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The Good Life a sélectionné six beaux-livres de divertissement pensés pour s’amuser, tout en se cultivant, Paris, France, 2023 - The Good Life
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Les meilleurs Goncourt de l’histoire, à lire et à relire

Culture

The Good News

Le 4 novembre prochain sera annoncé le 121ème prix Goncourt. Créé en 1903 selon les volontés d’Edmond de Goncourt, il est la plus ancienne récompense littéraire française, et donc la plus prestigieuse. Retour sur 10 romans distingués qu’on ne se lasse pas de relire.

Avant de jouer au jeu de la liste subjective des meilleurs du genre, revenons sur monsieur Goncourt. A vrai dire Edmond Huot de Goncourt est connu pour sa collaboration avec son frère Jules de Goncourt. Ensemble, les frères Goncourt signent 16 romans dits naturalistes et leur fameux « Journal », sorte de journal intime publié à titre de mémoires. Ensemble, ils animent également un salon littéraire informel baptisé le « Grenier » dans le 16ème arrondissement de Paris où se retrouvent, selon la date, Alphonse et Léon Daudet, Eugène Carrière, Auguste Rodin ou Émile Zola pour ne citer qu’eux.

Un ouvrage, publié en 2020 par Pierre Ménard, « Les infréquentables frères Goncourt », résume bien la chose : « Suivre les Goncourt, c’est courtiser la princesse Mathilde, dîner avec Zola, survivre à la Commune, passer des salons des Rothschild aux soupentes sordides et recevoir toute l’avant-garde artistique dans leur Grenier de la Villa Montmorency. Pamphlétaires incisifs, romanciers fondateurs du naturalisme, dramaturges à scandale, collectionneurs impénitents, ces langues de vipère ont légué à la postérité un cadeau empoisonné : un Journal secret qui fait d’eux les meilleurs chroniqueurs du XIXe siècle. Seule la méchanceté est gratuite, aussi les deux écrivains la dépensent-ils sans compter. Chaque page laisse éclater leur détestation des femmes, des parvenus, des Juifs, des artistes et de leurs familiers. » Enchanté.

Il nous reste d’eux ce fameux prix pour, selon leurs termes, « forcer les portes de la gloire ». Espéré et demandé dans un testament d’Edmond de Goncourt, ce sont Daudet et Léon Hennique qui parvinrent à créer une association d’utilité publique, l’Académie Goncourt, le 19 janvier 1903. En fin d’année, un jury composé de 8 membres votèrent pour l’ouvrage « Force ennemie » de John-Antoine Nau publié chez La Plume, premier prix Goncourt de l’histoire. Puis l’aventure ne cessa jamais… Même après la riposte de 22 femmes s’unissant autour d’Anna de Noailles l’année suivante pour créer le prix de la Vie Heureuse (qui deviendra le prix Femina en 1922) en réponse à la misogynie de l’Académie (historiquement, le prix avait été mis en place pour récompenser un homme). La première femme a remporté un Goncourt sera Elsa Triolet en 1944. Même après la Seconde guerre mondiale, alors que les autorités de Vichy intervinrent pour faire gagner Henri Pourrat, écrivain prônant le retour à la terre plutôt que Raymond Guérin. Même après le scandale de 1932 où la récompense revint à Guy Mazeline pour « Les Loups », snobant « Voyage au bout de la nuit » de Louis-Ferdinand Céline, évincé par 6 voix contre 4. Même après qu’on pointe que, dans la liste des 120 Goncourt, on ne compte ni Colette, ni André Gide, ni Albert Camus, ni Marguerite Yourcenar ou Françoise Sagan. Même après que le prix se fasse taxer de conventionnel et de corrompu. Bref, le Goncourt fait office de boussole et assure, à son auteur, un succès et des ventes. L’occasion de replonger dans la liste des lauréats pour se demander quel Goncourt devrait-on lire et relire ?


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Liste (forcément subjective) des meilleurs Goncourt de l’histoire

1910 : « De Goupil à Margot », de Louis Pergaud

Plus connu pour « La Guerre des boutons » qui marquera la France en 1912, Louis Pergaud (1882 – 1915) reçu le Goncourt (devant Apollinaire, Colette et Roupnel, excusez du peu) deux ans avant pour ce livre-ci. L’histoire, sous-titré « histoire de bêtes » et sous forme de nouvelles, de la souffrance animale racontée par le prisme des animaux. Tous ont ici une conscience, élaborent des plans, rendent compte de leur humeur. Un roman d’avant-garde peut-on juger aujourd’hui ! L’auteur, qui fut un grand antimilitariste, aimait traiter de la cruauté humaine qui ressemblait finalement davantage à celle des animaux ; ou l’idée qu’on s’en faisait. Résultat, qui sont les plus atroces ? A vous d’en juger. Louis Pergaud, lui, mourut durant la Première Guerre mondiale.

«  De Goupil à Margot », de Louis Pergaud aux éditions Le Livre de Poche

meilleurs livres primés au goncourt

1919 : « A l’ombre des jeunes filles en fleur » de Marcel Proust

Difficile de ne parler que d’un tome pour évoquer la tentaculaire œuvre de Proust. C’est pourtant le tome 2 qui reçut, à sa parution, le prix Goncourt. Le tome 1, « Du côté de chez Swann », parait en 1913 chez Grasset à compte d’auteur. Mais la guerre éclate et les tomes suivants sont relégués aux oubliettes. Marcel Proust (1871 – 1922) a tout le temps de retravailler son texte et le bouleverse considérablement. Résultat, en 1919, il publiera certes son deuxième tome avec Gallimard mais également le premier, repris et corrigé. Si « Du côté de chez Swann » relate l’enfance du narrateur et l’histoire de Swann et Odette, le deuxième tome s’attèle à raconter les amours naissants du jeune héros. Il est toujours étonnant de se souvenir que rien dans l’épopée de « La Recherche » n’est bouleversant ou novateur mais que ceux qui savent prendre leur temps découvriront là une écriture qui les chamboulera pour toujours.

« A l’ombre des jeunes filles en fleur », de Marcel Proust aux éditions Gallimard

meilleurs livres primés au goncourt

1942 : « Pareil à des enfants », de Marc Bernard

Écrivain aujourd’hui oublié, Marc Bernard (1900 – 1983) est pourtant un type à connaitre. Fer de lance et défenseur de la littérature prolétarienne, adhérent au PCF et à la CGTU, ce Nîmois né de parents franco-espagnol épouse Else Reichmann, juive autrichienne. Autant dire que dans la France occupée, le prix de 1942 sonnait comme une résistance. Lui l’apprit par la radio, caché en zone libre avec sa femme et sa fille Marie. Dans le jury ce jour-là : Sacha Guitry, Rosny jeune, monsieur Benjamin, Jean Ajalbert et Jean-Balthazar Mallard comte de La Varende. Remercions le Goncourt d’avoir rendu son plus grand succès inoubliable. L’histoire d’un gosse de Nîmes, Léonard, naïf et drôle, de sa vie quotidienne difficile dans le quartier de La Croix-de-Fer, d’un papa coureur de jupon parti aux Amériques et d’une mère avec qui il ne s’entend pas toujours. C’est l’autobiographie de l’auteur qui s’attache à faire revivre des personnes simples dites « pittoresques » de son enfance, dans un monde pauvre, rude mais jamais triste. Un témoignage du début du XXème siècle où les bistrots grouillaient et où les gamins gouaillaient. A découvrir.

« Pareil à des enfants », de Marc Bernard aux éditions Gallimard

meilleurs livres primés au goncourt

1954 : « Les Mandarins », de Simone de Beauvoir

On a beau être en 1954, la guerre n’est pas loin dans les esprits européens. C’est aussi ce que raconte ce quatrième ouvrage de Simone de Beauvoir. Le retour à la vie, l’après 44 : Paris est libéré mais les restrictions sont nombreuses. 1000 pages en deux tomes pour découvrir Henri Perron, narrateur principal, patron de presse ; mais aussi son ami Robert Dubreuilh, écrivain engagé, et sa femme Anne Dubreuilh, psychologue de métier et aide précieuse de son mari, évidemment. Les Socialistes et le PC s’affrontent, et les personnages sur le papier font référence à la vieille guerre qui animait Albert Camus et Jean-Paul Sartre sur la Gauche française. Ajoutez à cela la question centrale : peut-on concilier écriture et action politique, et vous obtiendrez « Les Mandarins ». Le livre de l’intelligentsia Rive Gauche qui fricote avec les politiques, ceux qui dirigent et qui décident, la transposition d’une époque qui ressort d’un épisode traumatique, le témoignage, aussi, de la vie de Simone de Beauvoir et l’un de ses meilleurs romans. N’allez pas croire qu’il est impossible à lire, le Goncourt en atteste, il est fluide et bien mieux écrit que « Le Deuxième sexe ». L’une des tirades étant passée à la postérité, il faut la redonner, que dis-je, s’en délecter ici : « Je suis un intellectuel. Ça m’agace qu’on fasse de ce mot une insulte ; les gens ont l’air de croire que le vide de leur cerveau leur meuble les couilles. (p223) »  

«  Les Mandarins », de Simone de Beauvoir aux éditons Gallimard

meilleurs livres primés au goncourt

1975 : « La vie devant soi », de Romain Gary

Avant de parler du livre, il faut raconter cette histoire rocambolesque. Déjà couronné en 1956 pour « Les racines du ciel », Romain Gary est le seul écrivain à avoir remporté le titre deux fois. Et pour cause, le règlement ne le permet pas. Après avoir obtenu le prix, les gagnants ne concourent tout simplement plus. C’est un canular qui prendra fin en 1980, avec le suicide de l’auteur le 2 décembre à Paris. Avec ce prête-nom, Emile Ajar, Romain Gary veut échapper aux avis tout-fait, lui l’écrivain passé de mode terrorisé par le déclin (il vous faut lire pour cela cet incroyable roman au titre tout aussi incroyable « Au -delà de cette limite votre ticket n’est plus valable »). A ceux qui disent « j’aime pas Gary » sans en avoir lu deux lignes comme à ceux qui peuvent exposer leur désamour point par point pendant 2 heures. Il souhaite qu’on le lise vraiment, sans penser au personnage qu’il s’est créé, ex-mari de l’actrice Jean Seberg ou ex diplomate. Un article du 24 novembre 1975 du Monde relate : « Émile Ajar, l’auteur de la Vie devant soi, couronné par les Goncourt, et dont le vrai nom, Paul Pavlovitch, vient d’être révélé, a été retrouvé vendredi soir à Paris, par des reporters-photographes. Il a refusé de répondre aux questions qui lui étaient posées, notamment à propos du refus du prix annoncé par son avocat, Me Gisèle Halimi, jouant même des poings pour échapper aux journalistes. L’auteur de la Vie devant soi avait quitté la veille Caniac-du-Causse, son village du Lot, pour Paris, où il occupe une chambre d’un immeuble de la rue du Bac, qu’habite l’écrivain Romain Gary, dont il est un parent. 

L’article reprend : « Romain Gary était pourtant soupçonné d’avoir aidé Émile Ajar pour la Vie devant soi :  » C’est une fabulation, a-t-il déclaré… Bien sûr dans le Goncourt, on trouvera une petite influence de mes propres écrits, par-ci, par là, de petites choses. Paul a lu mes écrits, c’est évident. Mais, dites-moi, comment j’aurais pu trouver le temps de faire le roman d’Émile Ajar alors que j’ai traduit en anglais mon dernier-né : Au-delà de cette limite, votre ticket n’est plus valable, terminé une pièce de théâtre, achevé un scénario ? Je ne suis pas un génie surhumain capable de tenir la plume de Paul en plus de la mienne. Non, il faudra vraiment dissiper ces fumées et prendre Paul au sérieux. Ne pas abîmer ce garçon d’or pur…  » » Merveilleux.

Quant au livre, il l’est tout autant, relatant l’histoire de Momo recueillit à 3 ans dans le quartier de Belleville par une juive déportée ex-prostituée, madame Rosa, qui joue désormais les nounous des enfants des prostitués d’aujourd’hui. Momo a grandi, il a 14 ans et c’est désormais lui qui doit s’occuper de madame Rosa, malade. Il croise la route d’un ancien boxeur devenu travesti au Bois de Boulogne ou d’un vendeur de tapis ambulant et c’est tout le Paris de l’époque qui regorge d’humanité et prend vie dans ces pages. Un classique de la littérature ! 

« La vie devant soi », de Romain Gary aux éditions Gallimard

meilleurs livres primés au goncourt

1992 : « Texaco », de Patrick Chamoiseau

Après une arrivée dans le monde littéraire en 1986, Patrick Chamoiseau ne tarde pas à marquer les esprits. Ce sera son « Texaco », 432 pages, du nom d’un quartier de la périphérie de Fort-de-France, qui emportera la mise avec une épopée de la conquête créole de la ville sur trois générations. C’est toute l’histoire de la Martinique depuis le 19ème qui est racontée ici, ses souvenirs, ses paysages, ses personnages, jusqu’à la lutte des Noirs antillais pour imposer leur identité créole. Un roman lyrique comme satirique d’une grande émotion où s’entremêlent les époques et les voix, la misère et l’espoir, le français et le créole, une langue imagée, métissée, soutenue et libre ! « Dans ce que je te dis là, il y a le presque-vrai, et le parfois-vrai, et le vrai à moitié. Dire une vie c’est ça, natter tout ça comme on tresse les courbes du bois-côtelettes pour lever une case. Et le vrai-vrai naît de cette tresse. »  Il est bon de le relire, on pense à Alice Zeniter de ci, de là. On se demande, ce qui en 32 ans, a changé dans la promesse de modernité.

« Texaco », de Patrick Chamoiseau aux éditions Gallimard

meilleurs livres primés au goncourt

1997 : « La Bataille », de Patrick Rambaud 

Il nous fallait évidemment un grand livre (mais petit par sa taille !) d’Histoire comme celui de Patrick Rambaud pour parfaire cette liste de Goncourt à lire et à relire. C’est simple, on croirait que l’auteur y était. Pourtant il raconte la bataille d’Essling, heure par heure, des 21 et 22 mai 1809 : les armées de Napoléon attaquent les Autrichiens après avoir traversé le Danube. Ils sont obligés de se replier sur l’île Lobau. Les ponts sont détruits, la situation est catastrophique. Quarante mille morts sur les rives du fleuve en deux jours. Cela fait cinq ans que les troupes se battent et voici la première défaite indéniable de l’empereur français, compris aujourd’hui comme un tournant de la guerre, le début de la fin. On entend rugir les canons, hurler les hussards, discuter les cuirassiers, on croit voir les soldats soupirer et les hauts gradés s’écharper. On ne peut qu’imaginer évidemment mais pour cela Patrick Rambaud nous facilite le travail, le roman fourmille de détails vivants. Ensuite, il faut enchainer avec « Il neigeait » et « L’Absent » pour lire la fin de l’aventure napoléonienne, les deux ouvrages suivants de cette trilogie. Un champ de bataille.

« La Bataille », de Patrick Rambaud aux éditions Grasset

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2007 : « Alabama Song » de Gilles Leroy

Les puristes – des grands classiques – se demanderont peut-être pourquoi ce livre figure dans une liste des 10 meilleurs Goncourt. Comme toute liste elle est forcément subjective. Mais on persiste et on signe. Alors que l’œuvre de Gilles Leroy se concentre en partie sur de l’autofiction (lui préfère parler d’autographie), son douzième roman évoque la vie (documentée mais romancée) de Zelda Fitzgerald, compagne de Francis Scott Fitzgerald. Pour l’heure, Zelda n’est pas encore une Fitzgerald : le roman débute en 1918 en Alabama, elle a 18 ans et son nom est Sayre. Scott, qui s’est juré de devenir écrivain, est un lieutenant de 21 ans. Tout s’emballe, parce que c’était lui, parce que c’était elle, la vie comme le succès, les joies comme les peines, l’ambition et l’alcool et, très vite, le duo vit une vie de mondains où les rires ont laissés place aux excès. Ce sont les enfants terribles des années 20. Alors comment vit-on lorsqu’on souhaite écrire à côté de l’écrivain le plus célèbre de son temps ? Qu’y a-t-il sous ces frasques incessantes, ces crises et ces révoltes ? « J’aime le péril… les précipices…, les dés qu’on jette étourdiment en pariant sa vie entière, et je n’attends même pas qu’ils aient fini de rouler pour décider de ma ruine. Me perdre, j’aime aussi, à l’occasion. C’est moi. Rien ne m’en guérira. » Un magnifique portrait de femme, libre, cynique, cultivée, publié la même année que le début du mouvement MeToo. Un signe pour cet ouvrage qui colle au plus près des désirs et de la psyché d’une femme, trop souvent réduite à ses frasques et à son nom de mariée. Vive Zelda !

« Alabama Song » de Gilles Leroy aux éditions Mercure de France

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2016 : « Chanson douce », de Leïla Slimani

Impossible d’oublier ce livre. Déjà grâce à la force d’écriture de Leïla Slimani dont on ne se lasse pas, tranchante et sous tension, créant un suspens lattant, doublée d’une absence absolue de jugement. Ensuite grâce à sa dissection des relations humaines, des rapports de domination et d’argent, qui racontent – entre autre – notre société. Enfin de par sa fin. « Chanson douce » raconte l’histoire de Myriam, mère de deux enfants qui souhaite reprendre son activité dans un cabinet d’avocats. Avec son mari, ils cherchent donc une nounou. Ils engagent Louise qui se rend vite indispensable, il faut dire que le couple lui délègue jusqu’à sa propre intimité. La suite, il faut la lire. En 2016 ils sont 10 à récompenser l’autrice : Bernard Pivot, Paule Constant, Pierre Assouline, Françoise Chandernagor, Didier Decoin, Philippe Claudel, Patrick Rambaud, Tahar Ben Jelloun et, pour la première fois cette année, Virginie Despentes et Eric-Emmanuel Schmitt. Leïla Slimani devient la onzième femme à recevoir la récompense en 113 ans. 

« Chanson douce », de Leïla Slimani aux éditions Gallimard

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2018 : « Leurs enfants après eux », de Nicolas Mathieu

Comment ne pas finir par celui-ci ? Porté à l’écran par Ludovic et Zoran Boukherma, en salle le 4 décembre prochain, le drame écrit par Nicolas Mathieu a tout d’un film. Il en a la vigueur, en racontant l’adolescence, la première histoire d’amour et ce moment si particulier où l’on se sent coincé entre deux âges, c’est un « récit politique d’une jeunesse qui doit trouver sa voie dans un monde qui meurt » nous dit la quatrième de couverture. Comment ne pas se projeter ? C’est l’histoire intime qui raconte celle de millions d’autres. Là, dans le bourg d’Heillange où on rêve de partir pour ne pas finir comme ses parents. Pas comme ceux au chômage, pas comme les pères immigrés « suspendus entre deux rives, mal payés, mal considérés, déracinés », ni comme ces mères qui « finissaient toutes effondrées et à moitié bonniches, à ne rien faire qu’assurer la persistance d’une progéniture vouée aux mêmes joies, aux mêmes maux ». A l’horizon, l’espoir prend toute la place ! Les hormones travaillent durant quatre étés racontés successivement : 1992, 1994, 1996 et 1998 où se joue, à chaque fois, une musique totem. Le désenchantement est total, pourtant on vibre devant l’intensité du propos. Comme toujours avec Nicolas Mathieu, le choc des classes sociales parsème l’histoire, ce qui en fait un grand roman du XXIème siècle, une fresque sociale et politique de l’intime. 

« Leurs enfants après eux », de Nicolas Mathieu aux éditions Actes Sud

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