux que celui de Lustica Bay ?
G. K. : Notre ambition est de modeler et de structurer le tourisme de luxe au Monténégro. En réalité, ce projet correspond en tout point à notre stratégie d’affaires. Si les échelles varient, le procédé est toujours le même. Nous développons un territoire vierge et nous y bâtissons de véritables villes touristiques. C’est ce que nous avons fait en Egypte, à Oman ou à Andermatt. La difficulté du tourisme adriatique est sa saisonnalité, que nous controns ici en créant une ville. Si notre projet peut paraître mégalomaniaque, nos phases de développement sont extrêmement raisonnées. La première est la construction de notre vitrine qui va servir à attirer de nouveaux investisseurs. Et grâce à des marques renommées comme The Chedi, nous attirons leur clientèle fidèle et loyale qui découvre ainsi la destination.
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